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Réduction et réemploi : où en est-on ?

03-08-2023

Actualité

Politique-syndicalisme

Le Sénat a dévoilé un rapport sur la réduction, le réemploi et le recyclage des emballages. Si la mise en place de consignes pour le réemploi est saluée, d’autres dispositifs sont à mettre en œuvre selon les sénateurs.

Selon le rapport de la commission du Sénat, la quantité de bouteilles en plastique pour boissons se maintient entre 2020 et 2022 à un niveau supérieur à 350 000 tonnes © Pixabay

En 2020, la loi Agec (loi antigaspillage pour une économie circulaire) prévoyait une concertation avec le Gouvernement concernant la mise en place de consigne pour recyclage ou réemploi, qui a débuté en janvier 2023. Dans ce contexte, la commission sénatoriale de l’aménagement du territoire et du développement durable a mis en place une mission flash ayant pour objectifs “d’exercer sur la concertation engagée une vigilance renforcée” et “de s’assurer que le débat engagé soit le plus complet possible“.

En juillet, cette commission dévoilait son rapport de mission et 28 propositions de mesures à mettre en place pour favoriser la réduction, le recyclage et le réemploi des emballages.

Une France en retard

Premier constat : la France a du retard sur le sujet. Si, comme le rappelle la commission, la réduction des déchets est un objectif primordial dans la politique d’économie circulaire car “d’un point de vue environnemental et économique, le meilleur déchet est celui qui n’est pas produit“, le fait est que les quantités d’emballage ces dernières années n’ont pas été réduites. Et ce, “à rebours des objectifs législatifs et réglementaires associés à cette ambition“.

Ainsi, selon ce rapport, “la quantité d’emballages a stagné depuis 2010 tandis que celle d’emballages plastiques a augmenté de 20 %. La quantité de bouteilles en plastique pour boissons ne diminue pas non plus, se maintenant entre 2020 et 2022 à un niveau supérieur à 350 000 tonnes“.

Du côté du recyclage, ce n’est guère mieux à en croire le rapport. Alors que le Gouvernement a fixé un objectif de taux de recyclage des emballages plastiques de 55 % et de 90 % pour les bouteilles en plastique pour boisson d’ici 2029, les taux actuels de recyclage pour ces deux types emballages sont respectivement de 20 % et 55 %.

La consigne : oui, mais pour le réemploi uniquement

Pour rattraper ce retard, le Gouvernement aimerait donc miser sur la consigne. Il existe deux types de consignes sur lesquelles le Gouvernement se pose des questions : la consigne pour réemploi et la consigne pour recyclage. Pour le citoyen, le geste est le même. Il achète, par exemple, sa bouteille d’eau quelques centimes de plus et la rapporte une fois vide au supermarché ou chez son commerçant. En échange, il reçoit ces fameux quelques centimes supplémentaires.

En revanche, la finalité n’est pas la même. Pour le réemploi, la bouteille est lavée et reremplie pour être remise en vente. Pour le recyclage, eh bien elle est recyclée. Dans le premier cas, on parle donc plutôt de contenant en verre (c’est d’ailleurs ce qu’encourage la commission sénatoriale), alors que dans l’autre, on parle des bouteilles plastiques ou des canettes en aluminium.

Pour les sénateurs, la consigne pour recyclage est “une fausse bonne idée” et ce pour plusieurs raisons. Premièrement, “l’objectif de 90 % de collecte pour recyclage des bouteilles plastiques pour boisson d’ici 2029 porte sur l’ensemble des bouteilles plastiques, et pas seulement sur celles en PET. Or, de nombreux dispositifs de consigne mis en place en Europe ne concernent que les bouteilles en PET“.

Deuxièmement, “il semble difficile de répliquer les modèles étrangers en France caractérisée par la place historique du service public dans la gestion des déchets“.

Troisièmement, “loin de lutter contre le plastique, la consigne pour recyclage en pérennise la production et la consommation“. En effet, selon le rapport, la part de bouteilles réutilisables en Allemagne aurait baissé de 38 % depuis la mise en place des consignes pour recyclage.

Enfin, la mise en place de ce système suppose qu’il coexiste avec le système déjà existant. Or, cette coexistence pourrait coûter entre 181 et 229 millions d’euros par an à partir de 2029, par rapport au scénario sans consigne. “En définitive, la consigne pour recyclage constitue pour l’heure une impasse“, conclut la commission sénatoriale.

Aussi, la commission n’y va pas par quatre chemins : “Il faut sortir du statu quo et actionner tous les leviers pertinents d’un point de vue environnemental et économique.”

Appliquer le trio réduire, recycler, réemployer

Première étape : réduire la quantité d’emballages mis sur le marché, notamment en développant le réemploi. Pour y parvenir, la commission recommande de “planifier le développement du réemploi pour donner de la lisibilité aux acteurs économiques et accélérer la sortie du “tout jetable”“, “lever les freins financiers et techniques à la réduction des emballages et au développement du réemploi” et de “contrôler les éco-organismes“. La commission propose, par exemple, de “mettre en œuvre des dispositifs de consigne pour réemploi sur les emballages en verre” et d'”accélérer le développement et la diffusion des standards d’emballages réemployables “.

Deuxième étape : améliorer le tri. Ici, la commission sénatoriale propose d’avoir recours à des leviers incitatifs et dissuasifs. Côté incitatif, elle suggère de renforcer l’information auprès du “citoyen-consommateur sur le geste de tri et le rassurer sur le bien-fondé de la politique d’économie circulaire” en lançant une campagne nationale “notamment pour permettre la montée en puissance des extensions des consignes de tri“.

Elle met aussi en avant les dispositifs de tarification incitative qui permettent, comme l’indique l’Ademe (Agence de la transition écologique), “l’application du principe pollueur – payeur aux usagers du service. Elle intègre le niveau de production de déchets pour facturer l’usager, alors incité financièrement à des comportements vertueux”. Pour la commission sénatoriale, la généralisation à l’ensemble du territoire français de ce principe est un bon levier d’incitation. Elle recommande un essor des aides au développement de ce dispositif sous forme de subventions directes de l’Ademe ou d’une “atténuation supplémentaire des frais de gestion grevant la taxe d’enlèvement des ordures ménagères incitative (TEOMi)”.

Actuellement, 10 millions de Français sont couverts (ou en passe de l’être) par ce dispositif. Pour atteindre les objectifs gouvernementaux d’ici 2029, ils devraient être 41,5 millions.

Troisième étape : améliorer la collecte des emballages dans et en dehors du foyer. Cela implique selon le rapport de faire “monter en puissance le bac jaune. On peut, par exemple, instaurer un bonus tendant vers une couverture intégrale des coûts, pour récompenser les collectivités territoriales menant et programmant des actions visant à améliorer le taux de collecte”. Il faudrait aussi, selon le rapport, “mieux collecter en dehors du foyer en systématisant le tri dans l’espace public et les entreprises” mais aussi “adapter la collecte en déployant des moyens adaptés dans les territoires urbains, touristiques et ultramarins”, par exemple en ajoutant une part additionnelle à la taxe de séjour payée par les touristes à l’origine du surcoût de traitement des déchets dans les territoires touristiques.

Retrouvez l’ensemble des propositions sur le site du Sénat, rubrique “Travaux parlementaires”, sous la rubrique “Commission de l’aménagement du territoire et du

Eglantine Puel

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