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Cloé Facq a toujours baigné dans le milieu agricole. Son père travaillait dans une entreprise de travaux agricoles. « Il était chauffeur et faisait également l’entretien des machines », raconte-t-elle. Ses jobs d’été, elle les a aussi faits dans ce milieu : « L’été, j’ai travaillé, notamment, dans l’expérimentation de produits phytosanitaires à la Fredon (Fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles, ndlr) en tant que saisonnière. J’ai aussi été employée dans un centre de conditionnement de pommes de terre et j’ai également fait du maraîchage », énumère-t-elle. Des expériences qui ont conforté son envie de travailler dans le monde agricole.
Après son bac, elle se dirige alors vers un BTS GDEA (génie des équipements agricoles). « J’aimais bien les machines et il y avait pas mal de débouchés en termes d’emploi dans cette branche. Je me voyais bien faire du commerce mais je ne voulais pas me lancer là-dedans sans connaître les machines. Pour moi, il était important de passer par les ateliers. »
À partir de ce moment, la jeune femme est entourée majoritairement de garçons : « J’étais la seule fille dans les cours techniques. » Une situation qui ne l’a jamais dérangée : « J’ai trouvé qu’il y avait même davantage de bienveillance à mon égard. Pour mes collègues, j’étais une femme et j’étais jeune, il était donc normal que je ne connaisse pas tout. Ils auraient été peut-être plus durs avec un garçon, on aurait peut-être considéré que, comme c’est un homme, il doit avoir un minimum de bases en mécanique. Si certains prennent cela pour de la discrimination, moi j’ai préféré y voir le bon côté des choses en me disant que les gens acceptaient que je puisse faire des erreurs », avance Cloé Facq.
Et d’ajouter : « C’est important de parler des droits des femmes, mais il faut faire aussi attention à ne pas tomber dans des extrêmes où la moindre parole peut être considérée comme sexiste alors que ce n’est pas le cas. »
Après son BTS, la jeune femme poursuit ses études en s’inscrivant à un certificat de qualification professionnel) en maintenance des matériels agricoles au lycée d’enseignement agricole privé de Savy-Berlette (62). « Un diplôme purement technique avec au programme de l’hydraulique, de l’électricité, de la transmission… », détaille-t-elle. Elle a terminé ses études en décrochant une licence professionnelle Maintenance et technologies, systèmes pluritechniques : agroéquipements (Ageq). Les moteurs des machines agricoles n’ont désormais plus de secrets pour la jeune femme.
À l’issue de sa formation, en septembre 2019, on lui propose de devenir formatrice au sein du lycée de Savy-Berlette, un poste qu’elle accepte : « Lorsque j’étais petite, j’hésitais entre être professeur des écoles et conduire des tracteurs. Finalement ce métier est un beau mélange des deux, même si je ne conduis pas les tracteurs, je les répare ! », sourit Cloé Facq.
Si dans l’équipe enseignante, il y a d’autres femmes, elle est la seule à donner des cours dans les ateliers. Des cours qu’elle dispense face à une (très) grande majorité de garçons. Et elle s’y sent parfaitement à l’aise : « Il y a certainement des misogynes, autant que dans les autres milieux. J’ai parfois entendu quelques blagues graveleuses, mais cela reste très épisodique », concède-t-elle. Pour autant, elle n’a jamais eu de remarque sur le fait qu’elle soit une femme. « Bien sûr, certains sont taquins, mais cela reste toujours gentil, on se charrie. Mais il n’y a jamais rien eu de méchant ou de déplacé. » Et d’ajouter : « La seule barrière qui peut exister est finalement celle qu’on se met dans la tête, sourit-elle. Au début de ma carrière, j’hésitais à venir en robe et talons lorsque je donnais des cours théoriques. Un jour, j’ai sauté le pas, je l’ai fait et finalement, il ne s’est rien passé, je n’ai eu aucune remarque. On peut être féminine et travailler dans un milieu d’hommes ! »
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Si Cloé Facq constate que de plus en plus de femmes conduisent des tracteurs, elles sont moins nombreuses à franchir les portes des ateliers. « Mais ce n’est pas parce qu’on a choisi des hommes à la place des femmes, c’est parce qu’il n’y a pas de femmes qui ont postulé », insiste-t-elle. Et d’ajouter : « Pourtant, aujourd’hui, on ne peut plus dire que c’est un métier de gros bras. Il y a beaucoup d’outils pour nous aider à porter les choses lourdes. Et puis, lorsqu’on sait qu’on ne va pas arriver à porter quelque chose, on fait autrement ou on demande de l’aide ! Ce sont des métiers tout à fait accessibles aux femmes, cependant j’ai l’impression qu’ils ne les attirent pas ! »
Pour Cloé Facq, l’important est surtout de faire un métier qui plaît. « Si une femme souhaite travailler dans la mécanique, je n’ai qu’un conseil à lui donner, c’est de foncer. Car selon moi, ce qui est primordial, c’est de faire ce qu’on aime dans la vie et ne pas vouloir absolument rentrer dans des cases ! Même une jeune fille timide ou réservée est capable de travailler dans ce milieu. Nous avons les mêmes capacités qu’un homme pour travailler dans cette branche et nous pouvons être aussi compétentes qu’eux ! »
Septembre 2015. Entrée en BTS GDEA (génie des équipements agricoles) en apprentissage à Bapaume (62).
Septembre 2017. Inscription au CQP (certificat de qualification professionnelle) maintenance des matériels agricoles au Leap de Savy-Berlette (62).
Septembre 2019. Embauche en tant que formatrice technique à l’UFA de Savy-Berlette.
Hélène Graffeuille
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