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Quand il ne travaille pas le bois de ses mains, Franck Couturier enjambe le chêne ancestral des bacôves. Une fois en place sur ces barques traditionnelles du marais audomarois, le temps d’une promenade sur les eaux, ce menuisier se transforme en guide touristique. “Ce que je préfère le plus, au-delà même du bateau, c’est d’être complètement immergé dans le marais“, confie le batelier.
Chapeau vissé sur la tête, regard appuyé au loin et main sur le levier du moteur, ce passionné de 40 ans connaît le marais comme sa poche. “J’y habite depuis l’âge mes 13 ans et j’y vis toujours“, raconte-t-il. Comme d’autres maisons traditionnelles, situées dans cette réserve classée par l’Unesco en 2013, celle de Franck Couturier n’est accessible que par voie d’eau. Une véritable chance pour l’Audomarois : “Quand je me lève tous les matins, je me dis que j’habite dans un endroit magnifique. J’adore observer les foulques et les grives. Je ne m’en lasserai jamais !“
Alors tous les week-ends, pour se plonger un peu plus au coeur des 160 km de canaux navigables, il “file un petit coup de main” à Vincent Colin, son ami, pour quelques visites touristiques. Dernier fabricant de bacôves, son acolyte tient une entreprise, Les faiseurs de bateaux à Saint-Omer (62). Rénovation, construction, visites guidées, ils sont les derniers héritiers de ce savoir-faire ancestral.
Si les barques sont remises sur pieds et choyées pour continuer à transporter les touristes, elles servaient aux XIXe et XXe siècles à faire transiter la marchandise. Et pas n’importe laquelle : la spécialité de Saint-Omer, le chou-fleur. “C’était le camion du marais !”, s’amuse Franck. Sur presque 10 mètres de long pour 2 mètres de large, le “camion” transportait également les animaux d’élevage, comme les bœufs. C’était d’ailleurs par ce biais que le tirant d’air, c’est-à-dire la hauteur entre les ponts et l’eau, était calculé.
Depuis, les bateaux ont bien changé, même s’ils ont gardé tout leur charme. “À l’origine, ils avaient deux pointes : une à l’avant, une à l’arrière. Mais avec l’installation de moteurs dans les années 50 pour remplacer les perches, il n’en reste désormais plus qu’une seule“, explique Franck Couturier. Pas de quoi décourager le batelier qui navigue depuis 20 ans maintenant sur les eaux audomaroises.
Laurène Fertin