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Les arboriculteurs sont dans les starting-blocks. Certains ont même déjà commencé à cueillir quelques variétés précoces. La récolte des pommes est en avance de plus de 15 jours cette année. Dans le Nord et le Pas-de-Calais, ils sont une centaine d’arboriculteurs à cultiver ce fruit, sur près de 400 hectares (1600 ha pour la région Haut-de-France). Le plus gros de la production (90 %) est destiné au marché du frais.
Au niveau national, la récolte 2020 est estimée à 1,431 Mt, a annoncé l’Association nationale pommes poires (ANPP) le 27 août en conférence de presse. C’est 8 % de moins par rapport à l’an passé et – 13 % par rapport à la moyenne des dix dernières années, a indiqué le responsable des affaires économiques de l’ANPP Vincent Guérin. Il attribue cette “petite” récolte à l’alternance de rendement interannuel des vergers et à une mauvaise floraison.
Si la cueillette ne s’annonce pas des meilleures, c’est qu’elle a été fortement marquée par le gel, puis le stress hydrique. Les rendements devraient donc varier selon les vergers et les moyens mis en place pour lutter contre les aléas climatiques.
À lire aussi, notre reportage photos au verger Terroir du Nord, où Christelle et Moïse Labre-Degeuser se préparent à la récolte :
“L’hiver a été relativement doux, et les arbres ont plutôt été favorisés au départ, notamment grâce à l’eau qu’il y a eu pendant l’hiver, se remémore Ludovic Tournant, ingénieur en recherche et développement à la Fredon Hauts-de-France, qui revient pour nous sur une saison très particulière. Le départ de saison s’est fait de façon très rapide.”
Toutefois, au printemps, des coups de gel assez fréquents ont entraîné un éclaircissage naturel dans les arbres. “Aujourd’hui, il existe des techniques qui permettent de limiter les effets du gel (tours antigel, bougies…), et certains producteurs ont pu protéger leurs vergers, relativise Ludovic Tournant. Il n’y a pas eu de catastrophe comme certaines années, exceptée de façon localisée. La plupart des vergers essaient d’avoir un système pour limiter la casse.” À noter également quelques épisodes de grêle dans l’Avesnois et dans les Flandres.
La floraison a été très précoce. “On a battu des records, avec facilement deux semaines d’avance, souligne Ludovic Tournant. C’est une avance qu’on a conservée, dans un contexte chaud et sec. Cela laissait présager une belle pollinisation, mais il y a eu un impact physiologique important, entraînant une chute naturelle des fruits les plus jeunes pour garantir la survie des arbres.”
Certains ravageurs, en raison de la précocité de la saison et de la sécheresse, sont un peu restés sur leur faim. C’est notamment le cas de l’hoplocampe du pommier. Deux autres insectes avaient en revanche anticipé la situation : le puceron cendré et le carpocapse (ver de la pomme). “Ils sont sortis relativement tôt, le puceron cendré de manière importante, certains arboriculteurs ayant même eu un moment de panique, se souvient le responsable, qui est aussi en charge du Bulletin de santé du végétal (BSV) arboriculture. Cela a été plus impactant que d’habitude.” Quant au carpocapse, s’il est sorti relativement tôt aussi, une grande partie des vergers est équipée en système de “confusion sexuelle”, ce qui permet de résister efficacement.
En raison de l’absence d’eau, la tavelure (maladie fongique) est restée discrète malgré quelques périodes de contamination. L’oïdium a davantage été observé, surtout en début de saison.
Découvrez, en cliquant ci-dessous, les deux variétés phares des Hauts-de-France :
De nombreuses pommes ont en revanche souffert de “coups de soleil” ainsi que de la sécheresse. “Même dans la région, le recours a l’irrigation devient important, souligne Ludovic Tournant. Les producteurs se posent tous la question aujourd’hui.”
À noter que dans la métropole lilloise, les vergers sont confrontés à un problème spécifique : les perruches. “Il y a eu des dégâts phénoménaux, avec des groupes d’arbres totalement pillés, très tôt dans la saison, souligne René Stievenard, responsable du verger conservatoire du Centre régional de ressources génétiques (CRRG). C’est récurrent depuis une dizaine d’années mais cette année, c’est phénoménal. Et ça commence à s’étendre vers le sud de la région lilloise. C’est un fléau, une catastrophe! On sera sans doute obligés de mettre des filets ou d’effaroucher, on est au stade de la réflexion. »
Gel, coups de chaud, ravageurs… L’équipement pour faire face aux aléas climatiques deviendra-t-il un indispensable ? “On sort de quelques années qui ont été difficiles en termes de production, donc pour l’équipement, c’est un peu compliqué au niveau des trésoreries qui ont été touchées, le but étant déjà de se remettre à flot, souligne Ludovic Tournant. Mais l’équipement est nécessaire pour limiter les effets de ces aléas. Les filets paragrêle, l’irrigation, le système antigel…”
Alors pour soutenir la filière – et rendre hommage à notre Chichi national près d’un an après sa disparition–, mangez des pommes… des Hauts-de-France !
Laura Béheulière