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Cela fait quelques années que la tendance est en marche dans l’enseignement agricole post bac : une érosion lente des parcours 100 % “scolaires” au profit des parcours par apprentissage. Dans certaines filières, c’est plus flagrant que dans d’autres. Comme en BTS Génie des équipements agricoles (GDEA) enseigné à l’Institut Saint-Éloi de Bapaume (62).
“Avant, les étudiants en BTS GDEA en cursus scolaire étaient les plus nombreux, observe Pascale Rollier, responsable pédagogique de l’établissement. Mais ces dernières années, l’apprentissage prend de l’ampleur. Avec une petite vingtaine d’élèves en apprentissage et une bonne vingtaine en scolaire, nous arrivons cette année à l’équilibre. Ce serait bien de le garder.”
Qu’il soit effectué en scolaire ou en apprentissage, le BTS GDEA offre les mêmes débouchés : technicien ou commercial chez un concessionnaire ou chez un constructeur de matériel agricole. ” Et on n’a jamais assez de candidats par rapport aux débouchés existants ! “, assure Pascale Rollier.
C’est plutôt sur le long terme que les carrières divergent. Contrairement aux apprentis, les étudiants en parcours scolaire alternent cours, stages et visites. Une bonne façon de mûrir son projet et de regarder le paysage avant de choisir son cap.
“Le parcours scolaire est plus incertain, résume Hervé Gustin, professeur de machinisme. Car il faut plus d’énergie pour trouver du travail qu’en sortant d’un apprentissage où on a déjà une expérience sur le CV. Mais à long terme, il peut s’avérer plus prometteur.”
Notamment grâce aux langues vivantes, enseignées plus en profondeur en parcours scolaire qu’en apprentissage, et au réseau professionnel de l’établissement qui peut profiter aux élèves.
Le parcours de Thibaud Lefebvre, ancien élève en formation 100 % scolaire, est éloquent. Il intervient régulièrement auprès des élèves du BTS GDEA de l’Institut Saint-Éloi.
“Mon père travaillait dans une entreprise agricole, j’ai toujours voulu conduire des engins agricoles…, se souvient l’actuel chef de produit moissonneuse-batteuse chez Claas. J’ai eu mon BTS en juin 2013. J’ai ensuite intégré l’école Tecomah, dans les Yvelines (aujourd’hui Léa-CFI, ndlr) pour une licence professionnelle afin d’avoir une approche plus commerciale.”
C’est là que ses acquis de BTS entrent en jeu. “En 2012, alors étudiant en BTS, j’avais effectué un stage chez le constructeur Claas, en Moselle. Ça a été ma porte d’entrée dans l’entreprise. J’y ai effectué ma licence en alternance sur leur site de production à Metz. J’ai ensuite renouvelé mon contrat d’apprentissage chez eux pour poursuivre mon cursus à l’école d’ingénieurs Agrosup Dijon. J’en suis ressorti avec un Master management technique et économique des agroéquipements.”
Dès septembre 2016, il profite de ses contacts chez Claas pour prendre le large : il part six mois dans l’atelier d’un concessionnaire de la marque en… Nouvelle-Zélande. Préparation du matériel, chargement de containers… “Le but était notamment de mettre en pratique ce que j’avais vu en BTS, et d’acquérir une consolidation technique. Ça m’a permis de toucher aux machines dont j’ai la responsabilité actuellement.”
Quant à l’allemand : “J’ai pris des cours en master, où la deuxième langue était obligatoire. J’ai un vocabulaire technique, mais je suis incapable de m’exprimer. J’ai donc privilégié un anglais très technique et précis.”
Après la Nouvelle-Zélande, le jeune globe-trotter ne s’arrête pas là. Il profite d’être dans l’hémisphère sud pour se rendre en Asie et y passer quatre mois. Il rentre en France, mais repart illico. Destination : États-Unis. “Pour trois mois de démonstrations itinérantes. Nous sommes allées de la Californie à l’Oregon avec une presse et un tracteur de la marque. En revenant, je suis reparti en Nouvelle-Zélande pour une dizaine de mois.”
En revenant en France en 2018, on lui propose son poste actuel à Ymeray, en Eure-et-Loir. Aujourd’hui résident à Béthune, Thibaud Lefebvre, qu’on voit souvent dans les vidéos de présentations des machines sur la chaîne Youtube de Claas France, alterne entre présentiel et télétravail et “ne se voit pas quitter sa région”.
En tout cas, pour ce jeune chef de produit moissonneuse-batteuse, une chose est sûre : sa connaissance de l’anglais technique a été un grand atout. “Pour pouvoir travailler dans les fonctions supports, avoir un champ lexical technique et approfondi anglais est extrêmement important. On ne m’aurait pas proposé mon poste actuel si je n’étais pas parti à l’étranger. L’anglais me sert pour les réunions, ainsi que tous les jours à l’écrit. Et puis, en termes d’expérience, un an à l’étranger ça vaut trois ans ici !”
Lucie De Gusseme