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C’est une institution à Mons-en-Pévèle (59). Le long de la rue du moulin, la famille Waast fabrique de la farine depuis 1896. Éloïse Waast y a presque grandi, bercée par le ronronnement des machines sans lequel elle peinait à trouver le sommeil. « Ma grand-mère m’endormait en m’emmenant au moulin, se souvient-elle. Le bruit sourd et lisse du moulin est apaisant. »
À 24 ans, elle achève ses études et souhaite prendre la relève, « pas tout de suite, dans cinq ans environ ». Elle deviendra la sixième génération de meuniers de la famille.
Celle qui se dit « la mauvaise élève au lycée par excellence », a eu une révélation à l’université en y trouvant davantage d’indépendance. Une licence d’économie-gestion en poche, elle poursuit en master en management de l’innovation puis en management stratégique. « Je ne voulais pas me spécialiser mais avoir des notions dans de nombreux domaines en gardant le côté stratégique de l’entreprise », explique-t-elle. Car l’idée est présente depuis un certain temps déjà, celle de reprendre le flambeau.
Elle connaît tous les process de l’entreprise, se sent capable de remplacer chaque poste, a appris à porter des sacs de 25 kg de farine. Mais avant, « c’est encore important d’aller voir ce qui se passe ailleurs, de mûrir, insiste-t-elle, et puis cela me permettra d’apporter quelque chose : dans une entreprise familiale, la première génération crée, les suivantes doivent consolider. »
De ses stages et apprentissages, Éloïse Waast a déjà ramené quelques petites idées au moulin. « Je prends du recul, je vois le fonctionnement en place ailleurs. » Elle « visualise tous les flux du moulin et les points bloquants, cerne de plus en plus de choses » depuis le quartier de la Défense à Paris, où elle accumule « expérience et maturité. »
Éloïse a très vite acquis aisance et confiance en elle. « Mon grand-père m’emmenait en rendez-vous avec des clients directeurs d’usine. J’ai vite été impliquée dans le moulin et confrontée aux regards des autres. » Émile Waast, à presque 89 ans, est encore sur tous les fronts. Il traverse l’entreprise, une pile de dossiers sous le bras, des projets en tête, rassuré et fier de voir les jeunes – comme sa petite-fille – s’impliquer.
« La curiosité de mon grand-père lui a permis d’être précurseur et de développer l’entreprise. Aller voir ce qui se fait ailleurs, tester, c’est valorisé dans la famille », observe Éloïse Waast. « J’ai hérité de la curiosité de mon grand-père », ajoute-t-elle.
Entièrement reconstruit après la guerre, le moulin a vu ses meules de pierre remplacées par des cylindres. De nouveaux bâtiments sont sortis de terre, le dernier datant de 2015. Quelques centaines d’années avant la famille Waast, c’est l’abbaye Saint Vaast d’Arras – les noms n’ont aucun rapport – qui a érigé le moulin à vent au XIe siècle, tout en haut de la colline dominant la campagne.
Quasiment toutes les céréales sont moulues : blé, orge, maïs, sarrasin, avoine, etc. Parfois, quelques queues de cerises, marc de pommes, chicorées sont aussi broyés, diffusant de nouveaux arômes. « L’odeur que je préfère est la chicorée », confie Éloïse Waast.
L’entreprise travaille principalement avec des organismes collecteurs mais quelques agriculteurs livrent également leurs céréales en direct, le moulin ayant aussi la casquette de collecteur. « La force du moulin est d’être capable de faire des produits techniques et des produits de niche », souligne Éloïse Waast.
« Tous les maillons de la filière pain sont présents sur le territoire, poursuit-elle. L’idée est de valoriser le circuit court, de l’agriculteur au moulin, créer une chaîne de valeur entre tous les acteurs de la filière et garder le savoir-faire du territoire. » Impliquée dans le projet alimentaire territorial (PAT), Éloïse Waast est intarissable sur la problématique de l’alimentation, « comment nourrir le monde, sans gaspiller », en valorisant qualité et proximité. « La qualité est notre priorité », affirme-t-elle, citant les normes en vigueur – notamment Iso 22 000, agriculture biologique… Deux nouvelles machines – pour le conditionnement et un trieur optique – seront prochainement acquises, dont une machine pour broyer des céréales achetées en petites quantités aux agriculteurs. L’objectif ? « pouvoir garantir la meilleure qualité avec des céréales en sortie de champs. »
Aujourd’hui, Émile, Emmanuel et Michel Waast, respectivement grand-père, oncle et père d’Éloïse Waast, cogèrent l’entreprise qui compte une vingtaine de salariés. « Chaque génération Waast a donné un meunier amoureux du métier avec les qualités d’innovation, d’initiative et de gestion nécessaires », lit-on sur le site internet. Éloïse Waast sait ce qu’il lui reste à faire.
2013. À 16 ans, elle rejoint les Moulins Waast en tant que saisonnière et exerce les métiers de secrétaire, réceptionniste, vendeuse.
2015. Elle obtient son baccalauréat scientifique à l’Institut de Genech et commence ses études universitaires.
2022. Elle est diplômée d’un master spécialisé en marketing et data analyses.
2027. Elle compte rejoindre les Moulins Waast, à la suite de ses père, oncle et grand-père
Louise Tesse
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