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En pleine remontée du cours du sucre en février dernier, le marché a été stoppé par la crise du coronavirus. Depuis, les prix dégringolent. « On évalue la baisse à 32 % pour les sucre roux et blanc, estime Timothée Masson, expert marchés à la CGB (confédération générale des planteurs de betteraves) lors d’une vidéoconférence diffusée le 1er avril 2020. Les prix ont atteint les 330 $/t contre plus de 450 $/t mi-février. »
Toutefois, de légers signes de reprise sont là. Tout d’abord le sucre blanc s’en sort mieux que le sucre brut : la prime de blanc avoisine les 100 $/t (au lieu de 60 ces derniers temps).
« Il y a moins de disponibilités en sucre blanc“, annonce l’expert. En effet, le Brésil et autres pays producteurs de sucre à base de cannes, voient la valeur de leur monnaie s’effondrer : le réal a perdu 35 % de sa valeur en un an. Ces pays deviennent alors compétitifs et exportent du sucre roux en grande quantité et moins cher.
De plus, avec les mesures de confinement, les marchés ont évolué. Ils sont passés de la restauration hors domicile à une consommation domestique. « Cela entraîne une baisse de la consommation de 2 millions de tonnes dans le monde », explique Timothée Masson. À cela s’ajoute les spéculateurs qui sont devenus vendeurs et inondent le marché… bref, le sucre ne manque pas.
Par ailleurs, la crise du coronavirus et le confinement ont joué un rôle négatif sur les cours de l’éthanol. « Faute de demande et à cause d’une guerre commerciale entre les pays producteurs de pétrole, les cours ont dévissé, constate Timothé Masson. Dans sa chute, l’or noir a entrainé l’éthanol. »
Avec un éthanol peu cher, le Brésil a donc choisi de privilégier la fabrication de sucre. Ajoutant encore un peu plus de marchandise aux stocks déjà constitués.
Ceci est la vision mondiale du marché. Mais si on zoome sur notre territoire, l’Europe, les marchés restent soutenus. « Nous n’avons pas d’éléments pour dire qu’il y a une crise en Europe », indique Timothée Masson. Les stocks de sucre sont aux plus bas depuis dix ans et les emblavements sont en baisse de 2 % par rapports à ceux de 2019.
Avec un rendement quinquennal, la production de sucre en 2020 devrait atteindre les 17,5 millions de tonnes. L’Europe serait donc importatrice de 800 000 tonnes, soit l’équivalent de la production de trois sucreries. « Les fondamentaux sont sains », rappelle l’expert de la CGB.
Mais comment empêcher le marché mondial, surabondant, de ne pas déséquilibrer le marché européen ? « Assurer la production de betteraves en premier lieu et honorer les contrats de sucre en évitant les ruptures, explique-t-il. Il s’agit ensuite de limiter l’impact des importations de sucre des pays où la monnaie est dévaluée. »
Pour cela, la CGB et toute la filière ont demandé de revoir la clause de sauvegarde : celle-ci concerne les contrats de libre échange et supprime les droits de douane. Ils demandent d’instaurer de nouveaux ces frais. La filière sucre demande également une suspension du régime de perfectionnement actif. Celui-ci permet aux utilisateurs de sucre d’en importer sans droits de douane à condition qu’ils réexportent par la suite. Les acteurs du secteur sont dans l’attente de réponses, mais restent aux abois afin d’éviter une surabondance du marché.
Lucie Debuire