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Si l’égalité entre les femmes et les hommes est un sujet qui l’anime au quotidien, Claire Quesnel le reconnaît : le 8 mars est une journée particulière. « C’est une fenêtre nécessaire pour médiatiser le chemin qui reste à parcourir, assure-t-elle. Encore aujourd’hui, nous devons rester vigilants et travailler pour une égalité réelle entre les femmes et les hommes. » Car pour elle, les droits des femmes, « acquis par le passé par d’autres bien plus vaillantes que nous », restent fragiles.
À la tête de la direction régionale aux droits des femmes et à l’égalité entre les femmes et les hommes (DRDFE) des Hauts-de-France, la Grenobloise a quitté ses montagnes pour intégrer l’institut régional d’administration de Lille. Quelques années plus tard, elle s’est vue confier une mission de politique de la ville sous l’autorité de plusieurs préfets et préfètes délégués à l’égalité des chances. « J’ai toujours eu, personnellement, un attachement aux questions d’inégalités, dit-elle. Dont celles liées au genre. »
En 2021, elle rejoint la DRDFE en tant qu’adjointe avant, un an plus tard, d’être nommée directrice. L’équipe compte trois (bientôt quatre) personnes et un budget en nette augmentation (30 %) chaque année. En 2023, il atteint 3 millions d’euros en Hauts-de-France pour 64 au niveau national. Prévention et lutte contre les violences faites aux femmes, égalité professionnelle et culture de l’égalité sont les trois grandes priorités.
Pour la fonctionnaire d’État, « les politiques publiques doivent combler les inégalités qui existent ». C’est justement son rôle, les impulser au niveau régional pour qu’elles soient déclinées dans les départements, mais aussi monter des projets, coordonner les actions sur le terrain, accompagner les acteurs du territoire, animer les réseaux. Le van itinérant en voiture Nina et Simon.e.s (lire aussi en page 39) est une illustration de projet impulsé par la direction régionale, puis porté par des associations implantées sur le terrain, pour aller « vers les personnes les plus éloignées, ouvrir le van et proposer un accueil par une travailleuse sociale ».
Si les inégalités et les violences faites aux femmes existent dans tous les milieux, on estime que plus de la moitié des féminicides ont lieu en milieu rural. « Les difficultés peuvent y être accentuées du fait de l’éloignement et de la moindre anonymisation de la prise de parole », explique Claire Quesnel. L’une des missions de la DRDFE est d’accompagner des structures qui aident ces femmes victimes de violence et leurs enfants, aujourd’hui reconnus covictimes.
« Certains moments clés d’une vie sont déclencheurs de violences : séparation, alcool, chômage, grossesse, passage à la retraite », ajoute Claire Quesnel. Aujourd’hui, les associations alertent sur l’évolution de l’âge des auteurs de violence, recensant de plus en plus de seniors. Parce qu’il est plus densément peuplé mais aussi du fait des situations de précarité et de chômage, le Nord-Pas de Calais est l’un des territoires les plus fragiles.
Autre de ses priorités, la direction travaille, en lien avec les réseaux, sur l’égalité professionnelle. Pour atteindre la mixité des métiers, Claire Quesnel veut « ouvrir le chapitre des possibles aux jeunes femmes ». L’entrepreneuriat peut être une voie, encore moins empruntée par les femmes que par les hommes. En décembre 2022, le plan d’action régional pour l’entrepreneuriat des femmes (Paref) a ainsi été signé, déclinaison régionale d’un accord-cadre national, pour sensibiliser à la création d’entreprise et faire connaître l’écosystème qui gravite autour, lors de l’octroi de prêts bancaires, par exemple.
En outre, les chiffres le démontrent, les femmes sont davantage au chômage que les hommes en zone rurale, 11,8 % contre 9,9 %, et davantage sous contrats précaires qu’en zone urbaine, 21 % contre 13 % (source : ANCT).
Enfin, il s’agit de passer d’une égalité théorique à une égalité pratique. « Éducation, santé, sport, ruralité… l’idée est d’infuser et de diffuser cette culture de l’égalité en lien avec les associations, entreprises, collectivités », poursuit la directrice, pour qui le travail de sensibilisation et de formation d’acteurs est important pour intégrer le fait de reproduire des schémas empreints de stéréotypes et les démonter.
« Le premier pas vers l’égalité est déjà d’avoir conscience des stéréotypes », conclut-elle depuis son bureau de la préfecture de Lille. Un œil sur les politiques publiques, l’autre sur le terrain.
2013. Elle se forme à l’institut régional d’administration de Lille et devient fonctionnaire d’État.
2015. En lien avec les préfets délégués à l’égalité des chances, elle agit sur la politique de la ville.
2021. Elle devient directrice adjointe régionale aux droits des femmes et à l’égalité entre femmes et hommes.
2022. Nommée directrice, elle a un rôle d’impulsion de politiques publiques et d’accompagnement.
Louise Tesse
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