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19-03-2025

Géopolitique : Le casse-tête de l’Union européenne

D’un côté le président des États-Unis annonce vouloir mettre en place des droits de douane exorbitants sur les produits agricoles importés, de l’autre la guerre en Ukraine, au centre : une Union européenne qui tangue et prend des décisions que seul le futur jugera.

Les annonces du président américain pourraient avoir des répercussions significatives sur les économies européennes. © Abode Stock

Il y a trois ans débutait la guerre en Ukraine. Déjà, ce conflit déclaré par la Russie avait mis à mal la stabilité agricole de l’Union européenne, via l’import de blé ukrainien. Mais comme un problème n’arrive jamais seul, depuis sa prise de pouvoir, le président des États-Unis Donald Trump enchaîne les annonces, plus ou moins inquiétantes. Parmi elles, la possible instauration d’une taxe de 25 % sur certains produits importés aux États-Unis pourrait avoir des répercussions significatives sur les économies européennes.

Face à cela, l’Union européenne, via la Commission et le Parlement, esquisse des solutions. Décryptage avec Éric Taisne, responsable développement chez Junia et spécialiste de la politique agricole européenne.

Quel a été l’impact de l’annonce de Donald Trump quant à des droits de douane élevés sur les produits agricoles européens ?

Dans les couloirs de Bruxelles, là où des députés européens étaient farouchement opposés à la signature d’un accord avec le Mercosur, certains y réfléchissent aujourd’hui différemment. Il semble inéluctable que cet accord va être signé désormais pour pallier les possibles effets négatifs de la politique de Trump.

Pour le lait ou encore le vin, effectivement cet accord permettra de pallier en partie la perte du marché états-unien. En revanche, pour le marché de la viande bovine, de la volaille ou encore du sucre cela ne change rien, pour moi, cela va forcément bouleverser le marché européen et pas en bien pour les agriculteurs…

Et ce même si la Commission assure que, par exemple, la viande bovine importée du Mercosur représente un burger par an et par Européen… La Commission assure également qu’un fonds dédié à pallier les éventuelles pertes est prévu. Si on prend un peu de hauteur, on peut dire que c’est un (gros) mal pour un bien. Le plus probable est que l’accord avec le Mercosur soit divisé en plusieurs « sous accords » et mis en place progressivement.

De manière plus globale, quelles sont les répercussions de la situation géopolitique mondiale sur la politique agricole de l’Union européenne ?

L’UE prépare déjà la PAC 2027 et la logique veut que le budget qui lui est dédié, qui représente aujourd’hui 33 % du budget de l’UE, soit en baisse. Ce n’est effectivement par l’arrivée de Donald Trump en soi qui a cet effet mais une conjonction de plusieurs paramètres comme le début du remboursement du prêt fait après le covid pour le plan de relance européen, la situation en Ukraine, etc.

Cette baisse de budget s’accompagne d’un changement de vision aussi puisque dans sa première ébauche de projet, Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission, ne mentionne pas le Green deal, sous-entendant que ce qui a été mis en place le restera mais que le Green deal ne sera pas renforcé, au profit d’une agriculture plus productive. Ce changement de vision est également une réaction aux mobilisations qui ont pu avoir lieu l’an passé en Europe. Tout l’enjeu sera de trouver désormais une articulation entre les différentes agricultures… En tout cas, c’est un message politique de sa part qui est celui de trouver un consensus pour faire bouger les choses.

Y a-t-il des questionnements sur le modèle de la PAC dans son ensemble ?

Actuellement, il y a une réflexion sur la conservation de la PAC telle qu’elle est, c’est-à-dire un montant réparti par l’Union européenne aux agriculteurs européens ; et un modèle où l’argent serait « rendu » aux États membres. La France est plutôt partisane de la première option car pour elle, redonner l’argent aux États, c’est la porte ouverte à une perte de contrôle et à un renforcement des distorsions de politiques agricoles entre les États membres. La question est aussi pour moi de voir comment la PAC peut évoluer pour accompagner de manière plus « pointue » certains modèles agricoles. Mais politiquement, cela implique un classement qui repose sur un jugement de valeur.

Cela fait longtemps que vous travaillez dans le monde agricole. Aviez-vous déjà vécu une situation géopolitique pareille ?

De cette complexité, jamais. En fait, on ajoute des couches de complexité sur des couches de complexité. Prédire l’avenir est quasiment impossible.

Propos recueillis par Eglantine Puel

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Agriculture États-unis Hauts-de-France nord Pas-de-Calais union européenne

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