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Pour les tartines du petit-déjeuner, pour le sandwich du midi. En baguette ou en miche. Blanc ou complet. Le pain sous toutes ses formes est de tous les repas et de toutes les occasions. Dorénavant, il envahit même… nos apéritifs ! Substituer du pain à une partie des céréales traditionnellement utilisées dans la préparation de la bière, c’est l’idée un peu folle qu’a eue Martin Marescaux, étudiant de 22 ans devenu entrepreneur.
« On partait avec l’idée de faire une bière qui ait un impact. Martin, à travers son idée, a vu l’occasion d’en avoir un. » Pascal Marescaux, le paternel, rapporte la genèse du projet de son fils, auquel il s’est joint. « Il a toujours baigné dans une éducation où la protection de l’environnement était importante. Sans être un extrémiste de l’écologie, poursuit-il rigolard, j’ai toujours considéré que si on est à même de faire quelque chose à notre échelle, on se doit de le faire. On lui a inculqué ça. »
Le contexte familial était donc propice. Ne manquait plus qu’un déclencheur. Pour l’un de ses anniversaires, le jeune homme se voit offrir une bière à l’étiquette personnalisée. Séduit par le concept, il décide de monter son propre site de bouteilles customisables, drawyourbeer.com. Un premier pas, déjà, dans l’entreprenariat… et le monde brassicole ! Satisfait, mais pas rassasié, le jeune homme veut aller plus loin. Et lier à son activité son engagement écologique.
Le pain est l’un des aliments de base les plus consommés au monde. Il est aussi l’un des plus gaspillés. Invendus, morceaux découpés par avance dans les restaurants pour ne finalement pas êtres consommés. S’il y a mille et une occasions de manger une bonne baguette, il y en a autant d’en gaspiller une partie.
En France, 38 % du pain produit n’est pas consommé par l’Homme selon l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie). Soit 4,3 kilos par personne et par an. Sachant que la production d’une baguette de 250 grammes nécessite la consommation en eau équivalant à une baignoire remplie et engendre la même pollution qu’un parcours de 2,3 km effectué en voiture…
Ajoutez à cela le fait que, jadis, les céréales utilisées dans la préparation de la bière étaient celles qui servaient à la confection du pain, et il n’en faut pas plus à Martin Marescaux pour que l’idée fasse tilt. Joindre l’utile à l’agréable, l’apéro à l’écolo : tel est le défi qu’il se lance.
Le concept est simple : on remplace une partie du malt, jusqu’à 40 %, par du pain récupéré ici où là. Restaurants, boulangeries, mais aussi particuliers, chacun est convié à devenir ce que Martin et Pascal appellent « un gaspilleur responsable ».
« C’est gagnant-gagnant, explique Pascal. On débarrasse les restaurateurs et les artisans de leur surplus de pain pour en faire quelque chose d’utile, et en échange, ils distribuent la Pain de minuit dans leurs établissements. » Quelque 21 partenaires lillois se sont déjà associés à la démarche. Parmi lesquels le Bierbuik, Croque François ou encore Pain Quotidien.
Les particuliers peuvent également mettre la main à la pâte. « C’est aussi ça l’esprit de la Pain de minuit. Un projet participatif. Chacun peut apporter sa contribution », confirme Pascal. Pour ce faire, il est d’abord nécessaire de s’inscrire en ligne pour devenir gaspilleur responsable. À la suite de quoi, un sac de collecte nominatif est fourni. Il s’agira de le remplir avec du pain sec, pour ensuite le déposer, en période de brassage, dans l’un des points de collecte partenaires.
Attention, tous les types de pain ne sont pas aptes à rentrer dans la composition du breuvage. Seuls les blancs, gris, de campagne ou en baguette sont autorisés. Ce qui exclut notamment le pain de mie, la brioche, les pains spéciaux (aux fruits, aux lardons…) ou encore le pain à l’huile d’olive.
À noter que seuls 50 particuliers par secteur sont choisis pour devenir des gaspilleurs responsables, le brassage ne permettant la réutilisation que d’un volume limité de pain sec.
Une fois le pain récolté, reste encore à réaliser la principale étape : le brassage. Si le pain n’est pour l’instant récolté qu’à Lille, c’est en Belgique qu’il va contribuer à la production de la boisson. Dans la brasserie Gulden Spoor de Wevelgem pour être précis. « Tout est réalisé sur place, raconte Pascal Marescaux. Le brassage et la mise en bouteille. »
Très tôt dans le processus, le pain entre en jeu. Dès sa première étape en réalité. L’empâtage consiste à tremper et remuer le malt et le pain sec afin d’en extraire l’amidon. Chaque brassin est nécessairement unique.
« On n’aura jamais systématiquement la même bière d’un brassin à l’autre, explique Pascal, puisque d’une récolte à l’autre, on n’aura pas la même proportion des différents types de pain, et donc la même composition finale. »
L’objectif recherché n’est, de toute façon, pas une uniformisation du produit. « On est une brasserie artisanale, et cette variable confère à nos bières un caractère unique, une personnalité. » Et un goût différent ?
« Ah ça, il faut y goûter pour le savoir », se marre Pascal.
Clément Peyron