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02-07-2025

Tour de France : Il est passé par ici…

Pour la cinquième fois de son existence, le départ du Tour de France sera donné dans le Nord. L’occasion de revenir sur les petites histoires régionales de la Grande boucle avec Francis Taquet, spécialiste du Tour de France dans les Hauts-de-France.

Francis Taquet est un fan de cyclisme et du Tour de France. L’un de ces fans qui lorsqu’il se met à parler de sa passion a les yeux qui pétillent et parvient à emmener tout son auditoire. Une passion qui a débuté alors qu’il était enfant : « J’habitais à Jolimetz, dans l’Avesnois. Tous les soirs, au moment du Tour de France, avec mes frères, on regardait le résumé de l’étape du jour à la télévision, en noir et blanc à l’époque. Et une fois par an, on avait la possibilité de voir les coureurs en couleurs. Ils passaient par la Chaussée Brunehaut qui longe la forêt Mormal, à 400 mètres de la maison. Là, on guettait l’arrivée du peloton avec l’espoir d’apercevoir Raymond Poulidor qui était notre idole », se souvient-il, le sourire aux lèvres.

Francis Taquet s’est penché sur toutes les étapes du Tour de France passées dans notre région et en a fait trois livres.

Cet ancien conseiller pédagogique en éducation physique a collectionné les revues de cyclisme comme Le Miroir du cyclisme, « une revue qui ne paraît plus depuis 1994 mais qui vient de ressortir un numéro », se réjouit le fan qui s’est évidemment procuré le numéro en question. Francis Taquet a un attachement particulier pour ce magazine car c’est en tombant sur une photo de la Grand-Place de Lille un jour de passage du Tour de France parue dans l’un de ses numéros qu’il a eu l’idée de retracer toutes les étapes du Tour dans la région. Un projet auquel il s’est attelé une fois la retraite venue, en 2015. Il a travaillé dessus durant huit ans et Les étapes du Tour dans les Hauts-de-France est sorti en trois tomes*.

Alors que la 112e édition partira de la capitale des Flandres ce samedi 5 juillet et que les trois premières étapes de la course se dérouleront sur nos terres, Francis Taquet a accepté de nous partager sept anecdotes du passage de la Grande boucle dans la région.

Francis Taquet est l’auteur de la trilogie Les étapes du Tour dans les Hauts-de-France.

1/ 1909 : les coureurs passent par le Grand Boulevard encore en construction

Le Grand boulevard, qui relie Lille, Roubaix et Tourcoing, est encore en construction en 1909. Une route, que l’on surnomme aussi les « Champs Élysées » de la métropole, qui a son importance puisqu’il est considéré comme l’un des axes fondateurs de la métropole lilloise. S’il est toujours en travaux au moment du passage du Tour de France au mois de juillet 1909, « il a été ouvert, à titre exceptionnel, pour les coureurs. La demande avait été faite par Alfred Damez, correspondant local de L’auto (journal à l’origine de la création du Tour de France, ndlr), auprès des autorités compétentes. La Préfecture et l’administration des ponts et chaussées avaient alors accédé à cette requête, rapporte Francis Taquet ? Et une fois la course terminée, les travaux ont repris. » Le Grand boulevard n’ouvrira au commun des mortels qu’au mois de décembre suivant.

2/ 1910 : Les coureurs limités à 12 km/h dans Lille

Cette année-là, le Tour passe par Lille. « Mais le maire a fait des siennes », sourit Francis Taquet. L’édile a en effet décidé de prendre un arrêté municipal visant à limiter la vitesse des cyclistes du Tour à 12 km/h. L’auteur pense que cette décision est liée aux incidents qui se sont produits l’année précédente lors du passage de la Grande boucle.

Pendant plusieurs années, les routes n’étaient pas coupées à la circulation lors du passage des coureurs provoquant un certain nombre d’incidents.

En effet, Francis Taquet a retrouvé des coupures de presse de 1909 qui déploraient « un service d’ordre insuffisant voire inexistant ». Le Réveil du Nord parle même de négligence et de « J’m’en fichisme » de la part de la municipalité. Il faut dire qu’à l’époque, les routes du tracé n’étaient pas barrées, les coureurs devaient ainsi slalomer entre les voitures, les piétons ou encore les tramways… « Il faut se rappeler que les premières années de la compétition, on ne donnait pas de priorité à la course cycliste par rapport au déroulement de la vie quotidienne », souligne Francis Taquet.

