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“Deux mondes opposés émergent (…). Dans les villes, les consommateurs s’insurgent de la persistance de certaines pratiques. Tandis que dans les campagnes, les producteurs ne comprennent plus les attentes de consommateurs de plus en plus exigeants, et parfois déconnectés du réel. Pourtant, les uns ne peuvent subsister sans les autres…” Sur un générique digne de Cash investigation qui va crescendo, la voix off énonce son objectif : nous emmener “à la rencontre de ceux qui nous nourrissent, et [nous] présenter, à travers leur regard, ce beau métier : l’agriculture”.
Si l’idée d’Étienne Ducroquet, auteur de deux vidéos postées sur Youtube en janvier, n’est pas inédite, c’est une bonne initiative de plus qui nous plonge dans le quotidien de jeunes ou futurs producteurs. Vidéos réalisées avec un professionnalisme bluffant de surcroît. Louis Lacheré et sa réflexion sur le bien-être de ses volailles, les distributeurs de Jean-Benoît Dequidt, le jeune installé en cultures légumières Matthieu Loots, les bovins d’Alice Parcy et ses projets d’atelier de découpe à la ferme, le maraîchage de Jérôme Wavrant… Tous expliquent avec simplicité et transparence leur système, bio ou pas.
Étudiant en sciences politiques à Lille depuis septembre dernier, Étienne Ducroquet n’est pas étranger au monde agricole : son grand-père était agriculteur et son père dirige une entreprise de triage mobile (Cap Semences, ndlr). Durant ses années lycée à Bapaume, il rencontre “beaucoup d’amis du milieu agricole, des passionnés”, avec qui il fait le constat du “manque de connaissance du fonctionnement de l’agriculture dans le monde citadin”, se souvient-il.
Mais c’est pendant un cours d’anglais avec ses nouveaux camarades lillois que ce constat le frappe le plus. “Nous devions expliquer si plus tard on préférerait vivre en ville ou à la campagne. J’ai été surpris, c’était très clivé, il y avait comme un dénigrement du monde rural. Même après la Covid-19, où beaucoup sont partis se mettre au vert… On s’est un peu moqué de moi quand j’ai dit que je ne me voyais pas vivre en ville toute ma vie.”
Le reconfinement passe par là. “À l’automne 2020, j’ai repensé à ce débat, et j’ai rappelé quelques amis du lycée Saint-Éloi.” Leur idée : une mini-série de vidéos pour expliquer l’agriculture moderne.
Le pilote est posté sur la chaîne Youtube qui porte son nom le 1er janvier. Il recueille plus de 1 800 vues. Un second épisode, où il rencontre des jeunes agriculteurs et agricultrice du Nord-Pas de Calais, est posté mi-janvier. “Je suis parti sur le rythme d’une vidéo tous les 15 jours, j’espère pouvoir le tenir.”
Selon Étienne Ducroquet, le prochain et troisième épisode de sa web série sera aussi “le plus intéressant”. Le plus proche du dialogue qu’il entend renouer entre producteurs et consommateurs peut-être.
“Avec un ami élève à Genech, nous avons réalisé un micro-trottoir. Nous avons demandé aux consommateurs dans les rues de Lille ce que leur évoquait l’agriculture. Qu’est-ce qui leur pose question ? Quelles sont leurs préoccupations ? Souvent, ils n’en pensaient pas grand-chose…”, sourit-il.
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Et souvent reviennent les mêmes thèmes, les plus fréquemment médiatisés : maltraitance animale, glyphosate, mais aussi le revenu des agriculteurs. “On leur a aussi parlé de leur rapport à la consommation : est-ce important de consommer local, bio ? Quelles sont les questions qu’ils aimeraient poser aux agriculteurs ? Nous avons en parallèle interviewé une dizaine d’agriculteurs, et nous utiliserons ces ressources pour recréer une sortie de dialogue virtuel.” Un jeu de questions-réponses pourtant simple, mais auquel nous ne jouons, de toute évidence, plus assez.
Lucie De Gusseme