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Cité de la bière : Flandre, le favori naturel

03-08-2023

Grand format

Consommation

Cet été, rencontre avec les acteurs de la filière brassicole des quatre territoires initialement en lice pour accueillir la future Cité de la bière régionale. Cette semaine, direction la ferme Beck, en Flandre, où on cultive, on brasse et on anime le territoire. Une cité de la bière à elle seule.

Houblon, brasserie, chevaux : à la ferme Beck (ici Thierry), on défend un patrimoine flamand vivant. © J. D. P.

« Quand les houblonnières disparaissaient, il fallait participer à leur conservation ; quand la dernière grande brasserie a fermé (Motte Cordonnier, à Armentières (59) en 1993, ndlr), il fallait en lancer une. » Voilà, résumées, la démarche et la philosophie de la famille Beck depuis longtemps.

C’est aujourd’hui Thierry qui accueille – avec lui le mot prend tout son sens. Associé avec son frère Dany et aidé de son aîné, il incarne la quatrième génération à faire tourner la ferme Beck, à Bailleul.

Une ferme en polyculture élevage : 70 hectares, 70 vaches laitières. Blé, maïs, orge et pâtures sont complétés par 3 hectares de houblons, dont les fleurs de Challenger, Magnum et Nugget (les trois variétés) sont vendues aux brasseries de la région, via la coopérative CoopHouNord*, et dont on conserve quelques kilos.

Venez découvrir les autres territoires brassicoles ici.

Car ici, on brasse aussi. « Depuis 30 ans », pose l’agri-brasseur. Bien avant le boom des microbrasseries, c’est même le principe du contre-courant qui avait poussé la famille, ferme pédagogique depuis 40 ans – des précurseurs – à contrer la disparition de cette tradition locale. Une recette unique est brassée à l’année, à raison de 500 litres toutes les deux à trois semaines : la Hommelpap, dont la traduction du flamand signifie “jus de houblon” ou “fête du houblon”. Pas de problème, ici on fait les deux puisque cette tradition de la fête de fin de cueillette, à la mi-septembre toujours, a été relancée en 1996, deux ans après le lancement de la brasserie.

À cheval sur la tradition

Tous les deux ans, les années paires, le premier week-end de septembre voit affluer 10 000 personnes sur deux jours au cœur de la Flandre. La journée historique du dimanche reprend les codes de la hommelpap traditionnelle, avec lard et pommes de terre, par contre on lance la cueillette tous ensemble au lieu d’en célébrer la fin : plus sympa de s’attabler à l’ombre des houblonnières en fleurs. Une journée qui, outre les spectacles équestres sur chevaux de trait flamands (lire aussi notre édition du 7 janvier 2022 sur la réintroduction de cette race de chevaux par Denis, le père), permet à des artisans locaux de venir produire en public : « Le boulanger vient avec sa farine préparer ses faluches, le maréchal-ferrant vient ferrer en direct, l’apiculteur vient montrer son travail : je préfère qu’ils fabriquent sur place plutôt qu’ils viennent juste tenir un stand de produits », précise Thierry. Car ici, le premier dimanche de septembre comme tous les autres jours de l’année, on aime le patrimoine, mais on l’aime vivant.

Et pour que la fête soit encore plus grande s’est greffée, il y a quelques années, la Nuit du houblon : une soirée de concerts le vendredi soir avec, à chaque fois, une tête d’affiche (la rue Kétanou, Tryo, les Dubliners) qui fait déplacer les foules qui n’en avaient pas encore eu l’idée. « Mais toujours dans un esprit ultra-familial », prévient Thierry.

Un brassin unique s’ajoute à la carte, l’Alezane en référence à la passion pour le cheval de trait flamand que la famille réintroduit depuis des années sur le territoire, est servie en avril, à la réouverture de l’estaminet installé au-dessus de la brasserie : une ambrée qui inclut de l’avoine, clin d’œil au cheval encore et qui vient accompagner l’un des quelques plats flamands qui ont rejoint la longtemps unique assiette du brasseur.

La planète Beck

De la production à l’animation en passant par la transformation : à la ferme Beck on fonctionne comme une mini-Cité de la bière à part entière parce que ce qu’on fait, on aime avant tout le partager. C’est pourquoi « on accueille chaque groupe ou classe verte comme si c’était le premier », promet Thierry qui n’aime rien tant que de troquer sa casquette d’agriculteur contre celle de guide avant d’aller ouvrir la porte de l’un des gîtes de groupes équipées de becs d’hommelpap (un de 40 et un de 50 personnes) ou de démarcher la future tête d’affiche du festival qui aura lieu, notez-le, les 30 août et 1er septembre 2024.

D’ici-là, le lauréat de la Cité de la bière régionale sera connu, mais cela ne bouleversa pas plus que ça la planète Beck déjà bien en orbite.

Sur la candidature de la Flandre, Thierry Beck estime « n’avoir rien à y gagner mais l’implantation en Flandre fait partie d’une évidence. Elle pourrait mettre en valeur ce qui existe déjà d’une autre façon, avec davantage d’ouverture au public (bien qu’ici, encore une fois, on ne soit vraiment pas en reste). La Cité pourrait permettre de centraliser la filière houblonnière et brassicole, de donner une vue globale aux visiteurs avant, c’est un impératif, de le guider sur le territoire. »

Suggestion pour que les visiteurs de la Cité deviennent aussi des arpenteurs du territoire : lancer une vraie Route de la bière officielle à l’image des routes des vins et autres fromages.

La filière brassicole ici enracinée de A à Z

S’il fallait quelques arguments pour défendre la candidature flamande, Valentin Belleval répond présent. Pour le maire d’Hazebrouck et président de la communauté de communes de Flandre intérieure (CCFI) qui porte le projet, « la bière est une boisson, mais c’est aussi une tradition, des paysages, des productions : un terroir ». Or, en Flandre, on n’a pas attendu le boom des micro-brasseries pour faire mousser l’orge. « Nous avons même des brasseries centenaires, comme la 3 Monts », rappelle l’élu, qui pense encore aux houblonnières ou au festival international de la bière artisanale (le Fiba)… La filière est ici enracinée de A à Z.

Le territoire est logiquement candidat, et le projet ficelé. Une philosophie d’abord, celle de l’ouverture aux voisins, du côté du Dunkerquois, de la Lys ou des Hauts de Flandre et jusqu’à l’autre côté de la frontière, où chacun envisage de participer à cet élan touristique autour de la bière. « Au-delà des voisins immédiats, la Flandre ambitionne bien de créer un outil qui puisse profiter à l’ensemble de l’écosystème régional », indique Valentin Belleval, qui avance un autre atout : la maîtrise complète et immédiate du foncier, avec la friche de l’usine Nordlys à Bailleul. 1,5 hectare appartenant à la commune, 4 000 m2 de surface plancher prêts à être rénovés pour la somme de 20 millions d’euros, qui se présenterait comme bien plus qu’un musée mais une expérience totale. « Un lieu où nous pourrions proposer des actions de préfiguration dès 2024 », anticipe l’élu, qui rappelle l’objectif régional d’une ouverture de la future Cité fin 2025.

Deux candidats sur quatre encore en lice


Quatre territoires candidats avaient été retenus fin avril pour accueillir la future Cité de la bière : la Pévèle-Carembault, Arras, la Sambre Avesnois et la Flandre intérieure. Alors qu’elle a choisi d’avancer l’annonce du lauréat à la fin septembre, la Région a désigné jeudi 27 juillet les deux finalistes : la Pévèle-Carembault et de la Flandre intérieure. Retrouvez plus d’informations sur notre site internet.

Justine Demade Pellorce

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