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Devenues un rendez-vous incontournable des acteurs économiques de la région Hauts-de-France, les 22e rencontres régionales de l’économie ont eu lieu mercredi 16 octobre. L’objectif de ces rencontres reste le même : dresser une cartographie de l’état économique des entreprises des Hauts-de-France, du BTP à l’agriculture en passant par le commerce de détail.
À l’image de l’économie nationale, l’économie régionale est au ralenti.
Comme bien souvent, pour comprendre le régional, il faut dézoomer. Au niveau mondial d’abord, deux constats s’imposent : la croissance se maintient au-dessus de 3 % et la tendance désinflationiste se confirme.
Dans le détail, la croissance du PIB de la zone euro est bien en dessous de celle mondiale, s’établissant à 0,9 %. Ce qui signifie que « la reprise est là, mais qu’on reprend moins vite que d’autres zones », indique Carine Jupin, directrice de l’antenne régionale de la Banque de France.
Ainsi, concernant la France, deux « bonnes nouvelles » : le repli de l’inflation qui justifie la baisse des taux directeurs de la BCE (Banque centrale européenne) ce qui a des effets positifs notamment sur l’investissement immobilier ; et un gain de pouvoir d’achat qui « ne se répercute pas pour le moment sur la consommation mais sur l’épargne. Ce qui démontre une inquiétude quant à l’avenir. »
Tout ce contexte se répercute dans les Hauts-de-France. « Pour le secteur industriel, il résiste bien mais ce n’est pas non plus le grand soir. On attend une reprise de l’activité, mais là aussi, pour le moment ça ne se voit pas dans les carnets de commandes. Côté bâtiment, on résiste mieux qu’au national mais dans le détail, le second œuvre va mieux que le gros œuvre et la construction. »
Côté services, deux tendances sont à noter : les services aux entreprises (comptabilité par exemple) se portent bien, mais cela est plus compliqué pour les services de transports ou l’intérim par exemple, qui dépendent beaucoup du surcroît d’activité des entreprises, qui n’en connaissent pas actuellement.
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Si l’on regarde les « signaux faibles », on peut raisonnablement penser que les entreprises des Hauts-de-France ne sont en effet pas en « super forme ». Par exemple, la Banque de France compte de plus en plus d’incidents de paiement, notamment dans les secteurs de la construction et du commerce. « Pour ce qui est des défaillances d’entreprises (quand l’entreprise est dans une situation de cessation de paiements, ndlr), on est mieux qu’au niveau national, mais ce qu’on constate c’est qu’on a de plus en plus d’entreprises de taille conséquente qui sont concernées ». Les défaillances d’entreprises sont repassées dans la région au-dessus de leur niveau prépandémie. En juillet 2024, elles sont de 15 % supérieures au niveau de juillet 2019.
Si l’on regarde maintenant secteur par secteur, du côté de l’agriculture, plusieurs crises expliquent des résultats pas toujours satisfaisants. « Concernant l’élevage, plusieurs maladies menacent l’économie et mettent les éleveurs dans des états d’inquiétude », indique Pascale Nempont, cheffe du pôle innovation, stratégie et prospective à la chambre régionale d’agriculture. Le fait est, par ailleurs, « que l’agriculture est une économie à ciel ouvert », rappelle Laurent Degenne, président de ladite chambre. Aussi, les intempéries et l’été pluvieux et peu ensoleillé ont entraîné « une baisse de rendement sur le blé tendre et une baisse de qualité. Or, s’il est de moindre qualité, le blé part pour l’alimentation animale, moins rémunératrice que d’autres débouchés », abonde Pascale Nempont.
Du côté de l’artisanat, tout dépend de « où » l’on se situe. Concernant l’artisanat alimentaire, après des années d’accumulation de crises et de difficultés, « pour la première fois depuis 2019, les indicateurs sont à la hausse », explique Émilie Defer, responsable du service études et prospective de la CMA Hauts-de-France (Chambre des métiers et de l’artisanat). Même embellie pour l’artisanat des services (coiffeurs, soins de beauté, réparation…). En revanche pour le bâtiment, les effets de la crise de la construction du neuf et de la contraction du marché immobilier se font sentir maintenant. « À cela s’ajoutent parfois des difficultés d’approvisionnement », avance Émilie Defer. Enfin, pour l’artisanat de production (travail des métaux, bois, céramique…), les dirigeants d’entreprises déplorent un manque d’activité mais « attendent du mieux pour la fin d’année ».
Mais le secteur le plus à la peine est celui du commerce de détail. « On voit se développer des dents creuses dans les centres-villes et dans les centres commerciaux. C’est le secteur de l’habillement qui est le plus impacté avec une hausse de 62 % des défaillances entre les troisièmes trimestres 2019 et 2024 », explique Grégory Stanislawski, directeur des études de la CCI Hauts-de-France. Pour lui, c’est un signe que les habitudes de consommation changent. Mais ce n’est pas nécessairement négatif : « Les commerces se réinventent. On voit se développer des magasins éphémères, des espaces de co-retail et des commerces multiservices… »
Il est rejoint par Dominique Seux, éditorialiste économique pour Les Échos et France Inter, qui élargit : « On est dans une économique molle, mais pas catastrophique. Mais on arrive au bout de notre modèle économique et social. »
Eglantine Puel