Votre météo par ville
Alors que l’accord de libre-échange avec les pays du Mercosur est dans tous les esprits, il se trouve que dans le Nord, Damien Normand, éleveur de volailles, et Benoît Vaillant, en polyculture, se sont lancés dans le soja. La légumineuse, riche en protéines, est particulièrement populaire en élevage mais est surtout principalement importée d’Amérique du Sud. Aussi, les deux comparses l’attestent : il est possible d’en produire dans le Nord pour pallier cette dépendance.
Tout commence en 2020. « Chacun de notre côté, on s’était lancé dans des tests », raconte Damien Normand. De son côté, l’éleveur de volailles cherche un moyen de produire du soja pour « produire l’aliment des animaux avec des matières premières locales », de l’autre, Benoît Vaillant cherche à se diversifier.
« Sur mon exploitation, sur une de mes parcelles, on avait arrêté le pois en 2006, on ne s’en sortait plus avec les betteraves à la suite des nombreuses sécheresses. Je voulais trouver une solution agronomique pour continuer d’exploiter cette parcelle. Le lin et les pommes de terre, ça demandait trop d’investissement et en allant dans le sud pour les vacances, j’ai vu qu’ils avaient de plus en plus de mal à faire du soja à cause du réchauffement climatique. Je me suis dit qu’il y avait peut-être une carte à jouer », détaille-t-il.
Les deux hommes sont mis en contact par une connaissance commune en 2022 et commencent leur partenariat entre Sars-et-Rosières et le Cambrésis. « J’achète le soja de Benoît, soit ses quatre hectares », résume Damien Normand, qui en produit lui-même environ trois hectares. « Il me faudrait environ 10 hectares pour être parfaitement autonome. »
Après quatre ans d’essais, le duo commence à s’y connaître, bien qu’il le reconnaisse, « on essaye encore des trucs ! » Dans les grandes lignes, voici les grandes étapes, détaillées par Benoît Vaillant. Ce dernier démarre par « un labour d’hiver, mais c’est optionnel. Je fais ensuite les faux semis fin mars, début avril… Comme le soja vient d’Amérique du Sud, pour qu’il y ait symbiose entre la graine et notre sol français, il faut inoculer des bactéries spécifiques », maximum 48 heures avant le semis mais jamais plus tôt !
Vient alors le temps des semis, « après les saints de glace. Ça se sème comme du blé mais je recommande de faire du fond ! En termes de densité, il est recommandé de faire 80 grains / m2 mais je fais 100 grains / m2, à cause de la très forte pression pigeon ! » La récolte se fait ensuite généralement mi-octobre. Il recommande également l’utilisation d’une variété tardive.
« Le soja est une plante qui ne supporte pas les fortes chaleurs, qui a besoin à la levée de beaucoup d’eau mais par la suite non et qui ne nécessite quasiment aucun produit phytosanitaire, hormis le désherbant. La région s’y prête bien ! On le récolte à la batteuse, configurée pour les céréales et en fonction des années, il faut sécher », conclut l’agriculteur.
Par la suite, le soja doit être cuit. Pour cela, différentes méthodes existent mais Damien Normand a choisi la cuisson vapeur auprès d’un prestataire. « On peut toaster le soja, par exemple. Dans les tourteaux qu’on achète, le soja est sous forme d’huile aussi. Mais personnellement, j’ai vu une différence notable de qualité (entre ce qu’il achète et ce qu’il produit, ndlr) ! Pour la croissance c’est visible sans même avoir à mesurer », décrit Damien Normand. l’éleveur de volailles.
« C’est une diversification facile finalement et plutôt rentable. Cette année, j’ai gagné 90 € par heure travaillée », ajoute Benoît Vaillant.
Seules ombres au tableau : le manque d’équipements et de débouchés dans la région. « Mais ça viendra ! Notre message c’est surtout de montrer que c’est possible, que ce n’est pas si compliqué et que pour l’autonomie alimentaire c’est vraiment une bonne chose. »
Eglantine Puel