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Au premier contact téléphonique établi avec Guy de Saint-Aubert, le maire de Sains-lès-Marquion paraît échaudé. Dépassé par la situation. Depuis le 9 octobre 2019, date du coup d’envoi des travaux du réseau de raccordement à l’eau potable, l’édile ne cesse d’être sollicité par la presse. Une couverture médiatique qui, au fil du temps, l’agace.
“Même la presse nationale s’est déplacée jusqu’ici. Et il faut voir leurs méthodes : ils sont venus avec un a priori et j’étais prié de leur apporter les réponses qu’ils attendaient. Si ce n’était pas le cas, ils insistaient. Je n’ai pas vraiment l’impression qu’ils cherchaient à comprendre les choses. Et cela s’en ressent dans leurs publications finales. »
Guy de Saint-Aubert, maire de Sains-Lès-marquion
Partant du constat que nous arrivions après la meute, Guy de Saint-Aubert était sur ses gardes pour notre demande de reportage. “Je veux bien vous recevoir mais je vous demande de m’écouter », dit-il en préambule. Que Sains-lès-Marquion soit enfin prochainement connecté à l’eau potable, oui il en est fier. Avec une pointe d’amertume, tout de même. “Pour beaucoup, cela nous dépeint comme un village arriéré. C’est juste que nous n’avions pas les moyens avant ».
Plusieurs fois, depuis son élection en 1995, Guy de Saint-Aubert a espéré mettre en place le projet. Mais la commune ne pouvait supporter un tel investissement. Même constat lorsque son père, avant lui, Jean de Saint-Aubert, était à la tête de la mairie. “Les analyses de l’eau n’ont jamais révélé de problèmes », tient-il néanmoins à préciser.
“Il y a une quarantaine d’années, du temps de mon père, les résultats de l’Institut Pasteur de Lille montraient même que l’eau était encore plus pure qu’une eau minérale”.
Guy de Saint-Aubert, maire de Sains-Lès-marquion
Pour autant, Guy de Saint-Aubert refuse de se satisfaire de ce système de pompage “largement dépassé au XXe siècle”. Et puis l’édile préfère prévenir que guérir. “Certes, les analyses n’ont jamais rien montré d’inquiétant. Mais les problèmes sanitaires peuvent survenir sans qu’on s’en rende compte ». D’autant qu’il y a une dizaine d’années, une administrée contracte une hépatite. La qualité de l’eau est suspectée. “Ça a achevé de me convaincre qu’il fallait trouver une solution. Il n’est pas possible de mettre ma population en danger ».
Courant 2017, Sains-lès-Marquion abandonne la compétence de distribution en eau qui lui était jusqu’ici dévolue au profit du syndicat intercommunal de distribution d’eau (Siden-Sian). Une organisation originellement implantée dans le Nord (59), et chargée de remédier entre autres à une absence de nappes phréatiques dans une partie du département, altérant de surcroît l’approvisionnement en eau dans certains territoires.
Le champ de compétences du Siden-Sian s’est ensuite étendu au Pas-de-Calais, où Rodrigue Mroz en assure la vice-présidence. À son comité syndical, composé d’élus de la communauté de communes de Osartis-Marquion, dont fait partie Sains-lès-Marquion, il fait part de son souhait de la mise en place de travaux de raccordement à l’eau potable. “Par solidarité, assure-t-il. Seule cette commune ne bénéficiait pas de l’eau potable. Il n’y avait aucune raison qu’elle soit mise de côté”.
Encore fallait-il que les habitants de Sains-lès-Marquions souscrivent à la démarche. En s’abonnant auprès du Siden-Sian. “Il fallait un nombre d’abonnés suffisant pour commencer”, souligne Rodrigue Mroz.
“On a bien sûr laissé le choix aux habitants. Même si certains y réfléchissent encore, on a constaté petit à petit qu’une bonne partie d’entre eux étaient prêts à franchir le pas ».
Rodrigue Mroz, vice-président du Siden-Sian du pas-de-Calais
De fait, le Siden-Sian débloque 750 000 euros. L’Agence de l’eau Artois-Picardie ajoutera 250 000 euros. Au total, un million d’euro est consacré au chantier. Rodrigue Mroz explique le cheminement de la future eau potable qui s’écoulera à Sains-lès-Marquion d’ici à la fin du printemps prochain : “Elle sera approvisionnée depuis le forage principal d’Estrée (62), pour ensuite rejoindre la canalisation de Marquion (62), bientôt branchée à celle de Sains-lès-Marquion”.
Aujourd’hui, il n’est pas rare de croiser engins de chantier et ouvriers dans les quelques rues de Sains-lès-Marquion. “Pour certains ouvriers, c’est sans doute la première fois qu’ils assistent à une telle opération”, glisse Rodrigue Mroz. Le signe que Sains-lès-Marquion est bien une exception.
Simon Henry