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« J’existe ! » C’est ce que des dizaines de milliers de Français ont commencé à exprimer dans les mairies qui ont ouvert un « cahier de doléances et de propositions ». C’est ainsi que l’Association des maires ruraux de France (AMRF) analyse le succès rencontré par l’opération « mairie ouverte » qu’ils ont lancée le 8 décembre dernier. Les citoyens de quelque 5 000 communes rurales ont ainsi pu s’exprimer par mail ou directement en mairie.
En tout, 30 000 doléances ont été rassemblées et remises le 15 janvier aux parlementaires, au gouvernement, ainsi qu’au Président de la République. « Par cet acte citoyen, vos mairies, maisons communes, ont permis de consigner les expressions et d’en faire le germe d’un projet de société plus vivable pour ces 22 millions de Français, qui donnent corps à nos campagnes », avance l’AMRF dans la synthèse réalisée à partir des propositions collectées.
Il serait évidemment très compliqué ici de résumer l’ensemble des doléances et propositions collectées dans les communes rurales. Elles concernent aussi bien des aspects très concrets du quotidien des Français, comme la revalorisation du Smic ou le retour aux 90 km/h sur les routes secondaires, mais aussi des demandes plus larges comme une lutte plus efficace contre la fraude fiscale ou le développement des transports publics en milieu rural.
La défiance vis-à-vis des élus est aussi un aspect qui ressort beaucoup des contributions. Revient l’idée d’une déconnexion entre le peuple et ses dirigeants politiques. Sont ainsi évoquées : des « décisions venues d’en haut sans concertation » ; « Les élus doivent respecter le peuple » ; « La France n’est plus une démocratie » ; « Les citoyens ne sont pas dupes et ont besoin de respect de cette classe politique qui vit dans une bulle complètement déconnectée de la réalité », etc.
Au final, dix grands thèmes ressortent des contributions : la justice sociale (17,2 %), la justice fiscale (14,3 %), l’organisation politique et territoriale (14 %), l’aménagement, transports et mobilités (9,4 %), vie démocratique (8,7 %), la transition écologique et énergétique (8,4 %), l’emploi et l’économie (8,3 %), les sujets internationaux (5,4 %), les services de proximité (5,1 %) et enfin, le rôle de l’État dans les territoires (5,1 %). Derrière ces thèmes, deux fils rouges se dégagent : la ruralité et la commune.
Concernant la ruralité, les contributions déposées auprès des maires ruraux montrent « la volonté de donner à voir la ruralité face à un État central aveugle et déconnecté des réalités rurales ». Certains citoyens déplorent « une France coupée en deux, avec d’un côté la France qui gagne bien sa vie et habite les centres urbains, et de l’autre les laissés pour compte ».
En parallèle, de nombreuses propositions mettent en avant le potentiel de la ruralité : « Le mode de vie rural est porteur d’avenir pour attirer des entreprises et des habitants tout en satisfaisant aux exigences climatiques actuelles. » Des citoyens tiennent à rappeler le « potentiel économique des territoires ruraux », que ce soit sur des questions concernant l’agriculture avec les circuits-courts, la transition climatique et la préservation de l’environnement, le développement économique et culturel, etc.
Concernant la commune, l’expression citoyenne met en avant « l’importance de conserver la proximité entre les citoyens et la prise de décision politique ». Certains déplorent le « mépris du pouvoir central envers les territoires ».
Dans leur synthèse, les maires ruraux s’appuient sur les doléances pour défendre l’échelon communal, cher à leur coeur : « Plus de pouvoirs aux élus locaux », « La mairie doit être la maison du peuple », « Chaque territoire doit pouvoir prendre ses propres initiatives en fonction de ses spécificités et problématiques locales ». Les citoyens ruraux semblent en tout cas être attachés à cette notion de proximité et les critiques émises à l’égard des élus semblent plutôt épargner l’échelon communal.
Les remarques collectées font ressortir des critiques vis-à-vis de l’éloignement des lieux de décisions et de la complexité de l’organisation territoriale. Cela montre aussi la nécessité de rénover la démocratie. « La commune apparaît – par opposition – comme l’entité politique la plus proche du citoyen et la plus accessible; le premier échelon de la démocratie, qui nécessite d’être reconnu et considéré comme tel », résume l’AMRF.
Virginie Charpenet