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Fumée blanche à l’horizon des longues plaines betteravières de l’Aisne, odeur de sucre et valse des camions, pas de doute, nous sommes bien à Origny-Sainte-Benoîte, l’une des usines de transformation de betteraves de la coopérative sucrière Tereos. Depuis le 22 septembre, les betteraves produites dans un rayon de 25 kilomètres sont transformées dans cette usine. Ça fait plus de 150 ans qu’il en est ainsi.
Toutefois, l’usine a bien changé et s’est agrandie. Plus de 700 camions viennent livrer 20 000 tonnes chaque jour pendant environ quatre mois de septembre à janvier. À l’issue de ces chaufferies, fours et alambics, 2 000 tonnes de sucre, 2 000 tonnes de pulpes et 9 000 hL d’alcool sont produits chaque jour. « Ici est transformé l’équivalent de la production annuelle d’environ 930 coopérateurs réalisée par 330 employés et une centaine de saisonniers », fait remarquer Philippe Guénal.
À Origny-Sainte-Benoîte, le sucre est produit et conditionné sur place. Le sirop, stocké pendant la campagne betteravière est ensuite distillé pour en faire de l’éthanol et la bétaïne naturelle est extraite du substrat. Rien n’est perdu, tout est transformé. Si bien que les co-produits comme les pulpes, les vinasses et les écumes sont livrées aux agriculteurs intéressés par ces aliments ou fertilisants.
Sur le même site, sur l’autre rive du canal, se trouve une autre distillerie. Celle-ci ne transforme pas les betteraves mais du blé. Plus de 900 hL d’alcool y sont produits. « C’est un alcool de bouche, plutôt haut de gamme qui est produit ici », explique le directeur du site.
Au-delà du recyclage des co-produits, le site industriel a lancé sa transition énergétique depuis quelques années avec un plan de décarbonation. Ainsi, 50 % de l’énergie consommée est d’origine renouvelable. « Nous avons lancé un partenariat avec Suez pour l’installation d’une chaudière à combustibles solides de récupération, annonce le directeur du site. Ainsi, en 2024, nous devrions réduire de 40 % la consommation de gaz fossile sur le site. »
À une autre échelle, le groupe Tereos souhaite devenir un acteur incontournable de la décarbonation des véhicules. « D’ici 2030, les pouvoirs publics ont pour ambition de réduire de 55% les émissions de gaz à effet de serre, c’est issu du pacte vert européen, explique Valérie Corre, directrice des affaires réglementaires alcool et éthanol Europe chez Tereos. Pour y parvenir, il est urgent de décarboner le transport. » Car celui-ci représente 21 % des émissions totales. Cependant, “des mesures incohérentes ont été annoncées; maintien d’un plafond à 7% pour les biocarburants issus des matières premières agricoles, avec un abandon des véhicules thermiques et un maintien des méthodes d’évaluation des émissions biaisées.“
Le gouvernement français aurait donc misé sur le mauvais cheval en se dirigeant vers la voiture électrique selon Tereos. “La voie pour décarboner les véhicules de manière peu coûteuse et plus efficace est celle du bio éthanol. Il suffirait d’installer des boîtiers dans chaque voiture. C’est ce qui serait le plus populaire et le plus abordable. Seulement, aucune réglementation ou fiscalité ne va dans ce sens, bien au contraire.“
Pour promouvoir le bioéthanol, Tereos en partenariat avec Scania a adapté au bioéthanol quelques camions de transport de betteraves. Selon l’Ademe (Agence de la transition écologique), leurs émissions de gaz à effet de serre ont été réduites de 88 %.
Lucie Debuire