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La chartreuse de Neuville, à Neuville-sous-Montreuil, est le site retenu par le Loto du patrimoine pour les Hauts-de-France. Fondée au XIVe siècle par le comte de Boulogne, la chartreuse Notre-Dame-des-Prés, plus connue sous le nom de chartreuse de Neuville, compte initialement 12 ermitages. Récupérée par l’État après la Révolution, elle est vendue à des nobles qui s’en servent… de carrière de pierre. Presque entièrement démontée, elle sera reconstruite en 1875 : alors à son apogée, l’ordre des Chartreux décide de racheter le site et de commander à un architecte d’Hesdin, Clovis Normand, deux monastères. Le premier voit le jour à Neuville-sous-Montreuil (24 ermitages, 18 000 m2 sur un terrain de 12 hectares) et le second à Parkminster, au Royaume-Uni (48 ermitages).
C’est alors une période faste avec une intense activité d’imprimerie et la constitution d’un fonds important de bibliothèque. Mais quand est promulguée la loi de séparation des Églises et de l’État, les Chartreux s’exilent en Angleterre et y emportent les biens précieux (14 000 livres, statues et tableaux, imprimerie…).
1908 : transformée en sanatorium, la chartreuse est flanquée d’un phalanstère d’artistes (une communauté d’artistes à visée sociale). De 1915 à 1919, le lieu devient belge : les familles des terres volontairement inondées à Ypres pendant la guerre s’y réfugient. L’endroit devient aussi un lieu d’accueil des orphelins de guerre. Une épidémie de typhus y fera plus de 600 morts, faisant aujourd’hui de la chartreuse un important lieu de mémoire.
Après la Première Guerre mondiale, la chartreuse redevient un hôpital, puis de nouveau un hôpital de guerre et un orphelinat pendant la Seconde guerre mondiale. Enfin, entre 1947 et 1998, le lieu accueille pêle-mêle anciens détenus, personnes handicapées, orphelins, personnes âgées… Dans cette communauté chamarrée s’intègre aussi le personnel qui s’installe sur place. Dans cette singulière relation, chacun trouve sa place (lire aussi en page 56). L’ensemble est inscrit au titre des monuments historiques en 1993.
Il y a quelques années, la chartreuse, à l’abandon, est achetée par les Petites sœurs de Bethléem avant que la vente ne soit annulée pour cause de mérule, champignon qui attaque le bois de toutes parts. Le bâtiment, propriété du centre hospitalier de l’arrondissement de Montreuil, prend encore l’eau, littéralement, quelques années. Une société civile immobilière (SCI) en fait l’acquisition et l’association de la Chartreuse de Neuville est créée, en parallèle, en 2008. L’idée est alors de diviser la partie publique, dédiée à l’accueil du public, et la partie privée destinée aux logements de tourisme.
En 2016, l’association achète 40 % des bâtiments et lance les travaux de structure pour stopper la dégradation : 10 millions d’euros de travaux en 10 ans financés par 60 % de subventions publiques et 40 % de dons et mécénat. Côté privé, 12 millions d’euros ont été engagés dans les travaux. Il manque 3 millions d’euros pour préserver le corps principal et encore 7 millions d’euros pour le faire fonctionner (électricité, chauffage, ventilation…).
C’est dans ce contexte que la chartreuse a été retenue pour l’édition 2023 du Loto du patrimoine : le lauréat recevra sa part des mises de joueurs de loto entre fin août et le 16 septembre, date de la journée du patrimoine. En fonction du nombre de participants, le monument pas-de-calaisien pourrait recevoir entre 300 000 et 500 000 euros.
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Justine Demade Pellorce