Invasif, vorace, et désormais rebaptisé : le frelon à pattes jaunes gagne du terrain en France. Connu jusqu’ici sous le nom de frelon asiatique, l’insecte de la famille des hyménoptères continue de menacer les abeilles et la biodiversité dans de nombreuses régions de l’Hexagone.
À Royon, dans le Pas-de-Calais, l’association Eureka ne s’est pas contentée de constater les dégâts provoqués par le frelon. Depuis fin 2023, son directeur Freddy Legrand a lancé un projet local de fabrication de pièges à frelons en bois, une initiative qui mêle action environnementale et insertion sociale.
« Tout est parti d’une idée en commun avec Robert Therry, ancien député du Pas-de-Calais et passionné d’apiculture, qui tient aujourd’hui le musée vivant de l’abeille d’Opale, à Bouin-Plumoison, rembobine Freddy Legrand. Ses ruches ayant été attaquées, il m’a sollicité pour produire un piège à frelons efficace et qu’on pourrait diffuser dans le territoire. » Ensemble, les deux hommes créent un prototype puis présentent le dispositif aux communes environnantes.
Et l’initiative séduit instantanément : en quelques mois, plus de 250 pièges sont commandés, par des collectivités mais aussi par des particuliers. La Communauté de communes du Haut Pays du Montreuillois (CCHPM) opte même pour l’installation d’un piège dans chacune des 49 communes de son territoire et fait la promotion du piège auprès de ses administrés.
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L’objectif est clair : empêcher la formation de nids de frelons en capturant les reines le plus tôt possible. « Notre modèle de piège est sélectif, efficace, et surtout il peut être utilisé par tout le monde », insiste Freddy Legrand. « Il se compose d’un caisson en bois équipé de deux cônes millimétrés, conçus par la société Jabeprode. Le frelon à pattes jaunes peut entrer, mais il ne peut pas ressortir. »
L’insecte est attiré par un appât riche en protéines et en sucres : déchets de poisson, bière brune, confiture ou miel. Le tout est combiné à du vin blanc, qui a la propriété de repousser les abeilles. « Et si une abeille entre malgré tout, elle peut ressortir, car une grille sépare l’appât du piège proprement dit, c’est pour ça qu’on parle de piège sélectif. »
L’association Eureka fabrique et vend des pièges à frelons, mais prend aussi le temps d’expliquer leur bon usage. « Parfois on me dit « votre piège ne fonctionne pas », mais c’est juste qu’il n’y a pas de frelons dans la zone !, sourit Freddy Legrand. À l’inverse, certains clients nous envoient des photos de pièges remplis de centaines de frelons ! » Il est d’ailleurs conseillé de ne pas vider le piège immédiatement : lorsqu’un frelon meurt, il libère des phéromones d’alerte qui attirent ses congénères. Ce qui peut permettre la capture de 300 à 400 autres individus dans certaines zones.
Détail important : le piège ne doit jamais être posé au sol. Car les insectes non ciblés qui vivent à ras de terre pourraient s’y retrouver enfermés. Il faut le surélever, sur un parpaing ou une table, et le placer près d’arbres fruitiers, dont les fruits mûrs attirent les frelons par leur sucre. Enfin, le vent joue un rôle crucial : si le piège semble inefficace à un endroit, il faut tester un autre emplacement.
Pour Freddy Legrand, « le printemps et l’été sont des périodes propices pour capturer les frelons, car de juin à août, les colonies sont en croissance rapide. Mais on peut quand même attraper des frelons tout au long de l’année ».
Au-delà de la lutte contre le frelon à pattes jaunes, cette initiative s’inscrit pleinement dans l’une des missions principales de l’association Eureka : l’insertion sociale et professionnelle. Créée il y a plus de 30 ans, en 1993, l’association a aidé des centaines de personnes confrontées à des difficultés à retrouver un emploi : problèmes de santé, addictions, surendettement, illettrisme ou parcours judiciaire. « Dans notre région, l’exclusion a pris des proportions alarmantes ! Nous agissons contre l’exclusion en mobilisant des moyens pour permettre à un public en difficulté de se remettre au travail et de retrouver de la dignité. Notre action passe par des activités d’insertion par l’activité économique, que ce soit de l’entretien d’espaces verts ou de la menuiserie ».
Dans l’atelier de menuiserie de Royon, on fabrique des jardinières, des bancs, des nichoirs, des bacs à compost… et bien sûr, des pièges à frelons, conçus et montés entièrement à la main. Une activité qui redonne du sens aux personnes en difficulté tout en les sensibilisant à une problématique écologique. Depuis peu, un petit magasin, attenant à l’atelier permet au grand public de découvrir et d’acheter les créations de l’association. Le piège à frelons, vendu 70 euros, y occupe désormais une place de choix.
Julien Caron
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