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Les mauvaises herbes ne sont traditionnellement pas appréciées par la plupart des personnes. Pourtant à Mont-Bernanchon (62), chez Pascale et Philippe Blairy, celles-ci sont laissées à leur libre arbitre et poussent où elles veulent dans leur jardin de 6 300 m2.
C’est par hasard qu’ils se sont installés il y a 12 ans dans cette commune. Originaires de Lens où ils avaient un terrain de 1 000 m2, ils ont décidé de s’agrandir encore plus. Mais les « terrains avec une grande surface sont difficiles à trouver dans la région », se désole la propriétaire des lieux. Et c’est à Mont-Bernanchon, dans le Béthunois, qu’ils l’ont trouvé.
« Mont-Bernanchon est une zone ornithologique, explique Pascale Blairy. Il y a beaucoup d’oiseaux migrateurs tout au long de l’année. » À leur arrivée, la parcelle avait déjà quelques mauvaises herbes. « Il y avait cinq types de mauvaises herbes maintenant il y en a plus de 500 », sourit Philippe Blairy. Le couple a ainsi fait perdurer les plantes présentes dans le jardin et a continué dans cet esprit en créant l’Oasis des mauvaises herbes. Le but du jardin « est de se réapproprier les mauvaises herbes, ça sert pour soigner les rhumes ou les rhumatismes par exemple », explique Pascale Blairy. Ancienne étudiante de l’école des plantes de Bailleul, elle « ne connaissait pas les richesses des plantes sauvages à (son) arrivée ». C’est avec sur internet et dans des livres sur les plantes qu’elle s’est renseignée sur celles qui ornent son jardin.
« Quand on commence à mettre un nom sur les plantes, ça ne ressemble plus à un fouillis », sourit Pascale Blairy. Ce « fouillis », comme elle l’appelle, c’est un espace composé d’un verger, d’une mare avec un potager, d’une pâture et d’une forêt comestible. Arbres, mauvaises herbes, plantes, insectes et animaux se mêlent pour créer une biodiversité nécessaire au jardin.
Ces mauvaises herbes ont d’autres bienfaits que de participer à la biodiversité. Elles peuvent être également de bons compléments alimentaires, avoir des vertus anti-inflammatoires, être utilisées pour améliorer la digestion, contrer les maux du corps… Attention toutefois, Pascale Blairy met en garde, « il faut connaître les critères de reconnaissance quand on veut consommer des plantes ». Les « mauvaises » herbes peuvent parfois ressembler à des bonnes plantes mais l’une peut être curative quand l’autre est toxique.
C’est pour cela que Pascale Blairy réalise des visites du jardin, explique les critères de reconnaissance des plantes ainsi que leurs vertus. La pimprenelle aurait par exemple un goût de concombre, avec lequel Pascale fait du « tzatziki sans concombre ». Cette mauvaise herbe serait bonne pour contrer les hémorragies comme l’indique d’ailleurs son nom latin Sanguisorba minor qui vient de sang et absorber.
« La nature c’est la curiosité, on se demande pourquoi la plante est là, appuie Philippe Blairy. Il faut penser au ré-ensauvagement ». Sur la parcelle, très peu d’allées sont dessinées. Les humains ne sont pas les seuls à qui le jardin est destiné, « on ne pense pas seulement à nous, mais aussi aux insectes », éclaire Pascale Blairy. Des papillons, des guêpes, des coccinelles, des abeilles, le jardin est rempli de petites bestioles. Les orties de la famille des Urticacées, sont notamment l’habitat des papillons.
Cette mauvaise herbe est cependant aussi bonne pour l’humain puisqu’elle contient 40 % de protéines à sec.
L’espace vert accueille aussi des animaux tels que des canards, des oies, des faisans, des oiseaux comme des hirondelles, qui adorent se nicher dans la toiture, et les propriétaires ont aussi une ânesse. « On a une cour fermée et sous la toiture quand on est arrivé, il y avait un nid d’hirondelles. Maintenant on en a quatre, c’est l’autoroute des hirondelles », plaisante Pascale Blairy.
« Chaque plante a une ou plusieurs utilisations, il faut juste les connaître. » La propriétaire, qui s’est consacrée à plein temps à son jardin, donne des ateliers cuisines, prépare des infusions, des sirops et réalise même des sels aromatiques. La prochaine étape de l’Oasis des mauvaises herbes est de continuer la forêt comestible commencée il y a plusieurs années. Des vignes ont d’ores et déjà été installées avec comme support les plantes du jardin. Les plantes permettent notamment de ne pas utiliser de produits chimiques. En effet, le jardin qui est souvent visité par des enfants et des centres aérés n’utilise « aucun intrant chimique. C’est aussi une des conditions pour être dans l’association Jardins passions. »
Membre depuis le printemps 2021 de cette association, les gérants « ne pensaient pas que le jardin l’intéresserait, il n’y avait pas vraiment de jardin de notre style », souligne Philippe Blairy. Il n’est pas comme ceux que l’on visite habituellement, c’est « une oasis car chaque plante sauvage a sa place, on ne va pas faucher la plante, elle vient se réfugier ici, d’où le nom d’Oasis des mauvaises herbes », décrit Pascale Blairy. Et même si parmi les 35 jardins que compte l’association, seul le leur est un jardin de mauvaises herbes, Pascale Blairy ne se renfrogne pas puisque « quand on rentre dans un jardin, on rentre dans un univers. »
Célia Bouriez
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