Dix-huit petits mois.
C’est le temps qu’il aura fallu à Valentina Giacobbe et Julien Ingaud-Jaubert pour décrocher une étoile au Guide Michelin et installer Ginko parmi les meilleures tables lilloises. Une ascension expresse !
En septembre 2023, ils ouvrent leur restaurant « gastro » rue de l’Hôpital Militaire, à deux pas de la Grand-Place. Ils y proposent une cuisine haut de gamme et locale à des tarifs accessibles. Le décor est simple, élégant, avec des murs de briques rouges. Une ambiance typiquement lilloise.
Julien est né à Perpignan. Diplômé d’un BEP et d’un bac pro au lycée hôtelier, il enchaîne les petits boulots dans des restaurants de sa région natale avant de « monter à Paris en 2015« . En février de la même année, il intègre les cuisines du célèbre chef cuisinier Pierre Gagnaire, en tant que pâtissier. Il y restera trois ans, le temps de « faire ses armes« .
Valentina, elle, est née à Paris, mais a grandi entre l’Italie et l’Asie. Après un bac général, elle intègre Sciences Po Rome. Mais déjà à l’époque, elle rêve de haute gastronomie. « C’était un rêve lointain, presque impossible, avoue-t-elle. Je ne pensais pas en être capable… » Jusqu’à ce qu’elle découvre une formation en alternance pour adultes en reconversion. Une révélation. Elle y apprend les bases de la cuisine, tout en s’immergeant directement dans le monde de la cuisine. « La moitié de la promo a abandonné au bout de deux mois, se souvient la cheffe, Moi, j’ai continué et j’ai fini par décrocher une alternance chez Pierre Gagnaire.«
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Elle y rencontre Julien pour la première fois. Et de leur rencontre en cuisine naît une complicité aussi bien professionnelle que personnelle. Après leurs passages respectifs aux restaurants Le Gaya et au Meurice, ils décident de quitter Paris. « On avait envie de voir autre chose« , résume Julien.
En quête d’un nouveau point de chute, ils passent une après-midi à Lille, mangent au Bloempot de Florent Ladeyn, et tombent immédiatement sous le charme de la capitale du Nord. Ils ne connaissaient pas la ville. Mais huit ans plus tard, ils y sont toujours. « On a aimé tout de suite l’énergie et le dynamisme lillois. » En 2017, Julien rejoint les cuisines de Marc Meurin au Château de Beaulieu (62), un restaurant deux étoiles. Valentina, elle, intègre l’équipe de Christophe Saintagne, chez qui elle apprend « énormément et passe un nouveau palier. » Pour l’Italienne d’origine, la cuisine est avant tout un langage, une façon de s’exprimer. « Chez moi, tout tournait autour de l’alimentation. C’était une façon de m’exprimer. Plus encore que par les mots.«
Après avoir « bien roulé leur bosse« , le couple lance Ginko en septembre 2023. « Notre objectif depuis le début est de pratiquer des tarifs abordables. On voulait permettre à tout le monde de faire l’expérience d’un gastronomique à prix accessibles. » Pari réussi ! Comptez entre 40 et 65 euros le menu gastronomique. Un tarif plus que raisonnable pour quiconque souhaiterait faire l’expérience d’une cuisine haut de gamme.
« Notre cuisine se décline autour du végétal et du poisson, précise Valentina. Nous n’avons qu’une seule viande à la carte. Les produits sont locaux, issus d’une agriculture respectueuse. » « Il faut être cohérent« , ajoute Julien. Seuls les agrumes viennent d’un peu plus loin, Perpignan, mais d’un « petit verger en culture raisonnée« . Le pain est fourni par Levain du Nord, boulanger d’Arras qui travaille avec des farines anciennes. Les poissons arrivent directement du port de Boulogne-sur-Mer. Et pour les légumes, ils se font livrer en grande partie par Philippe Lallau, installé à Bailleul (59).
Ce respect des saisons et du vivant se retrouve dans les assiettes. « La saisonnalité des produits, c’est notre point de départ, s’accordent les deux cuisiniers. C’est important pour nous de soutenir des agriculteurs et des artisans qui font les choses bien, dans le respect de la nature.«
Si aujourd’hui le Ginko s’est imposé comme un incontournable de la scène culinaire lilloise, tout n’a pas été simple. « Pendant un an, l’activité était très aléatoire. Il n’y avait pas de logique. Psychologiquement, c’était dur de ne pas savoir si on allait remplir le restaurant« , confient les deux restaurateurs. L’étoile Michelin obtenue en mars a tout changé.
En 24 h, 350 mails, deux mois de réservations remplis. « Une grande satisfaction pour toute l’équipe. On a enfin eu la confirmation qu’on faisait du bon travail ! » Et comme une bonne nouvelle n’arrive jamais seule, Valentina a reçu dans la foulée le prix de Jeune cheffe 2025, décerné par le Guide Michelin. Une reconnaissance qui vient rappeler que suivre sa passion peut parfois mener bien plus loin qu’on ne l’imagine.
Julien Caron
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par Justine Demade Pellorce
<< Gérante de la brasserie Thiriez, Clara parle de son parcours - venue pour 3 mois... il y a 11 ans ! >>
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