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Il a choisi l’atelier fromage plutôt que l’agrandissement. Rémi Janssen s’est installé sur l’exploitation familiale le 1er aout 2017. Située à Marchiennes (59), elle compte 110 vaches laitières et la moitié de ses 150 ha de culture est destinée aux animaux. Le jeune homme de 23 ans est aujourd’hui associé en Gaec avec ses parents.
« Lorsque je me suis installé, on ne ressentait pas la nécessité de s’agrandir, explique-t-il. On voulait plutôt partir sur une valorisation de nos produits. De plus, j’ai choisi la diversification car la conjoncture n’était pas très bonne à ce moment. Comme j’ai travaillé pour le Service de remplacement, j’ai pu voir ce qui fonctionnait ou ce qui fonctionnait moins bien. Et je suis arrivé dans une ferme où les agriculteurs transformaient leur lait en fromage affiné. »
Gardant à l’esprit que « la population aujourd’hui veut consommer local », Rémi Janssen décide alors de créer son propre atelier de production fromagère. Bien sûr, tout ne s’est pas fait en un jour et le jeune agriculteur a laissé mûrir, ou plutôt affiner, son projet avant de se lancer véritablement.
Créer un plateau de fromages
Après un BAC STAV (Sciences et technologies de l’agronomie et du vivant), un BTS Acse (Analyse et conduite de système d’exploitation) et un certificat de spécialisation en production laitière, il fait de l’alternance sur la ferme familiale, travaille de ferme en ferme pour le Service de remplacement avant de finalement s’installer.
« Si j’avais eu plus de temps, j’aurais bien aimé faire une formation de spécialisation en transformation laitière », confie-t-il. Mais c’est sur le tas, et avec l’ARVD (Association régionale des vendeurs directs de produits laitiers) qu’il se forme. Avant de créer l’atelier, il veut être sûr de la direction qu’il prend. « Ça nous embêtait d’investir avant de savoir si ça allait me plaire, car ce n’était pas une idée que j’avais depuis des années ; ça m’est venu comme ça. Alors j’ai fait des essais pour voir comment ça marchait, se souvient- il. C’est difficile, ce n’est qu’au bout d’un an qu’on arrive à faire le fromage que l’on souhaite. »
Il se spécialise en fromage affiné. Et la transformation semble lui plaire puisque son objectif est désormais de proposer tout un plateau de fromages, six au total ! « Pour l’instant j’en ai créé trois: la Ch’tomme de Marchiennes, la Lumière de Marchiennes et le Coeur de Marchiennes. J’en ai un autre en cours d’essai et je souhaiterai aussi faire des tartes ou encore des feuilletés. »
Dans son local, en un an, il a transformé 30 000 litres de lait en fromages. « J’ai vu que ça me plaisait et qu’il y avait un potentiel sur le marché », souligne-til. L’agriculteur passe ses matinées à la transformation, utilisant le lait du matin. Il retourne ensuite les fromages toutes les deux heures en moyenne, selon le type de fromage. Il faut ensuite les brosser et les emballer. Sa copine, également fille d’agriculteurs, l’aide dans sa tâche.
Pour la vente, « je n’ai pas eu envie de faire un magasin à la ferme car j’avais besoin de garder une certaine tranquillité », confie-t-il. Il livre donc sa production à huit fermes, deux restaurants et deux drives fermiers.
Un nouvel atelier est en cours de construction sur l’exploitation pour pouvoir augmenter les volumes de transformation. « Mais je veux garder une structure familiale, précise Rémi. L’embauche ne me fait pas peur, ça arrivera, mais je ne veux tout de même pas une trop grosse production. »
En parallèle, l’exploitation est entrée dans une démarche de production de « lait sans OGM » avec la coopérative Sodiaal union. « C’est important pour l’image », souligne Rémi Janssen. L’agriculteur a un autre projet en tête: la création, avec une dizaine d’autres agriculteurs, d’un magasin de producteurs dans le secteur d’Orchies. « On n’a pas encore trouvé le lieu idéal, précise-t-il, mais on se réunit régulièrement, on fait des formations. »
Avec le recul, que pense le jeune homme de son choix ? « Ça été un peu un défi de me dire : je vais transformer mon lait ! ». Cela nécessite notamment une attention et un suivi particuliers de la production laitière pour avoir un fromage au goût et à la texture constants. « Mais comme je ne reprenais pas de ferme, je n’ai pas été confronté aux questions de propriétaires, quelque part, c’était plus facile. »
Il estime tout de même que « ce n’est pas du tout le même métier que celui d’éleveur. Il faut accepter d’être dans le local alors qu’il fait beau dehors par exemple… C’est beaucoup de contraintes, notamment dans la gestion du temps. L’avantage d’être plusieurs sur la ferme est que le boulot se fait quand même quand je suis en transformation. »
Lui qui estime avoir été très bien accompagné par les techniciens de l’ARVD, « qui aident à l’installation mais apportent aussi un suivi régulier après celleci », souligne que, « dans tout projet, les formations sont importantes et qu’il ne faut pas hésiter à se lancer ». Surtout, la personne qui veut se lancer « doit sentir si ça lui plait ou pas, en allant voir comment ça se passe chez d’autres producteurs. »
Laura Béheulière