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Que dire de la sécheresse actuelle ? Elle est très précoce. C’est surtout le sud est et le centre qui sont touchés. D’une manière générale, toutes les zones qui avaient déjà des problèmes d’accès à l’eau et de recharge des nappes phréatiques souffrent plus que d’habitude. Vosges, Alsace, Adour, Garonne, régions de Lille ou de Dunkerque… Le déficit de précipitations moyen en France est de 35 % depuis le début de l’année par rapport à 2021.
Ne s’attendait-on pas à une telle situation ? On savait que cela allait arriver, mais pas quand. L’eau est devenue totalement imprévisible, même si on a de grandes tendances. Cette sécheresse arrive un mois plus tôt que ce qu’on a l’habitude de vivre, au moment où les cultures de printemps et d’hiver poussent. Il y aura des impacts agricoles immédiats.
Qu’en est-il dans le Nord-Pas de Calais ? En termes d’eau, le Nord est une zone compliquée, notamment dans le delta de l’Aa, les wateringues et le triangle Lille-Douai-Lens qui connaissent des soucis d’approvisionnement à court terme. À tel point que Dunkerque est alimentée par une dorsale de l’eau, qui vient notamment d’Aulnoyes-Aymeries (59). À moyen terme, c’est aussi le Boulonnais, la Sambre, la vallée de la Sensée qui seront concernés. Si les interconnexions se font mal, il y a aura des problèmes d’accès à la ressource.
L’eau devient donc rare ? Elle est juste moins disponible. Les disparités vont s’accentuer. Les conclusions du modèle de prévision Drias 2020 de Météo France, montrent en gros qu’en termes de pluviométrie, la France sera coupée en trois morceaux : une partie au nord d’une ligne Rouen-Strasbourg où il pourrait pleuvoir plus à l’année, une partie au sud d’une ligne Bordeaux-Grenoble où il devrait pleuvoir moins voire beaucoup moins, et un morceau entre les deux, où la pluviométrie annuelle ne devrait pas changer. Cependant, si à l’échelle du pays la pluviométrie ne va pas changer, sa répartition oui ! Il pleuvra plus l’hiver et moins l’été…
Quel rayon d’action ? Il n’y a pas de solution unique. L’imperméabilisation des villes est une grande question. À Douai, la ville et l’association Adopta ont ouvert le béton pour le désimperméabiliser. La technique a été reprise partout en France, et en Europe. Côté campagne, on sait qu’il y a de moins en moins d’eau stockée dans les sols. C’est là où l’agriculture a un pouvoir et un devoir gigantesque en entretenant le sol, qui est un puits à carbone et une éponge à eau. Les solutions sont déjà connues et expérimentées : sols peu travaillés, couverts, haies, arbres, prairies permanentes… Ce que les agriculteurs peuvent faire, c’est se demander “comment faire en sorte que mon sol conserve au maximum son eau, mon irrigation est-elle vraiment utile ?”
Les bassines sont-elles une solution ? Pourquoi pas, mais ce serait un non-sens de les alimenter toute l’année. Elles ne devraient l’être que par l’eau de pluie, de surface ou par les nappes l’hiver, pas l’été. Un agriculteur vendéen me disait que tout dépendait de leur utilisation. Est-ce une bonne idée de continuer à miser sur du maïs, ou des cultures d’été qui souffrent le plus de la chaleur, ne vaudrait-il pas mieux miser sur des cultures d’hiver ? Est-il utile de faire de la céréale pour l’exportation ? Car cela revient à exporter de l’eau… Encore une fois, il n’y a pas de solution simple ou radicale. Mais dans tous les cas, ces adaptations vont coûter cher. Ce sera aux Agences de l’eau de les financer, mais elles commencent à manquer de trésorerie, notamment parce qu’on leur demande de plus en plus de travailler à l’entretien de la biodiversité. La question se pose de savoir s’il ne fallait pas augmenter les taxes ou en rajouter une… En fait, il faut développer une culture de la rareté en France, apprendre à ne plus considérer que l’eau coule de source.
Voir le billet de blog de Frédéric Denhez
Propos Recueillis Par Lucie De Gusseme
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