Quand il décroche la médaille d’or aux Championnats du monde d’athlétisme à Budapest en août 2023, Hugues Fabrice Zango ne devient pas seulement champion du monde du triple saut. Il entre dans l’histoire comme étant le premier Burkinabé à remporter un titre mondial dans un sport olympique. Une consécration pour cet homme au parcours extraordinaire, passionné de sport, d’ingénierie électrique et soucieux de mettre sa réussite au service des autres.
Né en 1993 à Koudougou, dans la région centre-ouest du Burkina Faso, Hugues Fabrice Zango grandit dans une famille modeste où l’école est une valeur cardinale. « Mes parents ne juraient que par l’école. C’était la seule voie de succès pour eux, et donc pour moi aussi », explique-t-il. Curieux de tout, travailleur acharné, il se forge très tôt une discipline : « J’ai toujours aimé découvrir de nouvelles choses. J’ai toujours été premier de classe et major de promotion. » L’exigence est quotidienne, alimentée par une soif de compréhension du monde et un sens aigu de la responsabilité.
Un souvenir d’enfance, en apparence anodin, détermine sa vocation : dans les villages voisins du sien, il découvre que certains villageois n’ont pas accès à l’électricité. « Je leur ai demandé pourquoi. Ils m’ont répondu : « Il faut être ingénieur. » Alors je me suis dit : « C’est ce que je veux faire ! » » Il s’oriente alors vers des études d’ingénierie, avec un objectif en tête : créer, construire, améliorer la vie des autres.
En parallèle il se passionne pour la pratique du sport. En classe de première, il participe à une compétition inter-lycées à Ouagadougou. « Dans ma tête, j’étais forcément le meilleur au sprint, c’était une évidence. Pourtant j’ai fini 4e. J’étais choqué ! » Pour « laver (s) on honneur », il décide de s’essayer au triple saut. Surprise : il excelle dans cette discipline. Un coach national le repère rapidement. Ce sera le point de départ d’un parcours fulgurant.
Grâce à une bourse d’État, il commence sa formation en sciences de l’ingénieur à l’université de Ouagadougou. Il rêve de travailler dans l’industrie lourde, les réseaux électriques, l’électrotechnique. Mais les débouchés au Burkina Faso ne sont pas à la hauteur de ses ambitions. Une fois sa licence obtenue, il entreprend seul une démarche audacieuse : envoyer des lettres de motivation à une centaine d’universités à travers le monde. Il met de l’argent de côté, prospecte, espère.
C’est l’IUT de Béthune, dans le nord de la France, qui lui ouvre ses portes. « Béthune a cru en moi et m’a donné ma chance. Ils ont même accepté que je vienne avant la rentrée pour préparer les Jeux de Rio. Ils m’ont payé le billet d’avion : c’était inespéré. » Une fois installé, son niveau sportif explose. Il s’impose comme une figure montante du triple saut mondial, tout en poursuivant ses études jusqu’au doctorat en génie électrique.
Sa carrière prend une autre dimension à partir de 2019. Il remporte la médaille de bronze aux Championnats du monde à Doha, puis signe en 2021 le record du monde en salle avec un bond de 18,07 m. Cette même année, il devient le premier athlète burkinabé médaillé olympique en décrochant le bronze aux Jeux de Tokyo. Deux ans plus tard, il triomphe à Budapest avec un saut à 17,64 m, devenant champion du monde. Son pays entier vibre à travers ses performances. Hugues Fabrice Zango n’est plus un athlète prometteur : il est une icône.
Mais derrière les médailles, il y a une conscience. En tant que parrain de l’ONG Élevages Sans Frontières, il s’engage à soutenir des projets d’élevage destinés aux femmes seules et aux jeunes dans plusieurs pays d’Afrique. En 2024, il repart même sur le terrain au Burkina Faso. Ce retour aux sources est un choc. « J’avais oublié leur réalité. Je pensais qu’on était au plus bas financièrement quand j’étais jeune. Mais j’étais loin de la réalité. Moi je n’ai jamais manqué d’eau ou de nourriture. »
Il découvre des familles en grande précarité, mais surtout des femmes éleveuses d’une force admirable. « Ce sont des personnes dignes, avec un esprit de solidarité très fort. » L’association, présente dans cinq pays (Burkina Faso, Maroc, Togo, Bénin, Zambie), a déjà soutenu plus de 20 000 familles en vingt-trois ans. Et l’aide ne se limite pas à la fourniture d’animaux d’élevage : elle comprend aussi des formations et un accompagnement technique. « Le mot-clé de l’ONG Élevages sans frontières, c’est l’autonomie. On veut renforcer les capacités des éleveuses locales à faire face à leurs difficultés. »
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En mettant son image au service de cette ONG, Hugues Fabrice Zango entend défendre des valeurs de solidarité et de persévérance. « Lorsqu’on naît au Burkina Faso, il faut être au-dessus de la pile pour s’en sortir. Sinon c’est compliqué. » Cette conviction l’accompagne depuis l’enfance. Et à quelques mois des prochains Championnats du monde à Tokyo, qui auront lieu du 13 au 21 septembre, il garde le cap : celui de l’effort, du dépassement de soi mais aussi du partage.
Julien Caron
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