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Accrétion, bassin sédimentaire, lithosphère, anatexie, interstratification… Trop compliquée, la géologie ? Les préjugés veulent qu’il faille s’armer de patience pour étudier – et comprendre surtout ! – les mots difficilement prononçables et les processus complexes qu’étudie cette science de la Terre. Que nenni !
Le Conservatoire d’espaces naturels des Hauts-de-France s’est lancé un défi : rendre la géologie accessible à tous. “Nous recevons régulièrement des appels d’enseignants et d’animateurs qui sont en peine pour expliquer la géologie de notre territoire à leurs élèves et leurs publics”, rapporte Gaëlle Guyetant, chargée de mission patrimoine géologie au sein du Conservatoire.
En 2022, grâce à un partenariat étroit avec la Dreal et la mobilisation du plan France Relance, le Conservatoire d’espaces naturels des Hauts-de-France a réuni une quinzaine de géologues pour créer la collection GéodéO : trois reconstitutions paléo-environnementales et six petits films d’animation.
Concernant les premières, il s’agit de reconstitutions de ce à quoi notre territoire pouvait ressembler il y a des millions d’années. “Nous en avions qui dataient des années 1990, elles n’étaient plus valables d’un point de vue scientifique et en plus très pixélisées”, explique Gaëlle Guyetant.
Géologues de l’université de Lille, du museum d’histoire naturelle, comme des amateurs, bénévoles locaux qui connaissent parfaitement le territoire, ont planché sur ces reconstitutions. De quoi générer “beaucoup de fierté” chez Gaëlle Guyetant, qui salue cette belle mobilisation de la communauté des géologues.
Une fois les connaissances scientifiques mises en commun, est entré en scène Nicolas Haverland, illustrateur inspiré originaire de Villeneuve-d’Ascq et fondateur de L’Atelier monde. Là où les scientifiques avaient parfois des idées “très scolaires et un peu préconçues” de ce qu’ils souhaitaient montrer – d’aveux de Gaëlle Guyetant, lui a fait le pari de l’humour : “Il existe beaucoup d’exemples drôles dans la nature, y compris dans les formations géologiques”, assure Nicolas Haverland.
Sa tâche : vulgariser l’information scientifique sans jamais la dénaturer, pour la rendre accessible au niveau de compréhension d’un élève en classe de cinquième. “Piquer la curiosité, ça passe aussi par un ton, alors pourquoi pas l’humour ? Le facteur très intéressant, avec l’humour, c’est qu’on retient la blague. Mais la blague, finalement, n’est que le support du fond pédagogique”, rappelle l’artiste.
Trois époques de notre histoire ont été illustrées : le Dévonien moyen, il y a 380 millions d’années, lorsque notre région se trouvait sous le tropique du Capricorne ; le Carbonifère supérieur, il y a 310 millions d’années, quand une forêt luxuriante, peuplée d’insectes géants et bordée par une chaîne de montagnes comparable à l’Himalaya, occupait notre territoire. Le Turonien, enfin, il y a 92 millions d’années, alors que la mer nous baignait et que des algues microscopiques accumulaient au fil des siècles des centaines de mètres de craie.
En parallèle, six films d’animation ont été développés autour de thèmes a priori techniques : la formation de la craie, du charbon… “On fait vivre des personnages de cartoon, c’est important pour un enfant, le personnage a un rôle de mascotte, il est sympathique. L’enfant est en confiance, sa famille aussi : c’est très intéressant de véhiculer un contenu scientifique avec cette proposition”, se réjouit Nicolas Haverland. Des fonds européens ont permis de traduire les films en anglais.
Ces outils peuvent être téléchargés en ligne sur le site du Conservatoire d’espaces naturels des Hauts-de-France et sont entièrement gratuits. Les retours des enseignants et des animateurs, très positifs, ont incité le Conservatoire à continuer sur sa lancée : d’ici la fin de l’année, cinq nouveaux films, quatre reconstitutions paléo-environnementales et une bande dessinée verront le jour. En 2024, le Conservatoire prévoit de diffuser deux films beaucoup plus longs que les premiers. “Et nous avons encore une dizaine de sujets de film en attente”, prévient Gaëlle Guyetant. On n’arrête pas la science !
Marion Lecas