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Chacun chez soi et les moutons (enfin les vaches) seront bien gardés. C’est en tout cas la philosophie de Rebecca Hernu et son conjoint. Mais, un autre dicton guide leur façon de travailler : seul on va plus vite, ensemble on va plus loin. Aussi, si chacun a son exploitation, ils mettent en commun leurs équipements, mais aussi leurs produits pour faire de la vente directe.
Un modèle un peu particulier, familial sans l’être. Le tout, au milieu des blockhaus.
Si l’on doit résumer le parcours de Rebecca Hernu, deux mots viennent à l’esprit : flair et opportunité.
Après un BTS en production agricole au lycée agricole de Radinghem (62), elle travaille au service de remplacement du Pas-de-Calais. Parallèlement, son père est installé en exploitation laitière avec une cinquantaine de vaches : l’EARL Hernu, à Hernicourt (62). Ce n’est qu’en 2004 qu’elle le rejoint.
En 2008, au décès de son père, elle reprend les rênes et prend en apprenti son filleul qui deviendra ensuite son salarié. Mais voilà, le jeune homme souhaiterait devenir son associé or, “il n’y avait, entre guillemets, pas assez de travail/recettes pour ça. Et puis l’opportunité de reprendre la porcherie est arrivée au bon moment, en 2016″.
En effet, pendant ses remplacements, Rebecca Hernu est passée par une porcherie. “Quand l’éleveur qui y était est parti à la retraite, il a pensé à moi pour reprendre. Géographiquement, ça le faisait car c’est à peine à 10 km d’ici et puis, pendant mes études j’avais aussi fait un contrat de spécialisation en porc… Ça coulait de source.” C’est ainsi que naît le Gaec des Blockhaus.
Si Rebecca Hernu a choisi ce nom, ce n’est pas par hasard mais parce que ses pâtures en sont peuplées. Elle utilise notamment une pâture à côté du célèbre blockhaus de Siracourt. Vestiges de l’histoire, ils servent aujourd’hui de lieu de stockage pour ses machines et “mes vaches y vont l’été quand elles veulent de l’ombre ou l’hiver quand il pleut“. Pas banal.
Dès la reprise de la porcherie, elle débute la vente en direct. “J’aime le contact avec les gens et puis il y avait une demande dans le voisinage.” Avant cela, 100 % de sa production de porcs partait chez Suidéal, soit ses 3 000 porcs annuels. Aujourd’hui, la majorité de sa production reste chez Suidéal mais une petite partie lui revient découpée pour qu’elle puisse ensuite la revendre. Concrètement, “un dimanche par mois, j’envoie environ six porcs à l’abattage aux établissements Fagoo, à Saint-Omer, où ils sont ensuite découpés et transformés en partie. Je dois ensuite aller les récupérer. J’envoie aussi environ six veaux gras par an.”
Elle gère en plus de cela 130 hectares de polycultures qui sont “autoconsommés par les élevages. Je revends juste un peu de betteraves sucrières et de lin textile”.
Entre-temps, elle rencontre son conjoint, Benoît Billon. Lui aussi agriculteur sur sa propre exploitation laitière, non loin de celle de Rebecca Hernu. Mais comme sa compagne, l’homme a du flair et reprend une autre exploitation laitière, à Monchy-Cayeux (62) où se trouve un atelier de transformation qui produit des yaourts.
L’idée devient alors évidente de faire vente commune, en partie toujours. “Lui a une boutique sur son exploitation, ce qui n’est pas mon cas. Donc, il vend ses yaourts de son côté mais j’en vends aussi avec ma viande. Contrairement à lui, je n’ai pas de boutique, c’est en projet. Je fonctionne sur commande. Avoir les yaourts, c’est un plus pour les clients !” Les consommateurs passent commande et viennent la récupérer à la ferme “un peu comme un drive !”
Pendant le covid, cette offre rencontre d’ailleurs un succès important : “On avait multiplié par deux les commandes ! Mais bon, c’est vite retombé… Entre l’achat des cartons pour les commandes, l’électricité et les allers-retours à Saint-Omer, j’ai dû augmenter un peu les prix. Mais les clients comprennent bien. C’est l’avantage aussi de la vente directe, ils me connaissent et on discute…”
Cette diversité des activités, pour Rebecca Hernu, “c’est une sécurité, pour moi et mon conjoint. On n’a pas tous nos œufs dans le même panier”.
Quant à la répartition du travail dans son couple, “chacun est autonome, a sa propre entité. Nous ne sommes pas associés mais on est intrinsèquement lié, professionnellement j’entends. On met notre matériel en commun également. Même si ce n’était pas mon conjoint, je le ferais car la mise en commun permet une rentabilité plus rapide, notamment dès qu’il s’agit d’investir dans une machine. Pour moi, c’est un modèle intéressant.”
Et, pour se dégager du temps afin de profiter de ses deux enfants, Rebecca Hernu envisage d’investir dans un robot de traite l’année prochaine.
Eglantine Puel
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