3/ 1919 : Le premier maillot jaune de l’histoire perd sa place à Raismes

1919 marque l’apparition du maillot jaune dans le Tour de France. C’est le Français Eugène Christophe qui le portera pour la première fois. Mais celui-ci le perdra sur les pavés de Raismes. « Nous sommes juste après la fin de la Première Guerre Mondiale et les routes sont en mauvais état. Eugène Christophe va casser sa fourche et contrairement à aujourd’hui, le règlement impose aux coureurs d’effectuer eux-mêmes leurs réparations. Une situation qu’il avait déjà connue six ans auparavant dans les Pyrénées. Par chance, l’incident se produit près d’une usine de cycles. Mais cela lui prendra 70 minutes et il perdra sa place de leader. Mais le cycliste reçoit tout de même un accueil triomphal à l’arrivée », relate Francis Taquet.

4/ 1967 : Les pavés de l’Enfer du Nord recouverts de bitume

Le 3 juillet 1967, les coureurs disputent la 3e étape du Tour entre Amiens et Roubaix. La course reprend de nombreux secteurs pavés du Paris-Roubaix. « Une bonne nouvelle pour le Néerlandais Jan Janssen qui a remporté l’Enfer du nord quelques semaines auparavant », détaille Francis Taquet. Mais surprise, cette année-là, une grande partie des secteurs pavés se trouvant entre Mons-en-Pévèle et Gruson avaient été recouverts par du bitume. « Ce qui a rendu la course beaucoup moins ardue pour l’ensemble des coureurs », poursuit l’auteur Des étapes du Tour dans les Hauts-de-France.

5/ 1982 : L’étape Orchies – Fontaine-au-Pire annulée, une première pour le Tour

La 5e étape du Tour de France 1982, un contre-la-montre par équipes, devait rallier Orchies et Fontaine-au-Pire. Mais les cyclistes seront bloqués à Denain par une centaine d’ouvriers d’Usinor qui vivent au même moment une crise sociale. Les organisateurs avaient pourtant anticipé ce problème en négociant avec les dirigeants syndicaux que la course emprunterait une route longeant l’usine permettant aux ouvriers de manifester de manière visible sans perturber l’étape. Mais la veille de l’étape, le directeur d’Usinor a annoncé la fermeture du site pour 1984 et la suppression de 1 141 postes. Des manifestations éclatent alors et les organisateurs décident d’annuler l’étape, pour la première fois de l’histoire du Tour de France.

6/ 1983 : Le Tour passe (enfin) par Fontaine-au-Pire

La petite commune du Cambrésis s’était battue pour accueillir le Tour de France sur ses terres. « Jean-Marie Lemaire, le maire de l’époque, avait pour habitude d’organiser de grands événements sur sa commune. Il avait accueilli un spectacle avec le célèbre cascadeur Jean Sunny, un gala de catch avec l’illustre René Ben Chemoul ou encore une corrida sur le terrain de football. Alors pourquoi pas le Tour de France ! », explique Francis Taquet. « Je suis parti à Paris […] j’ai été reçu par Albert Bouvet (directeur-adjoint du Tour de France, ndlr). […] Il me montrait tout ce qu’il fallait faire en me faisant comprendre que ça n’était pas possible chez nous », explique l’élu dans le tome 2 du livre de Francis Taquet.

Mais pas de quoi décourager Jean-Marie Lemaire qui, à force d’obstination (et de quelques aménagements au sein de sa commune), a réussi à obtenir l’arrivée du Tour de France chez lui. Malheureusement, il s’agissait de la 5e étape de l’édition de 1982… qui a été annulée en cours de route (lire un peu plus haut). Énorme déception pour Jean-Marie Lemaire et tous ses concitoyens qui s’étaient mobilisés des mois durant pour faire de ce jour une grande fête. Les organisateurs promettent de faire passer le Tour par Fontaine-au-Pire, l’année suivante et la promesse est tenue !

7/ 2018 : Le Tour de France s’adapte à la Coupe du monde de foot

Le 15 juillet 2018, alors que les organisateurs du Tour avaient initialement prévu un départ depuis Compiègne, ils vont finalement porter leur choix sur la ville d’Arras. En cause ? La finale de la Coupe du monde de football doit avoir lieu le même jour à 17 h, heure à laquelle le peloton franchit habituellement la ligne d’arrivée. « L’étape a donc été raccourcie afin que les cyclistes arrivent plus tôt à Roubaix et que le Tour de France ne subisse pas la concurrence de la compétition de foot », rapporte Francis Taquet avant de conclure : « Et les organisateurs ont eu du flair puisque cette année-là la finale de la Coupe du monde du ballon rond opposait la Croatie à la France ! »  

Francis Taquet est l’auteur de trois livres : Les étapes du Tour dans les Hauts-de-France 1906 à 1938, Les étapes du Tour dans les Hauts-de-France 1947 à 1977, Les étapes du tour dans les Hauts-de-France 1978 à 2022 aux éditions Nord Avril.

Hélène Graffeuille 

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