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Du pis au pot, il n’y a qu’un pas… qu’ont décidé de sauter Simon Meura et Aude Schaefer. Futur installé à Féron (59), dans l’Avesnois, ce jeune couple d’éleveurs en herbe – dans tous les sens du terme – vient de lancer un financement participatif pour récolter 80 000 €. Pas une paille, certes. Mais leur appel ne vise pas le don : il revêtira la forme d’un prêt rémunéré à 2 %. “Vous pouvez investir de 50 à 2 000 €, que nous vous rembourserons sur 5 ans avec un taux d’intérêt de 2 % sur le capital restant dû”, expliquent-ils sur la page Facebook de leur future exploitation : la Ferme du Piopot.
“Du pis au pot”, c’est leur objectif. Via une production de lait bio d’abord, de yaourts et crèmes dessert en vente directe par la suite. Le tout avec 60 vaches laitières, 30 veaux de renouvellement, et 51 ha de prairies menées en pâturage tournant dynamique. Une technique que Simon Meura, “fils, petit fils, frère, neveu et cousin d’éleveur laitier”, a découverte lors d’un séjour d’un an en Nouvelle-Zélande, entre mars 2011 et mars 2012. Il se retrouve dans une ferme laitière de 1 250 vaches “kiwi”, croisement de la Frisonne et de la Jersiaise, qui pâturent 365 jours par an.
“Ici souvent, quand on agrandit son troupeau, on arrête l’herbe, compare-t-il. Là-bas, même avec 3 000 vaches on reste en tout herbe. Les animaux sont plus petits, plus rustiques. On synchronise la production laitière avec la pousse de l’herbe. Les éleveurs néo-zélandais n’ont pas de subventions, alors ils essaient de réduire au maximum les coûts de production…”
Pour poursuivre sa réflexion, il crée le groupe Facebook Pâturages et prairies, discussion et échange (12 000 membres aujourd’hui), et y trouve de l’eau pour alimenter le moulin de ses idées. Entretemps, son frère reprend la ferme familiale. Simon Meura travaille avec lui quelques années, mais l’envie de s’installer grandit. En novembre 2018, il rencontre Éric et Annick Chébaut, alors en bilan de carrière avec la MSA. Le courant passe tout de suite.
À écouter également : [Podcast] Trouver le repreneur de son exploitation sur le web, ou la transmission 2.0
Un bonheur n’arrivant jamais seul, sa route croise par un heureux hasard celle d’Aude Schaefer, venue prêter main-forte à sa sœur éleveuse. De fil en aiguille, la jeune lilloise architecte d’intérieur et maman solo de deux petits garçons, prend part au projet, et c’est désormais en tant qu’associés et parents d’un petit Félix, né début octobre, qu’ils s’installeront en février prochain.
Parallèlement à la conversion au bio qui ne prendra que six mois (les cédants n’ayant pas mis d’engrais chimiques ou de produits phytosanitaires durant les trois dernières années) les premiers chantiers au programme sont : la réfection de la salle de traite, la construction de chemins de pâturage, la pose de nouvelles clôtures, ainsi que l’installation d’un réseau d’eau et d’abreuvoirs.
“Il y aura 39 paddocks fixes pour les vaches, et 12 ha de pâturage en couloir pour les génisses, précise Aude Schaefer. Toutes les semaines, l’herbe sera mesurée pour y répartir le troupeau en fonction de la pousse.”
“Il s’agit d’avoir le bon nombre de bêtes par rapport au potentiel de la pâture, renchérit son compagnon. C’est toute la spécificité du pâturage tournant dynamique : il faut gérer un flux, pas un stock.”
“C’est toute la spécificité du pâturage tournant dynamique : il faut gérer un flux, pas un stock.”
Simon Meura, futur éleveur
Le couple a foi en son système, notamment pour affronter la sécheresse, cauchemar des derniers étés. “On peut limiter le nombre de vaches, et avoir deux périodes de vêlage : les deux tiers au printemps, pour valoriser l’herbe, et un tiers en septembre. Cela permet d’avoir pas mal de vaches taries l’été, qui auront moins besoin d’herbe que pendant leur lactation. Cela permet aussi de faire du lait l’hiver, ce qui est nécessaire pour la transformation à la ferme.”
Mais le troupeau n’est pas le seul paramètre qui compte. “Le pâturage tournant permet d’avoir des pâtures plus résistantes, avec plus de réserves racinaires. L’agroforesterie permet aussi de créer un microclimat par diminution des amplitudes thermiques.” Bio, circuit-court, agroécologie… Le Piopot est décidément dans l’air du temps.
Lucie De Gusseme