Les annonces faites par le Premier ministre Gabriel Attal le 1er février, accompagné de Bruno Le Maire (ministre de l’Économie), Christophe Béchu (ministre de la Transition écologique) et Marc Fesneau (ministre de l’Agriculture) ont conduit à la levée des barrages. Certains se disent satisfaits mais vigilants, pour d’autres le compte n’y est toujours pas. On a fait le point avec les intéressés.
L’annonce. Le Premier ministre a annoncé débloquer une enveloppe de 150 millions d’euros en soutien fiscal et social aux éleveurs. « Un travail avec la filière permettra d’en préciser les modalités », a ajouté Gabriel Attal. Cette enveloppe est en fait un renforcement d’un dispositif préexistant. Sa mise en œuvre est prévue dès 2024.
Ce qu’ils en disent. « La mariée est belle, mais on ne sait pas ce que le mariage va donner, comme on dit, lâche François Moreau, président de la section laitière de la FDSEA du Nord, c’est encore flou, on attend les directives maintenant ! » Il souhaite dorénavant savoir comment cette somme va être répartie, « j’espère qu’il y en aura pour le bio car c’est une filière qui est actuellement en grande détresse. Chaque éleveur doit pouvoir vivre de son métier comme tout le monde, et aujourd’hui, ce n’est pas le cas. » Et d’ajouter : « Nous, ce que nous voulons surtout c’est que la loi Egalim soit respectée. »
Le président de la section laitière a d’ailleurs participé à une action menée contre Lactalis ce lundi 5 février (lire aussi en page 17) : « À titre d’exemple, Lactalis se moque des producteurs de lait. Aujourd’hui le coût de revient d’un litre de lait est de 44 centimes, Lactalis nous l’achète 40 centimes… Ce groupe a une interprétation erronée de la loi Egalim ! »
Dès aujourd’hui, soit jeudi 1er février 2024, un guichet unique disponible sur Chorus pro, a été ouvert pour que les agriculteurs puissent demander le remboursement partiel de la taxe sur le Gazole non routier (GNR) ainsi que l’avance de 50 % sur le remboursement du GNR annoncé par le Premier ministre vendredi dernier. Le paiement sera effectué sous deux semaines, a indiqué le ministre de l’Économie Bruno Le Maire. Par ailleurs, Bruno Le Maire a promis que cette « ristourne fiscale » serait appliquée dès l’achat à partir du mois de juillet 2024, et non plus a posteriori, sur présentation d’un justificatif.
Sur le volet de la concurrence déloyale, Gabriel Attal a annoncé vouloir interdire l’importation en France de fruits et légumes traités à la thiaclopride. Cette molécule, de la famille des néonicotinoïdes (NNI), reconnue comme un perturbateur endocrinien et reprotoxique, est interdite en Europe depuis 2020 mais autorisées sur d’autres continents. Pour empêcher l’importation de ces fruits et légumes, le gouvernement utilisera le dispositif de « clause de sauvegarde ». Pour le Premier ministre, cette mesure constitue un exemple de « clause miroir ».
L’annonce. En parlant de produits phytosanitaires, le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau a annoncé mettre en pause le plan Écophyto, vraisemblablement au moins jusqu’à la fin du mois de février. Pour le moment, la date de mise en œuvre de ce plan, fixée au 30 juin prochain par le tribunal administratif de Paris, est inchangée.
L’objectif d’une réduction de 50 % de l’usage des pesticides en France d’ici 2030 par rapport à la période 2015-2017, n’a pas non plus été évoqué par le ministre. Cette pause doit permettre de « retravailler un certain nombre d’aspects (du plan), de le simplifier ». C’est notamment la question des indicateurs qui doit être rediscutée, le Nodu qui mesure l’usage des molécules par les exploitants, étant contesté par des organisations agricoles.
Il est aussi question de redéfinir le zonage. Gabriel Attal a également affiché sa volonté d’empêcher qu’une « agence sanitaire » (l’Anses pour ne pas la nommer) ne puisse interdire une molécule de produit sanitaire en France alors qu’elle n’est pas interdite dans l’Union européenne.
Ce qu’ils en disent. « Ça ne va clairement pas dans le bon sens », estime Olivier Devillers. Installé à Gouzeaucourt (59), l’administrateur à Bio en Hauts-de-France voit dans ce renoncement la traduction « soit la démagogie, soit la folie » du gouvernement. Celui qui a travaillé dans le réseau Dephy sait l’efficacité relative d’un plan, « qui visait une réduction de moitié des phytos pour 2018, puis 2025, puis 2030 » sans jamais y parvenir. Il pense qu’il a toutefois « le mérite d’exister et d’afficher des objectifs ».
La mise en pause du plan écophyto c’est un peu comme le soutien à la filière bio : « Pas à la hauteur de l’enjeu », tacle Olivier Devillers qui rappelle que « 50 millions d’euros ont été annoncés pour aider la filière bio, en grave crise depuis deux ans. Mais si vous rapportez cette aide aux 60 000 fermes bio sur le territoire, ça fait 800 euros chacun ! » La nécessaire aide d’urgence pour 2024 serait chiffrée à 271 millions d’euros.
L’administrateur répondait à l’appel de la Fédération nationale de l’agriculture biologique (FNAB) à un grand rassemblement mercredi 7 février à Paris, devant l’Assemblée nationale, pour rappeler que toute la profession ne se satisfait pas des annonces gouvernementales, loin de là. « Je ne comprends toujours pas comment ceux qui sont descendus dans la rue pour un meilleur revenu ont pu se contenter de propositions qui n’y répondent à aucun moment ».
