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« Lors de mon entretien pour le poste de directrice de l’institut d’Anchin j’ai dit au jury “comme vous le voyez je suis une femme de parole, je m’étais juré de ne pas travailler dans le monde agricole” », plaisante Sabine Ioos, directrice depuis septembre 2023 de l’établissement privé de Pecquencourt (lire notre édition du 6 décembre 2024).
En effet, alors que cette fille d’agriculteurs s’était donné pour objectif de ne pas travailler dans ce monde-là, la vie en a décidé autrement. La raison : les valeurs du monde agricole qui guident Sabine Ioos dans ses choix.
Tout commence à Cappelle-en-Pévèle où Sabine Ioos grandit avec ses parents, vendeurs au détail. « C’est un métier avec des contraintes fortes, la vie était un peu particulière. À l’adolescence, je trouvais ça un peu lourd, c’est là que je m’étais dit que j’essaierais de m’éloigner du monde agricole. »
Elle effectue ainsi son lycée à Lille, en internat puis passe une maîtrise de mathématiques à l’université catholique de Lille. « Mon projet était d’être professeure de mathématiques. Je voulais travailler avec du public, et si possible des jeunes, public pour lequel j’avais une plus forte sensibilité. » Elle passe donc son Capes, qu’elle n’obtient pas à ce moment-là. Mais souhaitant travailler, « je postule dans plusieurs établissements, et j’ai atterri à l’institut de Genech en tant qu’enseignante en mathématiques pour plusieurs filières ».
« Rapidement, j’ai compris que ça me plaisait du fait du métier mais aussi des valeurs portées par les établissements agricoles privés, qui sont les miennes. Je n’ai jamais oublié d’où je venais et les valeurs que mes parents m’ont transmises sont très fortes. Ça finit par ressortir ! » Ces valeurs : le travail, le respect de l’autre et la simplicité dans les rapports humains.
Par la suite, elle épousera même un agriculteur. Décidément, on ne se refait pas ! « J’ai vu mes parents bosser tout le temps, mais je n’étais pas malheureuse. Certes ils travaillaient beaucoup, mais j’ai pris le goûter avec eux tous les jours. Cette importance accordée au fait d’être ensemble, en famille, de prendre soin des autres ce sont eux qui me l’ont transmise. »
« Je suis restée 20 ans à Genech. Là-bas j’ai passé mon Capes en interne, j’ai été professeure principale à tous les niveaux, coordinatrice (j’accompagnais les jeunes dans leur orientation)… Je ne me complais pas dans la monotonie donc j’ai toujours créé de la nouveauté. » En parallèle elle enseigne aussi quelques années à l’ISA (Institut supérieur d’agriculture, aujourd’hui Junia).
2002. Elle obtient sa maîtrise de mathématiques.
2003-2023. Elle enseigne à l’institut de Genech.
2023. Elle est nommée directrice de l’institut d’Anchin.
2029. L’institut d’Anchin fêtera ses 100 ans et elle compte bien être là !
C’est en voyant passer l’annonce de l’institut d’Anchin qui recherchait un directeur ou directrice sur le site du Cneap (Conseil national de l’enseignement agricole privé) que Sabine Ioos se dit « et pourquoi pas ? » : « J’ai vu ça comme un défi à relever. »
Devenue directrice, elle continue aujourd’hui d’apprendre : « En parallèle de mon travail au quotidien, je suis une semaine par mois en formation avec l’Ifeap (institut de formation de l’enseignement agricole privé). La formation dure deux ans et doit être validée par le ministère de l’Agriculture. »
Ça, c’est pour la théorie, mais son travail quotidien est, lui aussi, un apprentissage à part entière : « On n’est jamais expert d’un sujet ici ! Quand on est cheffe d’établissement, on est un couteau suisse. On est à l’abri de l’ennui c’est certain ! Surtout, je crois que ce poste ne nous met pas en haut de la pyramide mais au milieu d’une équipe. »
Sabine Ioos a aussi conscience qu’elle s’inscrit dans une « succession de chefs d’établissement qui ont construit l’histoire d’Anchin. Une histoire forte qui produit un attachement des étudiants et des équipes à cet établissement. Il y a véritablement des familles “made in Anchin” ! Dans mon rapport d’étonnement c’est une des choses que j’ai mise en avant : cet esprit familial. Mon arrivée à Anchin n’est donc pas un hasard : je vais bien dans le décor ! »
Un esprit familial qui n’empêche pas « de savoir trancher, de montrer qu’on peut faire autorité. Mais toutes les décisions sont co-construites ».
Quant au fait qu’elle soit une femme, fait rare pour les postes de direction, « sur le coup, ce n’était pas une question en soi. Quand j’ai postulé, je n’ai même pas pensé à ça ! C’est en arrivant à Anchin et que j’ai constaté la surprise des équipes que j’ai compris que c’était un sujet. Mais quelque part, c’est un retour aux origines de l’établissement : quand Anchin était une école ménagère, c’était une directrice. La boucle est bouclée ! »
Eglantine Puel