Votre météo par ville
Quand on lui demande d’où elle est originaire, Justine Lepers – De Bleecker remonte à l’Italie natale de sa grand-mère Anita. « C’est d’elle que je tiens ma passion pour la terre, le sol, le jardin : la nature. Elle est arrivée dans les années 30 et a grandi dans une cité familiale où les jardins ouvriers tenaient une grande importance », enracine-t-elle. Ajoutez un père aux origines belges, un mari complètement belge, une sœur jumelle mariée à un Écossais et installée au Royaume-Uni et vous avez le terreau plus-ouvert-tu-meurs de la jeune quadragénaire.
« Le verbe de ma vie, c’est transmettre », poursuit Justine Lepers – De Bleecker pour établir un trait d’union entre ses différentes vies. De professeure d’histoire-géo d’abord, pendant une décennie de 2007 à 2017, où elle enseigne notamment en anglais. « Je menais des projets d’éducation au développement durable avec mes élèves et je suis devenue chargée de projets européens », bifurque-t-elle une première fois. Pendant trois ans, elle combine alors son goût de l’enseignement et celui de l’environnement en pilotant des projets d’éducation et de sensibilisation à l’agenda 2030 de l’ONU : 17 objectifs de développement durable définis par l’organisation mondiale en 2015. « Lutte contre le réchauffement climatique, égalité entre les sexes… bref, construire une planète durable, inclusive et solidaire », formule la Nordiste.
« J’aime expérimenter aussi, et j’ai toujours été passionnée par les jardins partagés : j’étais d’ailleurs bénévole dans un projet d’agriculture urbaine à Lomme (59) au sein de l’association “Les gens qui sèment”. Nous avions transformé une friche en potager », remonte Justine Lepers – De Bleecker.
C’est à ce moment-là qu’elle se forme à la conception de micro-ferme en permaculture. En 2020, elle passe six mois comme maraîchère bénévole dans la Drôme : « Un laboratoire d’expérimentations », salue-t-elle.
De retour dans le Nord, la jeune femme reprend ses missions pédagogiques dans un centre d’éducation à la nature. « Et j’étais très intéressée par le compostage. » Nous y voilà. « Parce qu’il fait la synthèse de tous les enjeux de transition, explique-t-elle : le sol vivant, le cycle de l’eau, l’alimentation durable mais aussi la création de lieux de vie essentiels dans la période d’urgence démocratique que nous vivons. »
Convaincue d’avoir trouvé là le meilleur moyen d’aligner les planètes, Justine Lepers – De Bleecker devient guide-composteure, ces ambassadeurs qui sensibilisent le grand public à la pratique. Côté pro, elle devient chargée de mission RSE (responsabilité sociale des entreprises) et développement durable en entreprise et œuvre, avec l’association bailleuloise “La grelinette des champs” à éduquer à la préservation de la biodiversité par le jardinage au naturel.
C’est dans cet esprit que la Flamande d’adoption soutient son mémoire sur “La remobilisation autour du compostage partagé à Bailleul” : un premier projet avait capoté, elle se mobilise pour que le second aboutisse en identifiant et levant les freins, en nouant des partenariats… Juin 2024, Justine Lepers – De Bleecker obtient la certification professionnelle de maître-composteure. Ils sont environ 400 en France à accompagner grand public, entreprises, associations ou collectivités dans l’installation et le fonctionnement de sites de compostage individuels ou partagés, à l’image de celui dont elle a accompagné la naissance à Bailleul.
À titre bénévole d’abord, en partenariat avec la ville de Bailleul et le Smictom des Flandres (syndicat mixte intercommunal de collecte et de traitement des ordures ménagères) depuis, la Nordiste se rapproche de l’association “La vie devant soi”, qui gère des habitats partagés accompagnés (Hapa) dans le Nord, dont un à Bailleul : 12 maisons habitées par des personnes âgées, avec des temps communs pour rompre l’isolement. « Les locataires voulaient créer leur potager partagé, de notre côté nous cherchions un site de compostage partagé », synthétise la jeune quadragénaire. Le 1er juin étaient installés les bacs utilisés par les 12 locataires ainsi que trois familles du quartier. Une permanence est tenue chaque semaine par deux locataires. « Julie, une des habitantes du quartier, vient avec ses enfants alors même qu’elle a un bac à compost dans son jardin. Elle dit que ça l’intéresse de fréquenter un site partagé, et que ses enfants fréquentent des personnes âgées autres que leurs grands-parents », dévoile la maître-composteure. « Un site de compostage, c’est plus qu’un lieu où on traite des déchets », résume-t-elle aux côtés de Daniel, l’un des résidents venu dire bonjour dans la maison commune. « C’est bien tout ça, pour expliquer aux enfants que ce qui vient de la terre retourne à la terre et que le compost a une valeur nutritive énorme pour la plante », déroule l’agriculteur retraité.
De la plante à la terre, de l’enfant au vieil homme, Justine Lepers – De Bleecker a dessiné un cercle parfait. Une histoire de racine, encore. Et pour être parfaitement en phase avec ses principes, elle est aussi entrepreneure en coopérative depuis qu’elle a rejoint la coopérative de transition écologique Tilt, à Grande-Synthe (59) : l’une des sept du genre en France, la seule dans la région. « Une structure créée dans l’idée d’accompagner la transition écologique sur les territoires en soutenant les initiatives d’entrepreneurs qui agissent pour une transition écologique et juste socialement », décrypte-t-elle.
Lire aussi : Les Alchimistes : des déchets alimentaires au compost à grande échelle
Justine Demade Pellorce