Le gouvernement a acté le relèvement des seuils d’exonération sur les successions agricoles, afin d’encourager les jeunes générations à poursuivre l’activité. Cette mesure devra passer par une loi, qui devrait être soumise au vote « dès 2024 ». C’est surtout au niveau des plus-values sur les transmissions d’entreprises individuelles que le changement est important. Aujourd’hui fixées à 500 000 euros pour une exonération totale et jusqu’à 1 million d’euros pour une exonération partielle, les seuils seront relevés respectivement à 700 000 euros et 1,2 million d’euros, lorsque l’entreprise sera reprise par « un jeune agriculteur » a précisé Bruno Le Maire (lire aussi en page 27).
En ce qui concerne les retraites, le régime d’exonération des plus-values sera lui aussi réévalué, notamment dans les situations « de cessions qui se réalisent sur longue période ». Enfin, le ministre de l’Agriculture a annoncé une hausse du budget consacré à l’accompagnement à l’installation, qui passera de 13 à 20 millions d’euros.
L’annonce. Le Premier ministre a annoncé vouloir inscrire dans la loi l’objectif de souveraineté alimentaire, mais aussi inscrire cet objectif dans le code rural comme intérêt fondamental. Pour assurer cette souveraineté et leur revenu, les agriculteurs pointaient du doigt le présumé non-respect de la loi Egalim par les distributeurs et les industriels. Face à cela, le ministre de l’Économie a indiqué mettre en place une mission d’évaluation qui devrait associer « l’ensemble des parties prenantes » et aboutir sur un rapport d’ici le printemps 2024.
Il a également promis un doublement des contrôles pour faire respecter la loi dans « toutes les plus grandes chaînes de supermarchés ». Des contrôles devraient même avoir lieu dans les prochains jours. Le ministre a même affirmé qu’« aucun contrat entre distributeurs et industriels n’échappera au contrôle de la répression des fraudes ». Les sanctions prévues peuvent aller jusqu’à 2 % du chiffre d’affaires. Bruno Le Maire a aussi annoncé 10 000 contrôles sur l’origine française des produits. Cette fois, les sanctions pourront aller jusqu’à 10 % du chiffre d’affaires. Le gouvernement souhaiterait également un système d’étiquetage plus clair, notamment pour le miel. Il voudrait que sur les pots de miel issu de mélanges, l’origine de tous les miels utilisés soit indiquée, ainsi que le pourcentage de ces miels.
Ce qu’ils en disent. David Meurillon, secrétaire général de la FDSEA du Nord et agriculteur à Verlinghem, reste prudent et « demande à voir quand on parle de « grandes sanctions » envers ceux qui ne jouent pas le jeu. » Pour lui, les annonces ne sont « pas encore satisfaisantes » et certaines grandes surfaces « évitent les contrôles en ayant leurs centrales d’achat à l’étranger. » « La profession voudrait que les grandes surfaces affichent le prix acheté au producteur pour une question de transparence », ajoute-t-il. Le secrétaire général apprécie toutefois l’attention portée sur « la francisation », « l’utilisation du made in France » : « il y a un travail à faire sur l’étiquetage : tout est fait aujourd’hui pour tromper le consommateur. » Le syndicat attend la prochaine échéance, fixée au salon de l’agriculture.
L’annonce. Le gouvernement a indiqué inscrire le secteur agricole dans les « secteurs en tension ». « Cette inscription permet un octroi plus rapide et facile de visa de travail pour les personnes étrangères. Or, on sait que dans le secteur des fruits et légumes notamment, il est très difficile de trouver de la main-d’œuvre. »
Ce qu’ils en disent. « Cette inscription est une bonne chose pour le secteur. Cela fait longtemps que nous avons des problèmes de recrutement de main-d’œuvre, et d’autant plus depuis la crise du covid, indique Nadège Durimel, directrice du groupement d’employeurs agricoles GE-GEIQ 3A. De plus, la facilitation de l’obtention de visa de travail est là aussi bienvenue. Actuellement, nous avons parfois des personnes étrangères motivées et qualifiées mais dont l’obtention d’un visa est difficile. De manière plus générale, si le maître mot de ces mesures est la simplification, nous espérons que cela ira jusqu’aux démarches de recrutement. » Et de conclure : « Nous espérons aussi que cette inscription renverra un message positif quant au secteur pour affirmer qu’il y a du travail en agriculture. »
Parmi les promesses, le Premier ministre souhaite une dérogation aux règles sur les prairies pour à la fois protéger les prairies essentielles aux paysages et à la lutte contre le changement climatique, tout en « sortant de situations totalement absurdes où des agriculteurs sont obligés de réinstaller des prairies alors même qu’ils ont arrêté leur activité d’élevage ». Gabriel Attal, pour qui la viande de synthèse ne « correspond pas à notre conception de l’alimentation à la française », a indiqué demander une définition et une législation claire au niveau européen sur la dénomination de ce produit.
Sur le volet étranger, le gouvernement a réaffirmé que la France n’acceptera pas l’accord de libre-échange en préparation entre l’Union Européenne et le Mercosur (zone de libre-échange qui regroupe plusieurs pays de l’Amérique du Sud).
Le Premier ministre a également fait mention de la situation autour de l’importation des céréales ukrainiennes. Depuis le début de la guerre, les droits de douane ont été supprimés. Gabriel Attal aimerait qu’une possible limitation de ces importations soit abordée dans une négociation européenne.
Eglantine Puel Et La Rédaction
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