Corneille est une appli éducative qui aide les enfants pendant leur apprentissage de la lecture. Le principe : plus tu lis, plus tu apprends à lire. Elle a été lancée en 2021 par Marianne Joly et Ana Maria Megelea,
Mais tout commence en 2018 quand Ana Maria Megelea, 41 ans aujourd’hui, roumaine d’origine, doit aider sa fille à apprendre à lire. Problème, si Ana Maria sait lire et parler français, elle n’a pas appris à lire en français.
Elle cherche donc des outils pour l’épauler et n’en trouve pas. « Elle m’en a donc parlé et assez vite l’idée de l’application est arrivée », raconte Marianne Joly, 42 ans actuellement. Après plusieurs années de travail, l’application est officiellement lancée en 2021 et depuis, 130 000 familles l’ont téléchargée.
« On a pensé à un outil numérique car toutes les deux nous avons vécu à l’étranger et on a pu constater, notamment dans les pays anglo-saxons, que le domaine de l’EdTech (comprenez éducation + technologie, ndlr) y était beaucoup plus développé qu’en France, se souvient Marianne Joly. En 2018, l’EdTech était en train d’émerger doucement en France. Parallèlement, le marché du livre d’apprentissage à la lecture était, lui, saturé. On s’est dit qu’il y avait une place à prendre. »
Par ailleurs, « on ne va pas se mentir, tout le monde a un écran aujourd’hui et quand on lit les études sur ce que regardent les enfants sur les écrans, ça fait peur. On est parti du postulat que le problème n’est pas l’écran en soi, mais ce que les parents ont à montrer à leurs enfants. Il y avait donc un enjeu à donner du contenu éducatif aux parents. Autant qu’ils s’en servent pour apprendre des choses ! »
L’idée est simple : plus on lit, mieux on apprend à lire. « Il faut donc multiplier les occasions de lire. L’application ne va pas remplacer les cours à l’école mais venir comme un entraînement complémentaire à la maison. »
Mais pour ce faire, les deux mères décident de se faire entourer de professionnels. « On a été incubé à Plaine images, à Roubaix, où nous avons pu co-construire l’appli avec une orthophoniste, des enseignants, des spécialistes du jeu vidéo pour enfant… Mais aussi par Séverine Casalis, chercheuse au Scalab (université de Lille) et spécialiste de l’apprentissage de la lecture, ainsi que par Isabelle Dumontaux, graphiste spécialisée dans la jeunesse. À part cette dernière, tout le monde est du Nord ! »
Résultat : une appli personnalisable et adaptée aux enfants de 3 à 8 ans. « On utilise un algorithme adaptatif. C’est-à-dire qu’en fonction de l’âge de l’enfant puis de sa progression, les exercices s’adaptent. Ainsi, il n’y a jamais d’échec. Si l’enfant est en difficulté sur un exercice, l’application va finir par lui suggérer la réponse et lui reproposera l’exercice dans les prochaines sessions jusqu’à ce qu’il ne fasse plus l’erreur. Mais il n’est jamais bloqué dans sa progression, ce qui évite la frustration. Et bien sûr, quand il réussit, il gagne des récompenses », détaille Marianne Joly.
Par ailleurs, le graphisme et le son ont été étudiés pour éviter une « sur-stimulation de l’enfant. Par ailleurs, au bout de 20 minutes, le petit avatar du jeu s’endort, ce qui indique à l’enfant que 20 minutes se sont écoulées et qu’il peut lâcher l’écran. »
L’application a ainsi reçu le label Édu-up de l’Éducation nationale.
Concrètement, l’application peut accueillir jusqu’à quatre profils (soit quatre enfants). Pour chaque profil, on peut rentrer le prénom, l’âge et la classe (à titre indicatif).
Quand l’enfant va sur son profil, il peut choisir d’aller dans son parcours personnel, pour faire des jeux d’apprentissage ; dans son terrier, pour voir ses récompenses et les utiliser (modifier son avatar par exemple) et enfin il peut aller dans la bibliothèque numérique où il accède à des livres d’apprentissage, classés selon des niveaux. (voir aperçu plus bas)
L’application est également adaptée aux enfants ayant des troubles de l’apprentissage types dyslexie ou dyspraxie, notamment la bibliothèque, grâce à l’inclusion du système Mobidys, spécialiste de la lecture adaptée aux « DYS ».
Ces livres sont d’ailleurs disponibles au format papier sur la boutique de Corneille afin « que l’enfant puisse jongler d’un support à l’autre. Et puis, on préfère qu’il s’endorme avec un livre qu’avec une tablette ! »
L’application a une version gratuite, limitée, et une version payante de 6,90 € par mois ou 69,90 € par an.
Nouveauté de cette année, Corneille a développé des licences pour les écoles, avec des exercices adaptés. « Nous serons présents dans 400 classes du Val-d’Oise et de l’Aisne », se réjouit Marianne Joly.
Corneille va également travailler dès cette rentrée avec le Scalab pour plancher sur la question du vocabulaire. « On est parti pour trois ans de recherche. Le postulat de base est qu’un enfant qui a un stock de vocabulaire faible aura plus de difficulté à apprendre à lire. L’idée est donc de développer des outils au sein de l’application, permettant de développer le vocabulaire. »
Autre évolution : l’adaptation de l’appli aux adultes en situation d’illettrisme ou d’analphabétisme. « On va avoir un gros travail de changement du contenu et du graphisme pour que cela soit adapté à des adultes », détaille la quarantenaire.
« C’est une demande qu’on a eue dès les débuts de Corneille. Il y a une vraie demande ! Environ 7 % des adultes français sont en situation d’illettrisme et ce pourcentage peut même monter à 11 % dans certaines régions. C’est un handicap invisible car les personnes illettrées développent tout un tas de stratagèmes d’adaptation mais il y a un besoin, notamment dans les entreprises car ce sont des personnes qui, par conséquent, ne peuvent pas monter en compétence, ce qui est vraiment dommage ! » Le duo espère que cette version de l’application sera disponible début 2024.
Eglantine Puel
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