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L’entreprise Lesaffre, spécialiste des micro-organismes et levures fermentés, a inauguré jeudi 13 octobre son campus dédié à la recherche et au développement (R & D).
Construit sur un terrain de 19 ha entre Marcq-en-Barœul et Marquette-lez-Lille (59), le bâtiment de 23 000 m2, ultramoderne, a pour vocation d’accélérer les actions de recherche du groupe, vieux de 170 ans et qui rassemble sous son entité dix marques de quatre domaines différents. Une salle de sport et un restaurant d’entreprise font également partie du décor.
L’endroit n’est pas choisi au hasard : « Nous avons déjà sur ce site notre baking center mondial, c’est-à-dire notre centre d’application/test en conditions réelles », explique Brice-Audren Riché, directeur général du groupe Lesaffre depuis janvier.
Lesaffre, c’est aussi 11 000 collaborateurs dans le monde, de plus de 85 nationalités. Rien que sur la métropole lilloise, 700 personnes travaillent pour le groupe. L’idée du campus : les regrouper, en partie, en un seul et même endroit.
« C’est le rassemblement d’au moins quatre lieux ainsi que de bureaux loués, explique Hassina Haït-Abdessrahim, directrice du pôle MOS (Micro OrganismeS center of excellence). Depuis que nous sommes tous sous le même toit, il y a une vraie cohésion d’équipe et une énergie particulière. Des gens qui ne se croisaient jamais échangent désormais sur leur méthode de travail. Il y a beaucoup d’informel et d’échanges de bons procédés. C’était le but ! »
En effet, c’était le but. Brice-Audren Riché le dit sans détour : « Ce campus est le fruit d’une ambition, celle d’accélérer l’innovation, la recherche et le développement. C’est pourquoi nous avons aussi investi dans des équipements de pointe. »
Plusieurs centaines de machines sont ainsi à disposition des 300 chercheurs pour pouvoir analyser, décrypter et enregistrer les souches de micro-organismes et/ou de levure.
Mais parmi ces machines, celle qui attire tous les regards c’est la biofonderie. « C’est la première du type en Europe qui soit public-privé et elle est unique en France. C’est un véritable atout concurrentiel, indique Christine M’Rini Puel, directrice R & D du groupe. Cette biofonderie est composée de 60 machines automatisées qui miniaturisent et modélisent tous les tests qu’on fait sur les micro-organismes dans le but de les analyser, d’établir leur fiche d’identité et leur potentiel fonctionnel. Avant, nous pouvions tester jusqu’à 10 000 souches par an. Avec la biofonderie, nous sommes passés à 10 000 par mois et l’objectif est d’atteindre bientôt les 10 000 par jour. À terme, ce sera 100 000 par jour ! »
Le coût de ces équipements et de bâtiment ? Impossible de le savoir mais ce que Lesaffre peut dire c’est que « le budget recherche et développement va augmenter chaque année de 10 à 15 % ».
Un nombre de souches étudiées qui paraît énorme, mais qui est à remettre en perspective avec les « 80 000 souches auxquelles nous avons accès grâce à nos partenariats universitaires et start-up », rappelle Christine M’Rini Puel, un chiffre auquel s’ajoutent les 18 000 souches de la collection personnelle de l’entreprise.
C’est le service d’Hassina Ait-Abderrahim qui est responsable de l’entretien et de la caractérisation des micro-organismes de cette fameuse collection : « Nous testons les effets des micro-organismes et les classons selon ces effets. Par exemple, le diacétyle est censé donner un goût beurré, crémeux… Mais il n’est pas le seul ! Donc en fonction du produit, on va étudier s’il est possible de le produire en quantité et tester l’effet au baking center. »
Pour cela, on applique une « recette » à l’organisme ou à la levure pour le multiplier en grande quantité et pouvoir le commercialiser.
Du fait de la diversité des effets possibles des micro-organismes et levures, Lesaffre pense que la fermentation peut permettre de relever le défi de nourrir sainement neuf milliards d’habitants en 2050 en utilisant au plus juste les ressources de la planète. Le défi est grand et inédit.
Mais Lesaffre a un avantage : son expérience et la diversité de son activité. En tout cas c’est ce sur quoi le groupe mise.
« Il existe des quintillions de micro-organismes dans la nature. Les possibilités sont infinies », affirme Brice-Audren Riché.
Si le cœur historique d’activité du groupe Lesaffre est la planification (notamment autour des produits boulangers comme les levures et levains), le groupe à l’hirondelle s’est aussi développé dans le bien-être et la santé via la marque Phileo, par exemple, avec des produits qui renforcent les défenses immunitaires et réduisent l’utilisation d’antibiotiques chez les animaux.
La marque Agrauxine, quant à elle, utilise les micro-organismes pour fabriquer des produits permettant de réduire l’usage de pesticides et d’améliorer la nutrition végétale. Lesaffre est également présent dans les domaines de l’agroalimentaire et de l’industrie via des marques comme Fermentis (boissons fermentées) ou Leaf (bioéthanol).
Bref, les micro-organismes sont utiles partout. Et comme le rappelle Christine M’Rini Puel, « des micro-organismes vivent dans les fonds marins, sans oxygène et sans lumière. Si l’on pouvait savoir comment ils font ça et appliquer ces propriétés sur terre, ça pourrait être révolutionnaire ».
Eglantine Puel
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