Votre météo par ville
Depuis deux ans, une marque à tête de bœuf fait son petit bout de chemin à l’incubateur Euralimentaire, sur le site de l’ancien MIN de Lomme (59). Monsieur Biltong, c’est son nom, propose du biltong, une recette de bœuf séché typiquement sud-africaine.
Derrière ce nom, Pierre Gaignard, son fondateur, et quatre autres salariés. « Cofondateur plutôt puisque mon père a 1 % des parts », sourit le trentenaire. Soit. En tout cas, l’idée d’introduire ce produit dans le marché français est bien celle de Pierre Gaignard. Et ce pour une raison simple : il raffole du biltong.
« J’ai vécu en Afrique du Sud à plusieurs périodes de ma vie : deux fois quand j’étais enfant et j’y suis retourné adulte. C’est enfant que j’ai découvert le biltong, en tant qu’en-cas, comme il est consommé là-bas par les locaux. En y revenant adulte, et ayant entre-temps découvert les plaisirs de l’apéritif, j’ai vu que le biltong pouvait aussi être servi dans ces moments-là, en guise d’amuse-bouche. Là, je me suis dit : ça, ça va me manquer et ça peut marcher en France. »
Pour son retour dans l’Hexagone, Pierre Gaignard décide de revenir dans le Nord, où il a passé plusieurs séjours dans sa jeunesse et où sa famille s’est installée. Nous sommes en mai 2019.
Pour se lancer, cet ancien étudiant en commerce, qui ne connaît « pas du tout le monde de l’agroalimentaire », doit apprendre toutes les règles et normes du milieu. « J’ai aussi effectué un stage en Angleterre, chez un fabricant de biltong pour apprendre les ficelles », raconte-t-il.
Par ailleurs, avant de quitter l’Afrique du Sud, Pierre en a fait le tour pour découvrir comment on fabriquait du biltong : « Mais les fabricants ne voulaient pas vraiment partager… Il y a autant de recettes de biltong que de vendeurs finalement. Ce qu’ils m’ont dit c’est qu’il fallait que je fasse beaucoup d’essais et beaucoup d’erreurs ! »
Pierre Gaignard a écouté ce conseil et a ainsi créé six recettes : piment de Cayenne, piment wiri wiri, original (le plus « proche » du biltong sud-africain), cumin, ail et, lors d’un soir d’ennui pendant le confinement est né l’ail piment de Cayenne.
Toutes ces recettes ont été adaptées au palais français. Aussi, le piment de Cayenne est très doux, si bien « qu’on a eu des retours de clients qui voulaient quelque chose de plus fort. D’où la création du wiri wiri, piment d’Amérique latine. La recette est plus forte mais reste adaptée aux Français ! »
Autre adaptation, plus surprenante : la réduction du pourcentage de matière grasse, de 20 à 6 %. « En fait, on a noté qu’il y avait une demande pour quelque chose de moins gras que le saucisson », explique Pierre Gaignard.
Pour obtenir un tel pourcentage sans que la viande ne soit trop sèche, Pierre Gaignard n’utilise que des morceaux de bœuf « peu gras et peu nerveux également, afin d’éviter un côté élastique après séchage ».
Ce bœuf, il est des Hauts-de France. « Je me fournis chez Raoul Deschildre, un grossiste du coin qui achète ses bêtes dans la région. C’est une de mes exigences avec le fait que je voulais des morceaux de race à viande. Il y en a dans le coin et la viande a déjà une certaine empreinte carbone donc autant la limiter. »
Une fois les morceaux de viande fraîche reçus, ils sont marinés dans du vinaigre de cidre et les mélanges d’épices spécifiques à chaque recette pendant 24 à 48 h. « La majorité de notre marinade est française puisque le sel est de Guérande, le piment de Cayenne est techniquement français, la coriandre, l’ail… Bref dès que c’est possible on prend des produits français ! » D’ailleurs, la marinade au vinaigre est en fait « une technique que les colons français ont importée en Afrique du Sud car ils s’étaient aperçus que c’était bactéricide. » Malin.
Vient enfin l’étape cruciale du séchage qui dure entre cinq et dix jours « selon les morceaux. Le séchoir est chauffé, mais pas trop, contrairement au beef jerky américain où l’on déshydrate très vite la viande. Ici, on prend notre temps et la viande est ainsi plus moelleuse ». Le bœuf est ensuite tranché et mis en sachet « avec beaucoup d’amour » par les employés de Monsieur Biltong.
« Le graphisme est celui d’une boîte de Marcq-en-Barœul, le packaging est fabriqué à Bourgoin-Jallieu (près de Lyon) et on trouve dans les sachets des absorbeurs d’oxygène fabriqués à Caen », explique Pierre Gaignard. 200 kg de viande sont ainsi traités chaque mois et deviennent 84 kg de bœuf séché. « On perd 2 % de plus au moment du tranchage. Mais d’ici quelques mois, les quelques tranches pas jolies seront réduites en poudre et seront vendues en guise de condiment », ajoute Pierre.
Pour le moment, la marque est vendue par une trentaine de revendeurs comprenant des bars, restaurants (qui l’utilisent dans des salades et même dans des welshs, comme à La petite table à Lille), des cavistes, boucheries, fromageries et aussi, des épiceries en vrac de la région. « On a réussi à les convaincre malgré le fait que les emballages ne sont pas recyclables, parce que c’est très bon », appuie, convaincu, Noa Vandenberghe, responsable commercial en alternance. « Pour le moment, on reste sur le credo apéritif mais à terme on aimerait aussi pouvoir le vendre à des sportifs, par exemple », précise Pierre Gaignard.
Objectif : mettre à la vente de nouvelles recettes, et se développer encore plus dans la région, mais aussi sur le marché français via le site web de la marque. « Le démarrage est bon mais on aurait besoin d’un coup d’accélérateur », admet Pierre Gaignard. Noa Vandenberghe, lui, l’affirme : « Il faut faire goûter le produit parce qu’une fois qu’on a essayé, on est convaincu. »
*Prix : entre 7 et 13 € le sachet. Le week-end du 8 et 9 octobre, la marque Monsieur Biltong sera présente au festival Fesch’tis Houblon à Carvin.
Eglantine Puel
Lire aussi : Food Creativ : Le fleuron de l’innovation agroalimentaire