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« On a beaucoup de chance ! » Clément Seingier et son frère « Pierrot » profitent de la belle lumière du matin qui effleure le Haras de Beuvry à Sainghin-en-Mélantois (59). Alors que les chevaux paissent autour de cette sublime ferme au carré, les deux jeunes frangins, originaires du coin, savourent le plaisir d’aménager leur parcelle. Ici, des fruitiers ont déjà été plantés et un cours d’eau chemine entre les pâtures.
Si les nichoirs, les haies et les souches d’arbres champignonnières ont trouvé leur place, le plus gros, c’est-à-dire le tunnel et les semis de légumes, arriveront au printemps.
La chance des débutants ? Peut-être pas seulement… « Tout a commencé il y a quatre ou cinq ans, rappelle l’aîné. Pierre commençait à cultiver dans le jardin familial en permaculture. On a commencé à avoir des quantités de légumes dingues qu’on transformait. On a trouvé ça tellement génial de pouvoir recevoir les gens, de leur faire à manger chez nous sans avoir à aller faire les courses… Rapidement on s’est dit que ce serait incroyable de vivre de ça dans quelques années. »
BTS production végétale et diplôme d’ingénieur à l’Isa en poche pour l’un, bac pro cuisine et BTS arts culinaires et formation de pâtisserie, pour l’autre, Pierre et Clément profitent du confinement pour poser les jalons de leur projet de micro-ferme en permaculture bio.
« Pour une fois, on avait du temps », sourit Pierre. L’occasion pour les deux frères de s’attaquer à la partie la plus abrupte de la montagne : trouver du foncier. Une problématique bien présente dans l’esprit des deux futurs associés issus d’une famille d’agriculteurs.
« On a tenté le coup en envoyant des mails aux communes autour de chez nous, se souvient Clément, sans grande conviction. » Et pourtant, après six mois d’attente tout se débloque en une semaine entre Gruson et Sainghin-en-Mélantois. « Nous louons 1,5 hectare de parcelles aux municipalités et aux propriétaires du Harras de Beuvry. »
Dans une logique de permaculture, les deux frères ont déjà planté 80 fruitiers, 1 500 arbustes et 400 petits fruitiers sur leurs terrains. Une grande bâche a été installée pour préparer la terre. « On veut tendre vers un maraîchage sur sol vivant, là on est sur une terre assez argileuse, donc on ne peut pas, dès la première année, ne plus travailler le sol. Mais au fil des années, on va incorporer énormément de matière organique et travailler le sol avec de petits outils », explique le cadet qui a déjà expérimenté la production en permaculture au sein d’une entreprise qui proposait des paniers de légumes à ses salariés. Récupération du fumier de cheval, paillage, association de cultures, hôtels à insectes… Pierre a plus d’une idée dans la poche de son tablier.
À court terme, l’objectif des “Frères Côtes” – le nom de leur SCEA (société civile d’exploitation agricole) née en octobre – est d’ouvrir une Amap (Association pour le maintien de l’agriculture paysanne) afin de distribuer une trentaine de paniers bio aux adhérents du secteur. « Tomates, poivrons, aubergines, mais aussi petits fruits ou champignons… Nous pourrons nous lancer au moment où nous aurons au moins cinq variétés ! », expliquent les associés.
« L’idéal serait d’avoir du surplus, complète Clément, le cuistot. Car, nous souhaitons transformer une partie de la production et, pourquoi pas, vendre quelques produits aux restaurants du secteur. » Une valeur ajoutée non négligeable pour les deux associés qui envisagent d’embaucher prochainement un contrat en apprentissage.
Surmotivés, les deux frangins ont néanmoins besoin d’un coup de main pour démarrer la production. Une cagnotte a été lancée sur le site de financement participatif spécialisé Miimosa. « Le premier palier, fixé à 10 000 euros, nous permettra de nous équiper d’un tunnel de 1 000 m², détaille Pierre. Pour les tomates, les aubergines, poivrons… mais aussi toute la partie pépinière, car je compte bien être autonome en semences. »
Le deuxième palier, fixé à 20 000 euros, servirait pour un forage à 25 m de profondeur et enfin, le dernier (30 000 euros) offrirait aux associés la possibilité d’installer un système d’irrigation.
Avec un projet dans l’air du temps, un cadre et des looks photogéniques, les deux frères ont la cote sur les réseaux sociaux et comptent bien capitaliser dessus pour atteindre leur objectif. Réponse le 28 février.
Agathe Villemagne
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