Votre météo par ville
Il a fallu une nuit supplémentaire pour trouver un accord. Ce mercredi 13 décembre, au petit matin, les pays du monde entier ont approuvé à la COP28 de Dubaï un compromis qualifié d’historique pour son appel inédit à abandonner progressivement les énergies fossiles, dont la combustion depuis le XIXe siècle est largement responsable de l’élévation actuelle des températures mondiales de 1,2°C, par rapport à l’ère préindustrielle. C’est la première fois de l’histoire des conférences sur le climat des Nations unies que le rôle des énergies fossiles dans le changement climatique est mentionné.
Le texte issu de douloureuses négociations a été adopté par consensus à Dubaï, aucune voix ne s’élevant parmi les quelque 200 nations représentées en séance plénière. L’Arabie saoudite, le Koweït ou l’Irak étaient sur une ligne dure, refusant tout accord s’attaquant aux énergies fossiles qui font leur richesse, mais n’ont finalement pas bloqué l’accord. Il s’agit d’une décision “historique pour accélérer l’action climatique”, a déclaré Sultan Al Jaber, président émirati de la conférence de l’ONU. La France a salué “une victoire du multilatéralisme et de la diplomatie climatique”, par la voix de sa ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, présente à Dubaï.
Le texte, dont chaque mot a été négocié par les Émiratis, appelle à “transitionner hors des énergies fossiles dans les systèmes énergétiques, d’une manière juste, ordonnée et équitable, en accélérant l’action dans cette décennie cruciale, afin d’atteindre la neutralité carbone en 2050 conformément aux préconisations scientifiques”. L’appel à accélérer l’action dès la décennie en cours était une exigence de l’Union européenne et de nombreux autres pays. “C’est absolument nécessaire, à la fois pour une question environnementale mais aussi pour une question de souveraineté énergétique. Nous avons déjà subi les conséquences de notre dépendance au gaz russe”, illustre auprès de Terres et Territoires Pascal Canfin, député européen (Renaissance) et président de la commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire du Parlement européen.
En choisissant le terme de “transitioning away” (“transitionner hors de”, “s’éloigner”, “abandonner” selon les traductions possibles en français), le texte ne parle plus de “phase-out” (“sortie”) du pétrole, du gaz et du charbon, un terme devenu depuis des mois la bannière derrière laquelle se rangeaient plus d’une centaine de pays et des milliers d’ONG.
Une source proche de la présidence émiratie estime que le texte a été finement “calibré” pour tenter de réconcilier des points de vues opposés, et notamment éviter un blocage de l’Arabie saoudite. Tout en laissant volontairement un peu d’ambiguïté dans les formulations pour que chacun y trouve son compte… L’alliance des petits États insulaires (Aosis), en pointe pour réclamer des mesures fortes contre les énergies fossiles, a ainsi à la fois salué une “amélioration” et signalé des “inquiétudes”.
“Si Glasgow (2021) était la première fissure dans le barrage avec l’appel à réduire le charbon, maintenant c’est une grosse rupture avec l’extension au pétrole et au gaz”, s’est félicité auprès de l’AFP Alden Meyer, du groupe de réflexion E3G. “Les Saoudiens essaient de colmater furieusement le barrage mais le sens de l’histoire est clair”, juge-t-il.
“Ce n’est pas la promesse historique” du “phase-out” mais “transition hors, cela envoie quand même un signal important”, avait quant à elle réagi Caroline Brouillette, directrice du réseau d’ONG Réseau Action Climat Canada, peu avant la séance plénière. Elle a regretté cependant l’inclusion de “distractions dangereuses comme la capture et le stockage du carbone, le nucléaire”.
Le président de la conférence, Sultan Al Jaber s’évertuait depuis plus de 24 heures à sauver une COP qu’il avait annoncée comme “un tournant”, à même de préserver l’objectif le plus ambitieux de l’Accord de Paris, adopté il y a huit ans : limiter l’élévation de la température mondiale à 1,5 °C. Le premier projet de texte émirati, rendu public le lundi 11 décembre, avait suscité un tollé car il listait trop d’options au choix et n’appelait pas à la “sortie” des énergies fossiles. À ce jour, seule la “réduction” du charbon avait été actée à la COP26 à Glasgow. Jamais le pétrole ni le gaz n’avaient été désignés.
M.L avec Afp
Lire aussi : La Porte du Hainaut lance son plan climat air énergie