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Ménager la chèvre et le chou, un exercice subtil. C’est notamment le cas pour les travaux forestiers contraints par une série de précautions. Au printemps en particulier, l’intervention dans les massifs forestiers mais aussi les haies et toutes sortes d’habitats potentiels doit prendre en compte le risque de présence d’espèces protégées, les oiseaux notamment.
Vendredi 6 avril, le syndicat des Entrepreneurs des territoires (EDT) a lancé une alerte presse au sujet de chantiers forestiers à l’arrêt et “de la menace” qui pèse plus largement sur l’approvisionnement en bois et sur la filière.
Des chantiers menés sur des parcelles “gérées par la Société Forestière de la Caisse des Dépôts et Consignations, un des plus importants gestionnaires forestiers français privés“, précisent les EDT qui interviennent dans 70% des chantiers de sylviculture en France.
L’Office français pour la biodiversité (OFB), considère cette alerte comme “infondée” et voit surtout dans cette communication un exercice de lobbying alors qu’un groupe de travail planche sur la création d’un guide des bonnes pratiques.
“Concilier activité humaine et préservation de l’environnement”
L’office français pour la biodiversité est le gendarme de la nature. Ses agents veillent à l’application du Code de l’environnement. Concerné dans cette affaire de suspension des travaux forestiers : l’article 411-1 dudit code. Il “a pour objectif de protéger des espèces dites sensibles ou en voie de disparition“, explique Patrick Bertrand, directeur régional de l’OFB qui dit chercher à “concilier la nécessaire activité humaine avec la lutte aussi nécessaire de la préservation de l’environnement“.
L’article de loi fixe “l’interdiction de porter atteinte aux espèces sensibles ou menacées, soit directement soit indirectement en détruisant, sous certaines conditions, leur habitat notamment“, décrypte le directeur régional. Ce sont les mêmes finalités que les réglementations de la PAC en agriculture.
Une période sensible, autrefois du 1er avril au 31 juillet aujourd’hui étendue du 15 mars au 15 août marque la période de reproduction durant laquelle les oiseaux, insectes etc… sont particulièrement exposés.
“Il ne s’agit pas de stopper les travaux mais de prendre ses précautions pour veiller autant que possible à ne pas porter atteinte“, invite Patrick Bertrand.
Parmi les bons réflexes :
“Ce qui sera sanctionné, ce sont les négligences volontaires. Dans tous les cas, quand un manquement est observé, l’OFB dresse un PV qui constate l’infraction caractérisée en listant les éléments à charge et à décharge. C’est le procureur qui statue et qualifie les faits en délit ou non.”
Un groupe de travail rassemblant notamment le ministère de la Transition écologique, les autorités scientifiques et les représentants des forestiers planche depuis janvier sur la création d’un code de bonnes pratiques.
“Nous sommes vraiment trop contraints par l’écologie”
Le syndicat professionnel des Entrepreneurs des territoires (EDT) a lancé une alerte presse le 6 avril dernier au sujet de chantiers forestiers à l’arrêt “un peu partout en France“.
Localement, Gérard Maréchal, président des EDT Hauts-de-France, explique : “La Caisse des dépôts et consignations, propriétaire de 300 000 hectares de forêts en France, s’est vue verbaliser pour avoir coupé des arbres qui servaient d’habitat à certaines espèces. Par peur d’être sanctionnés au pénal pour récidive, ils ont choisi d’arrêter les chantiers.” Pour le représentant des entrepreneurs, “compliqué de voir tous les nids en haut des arbres, en général on les découvre une fois l’arbre à terre. Dans ce cas-là, le propriétaire comme l’exploitant sont responsables, tout comme le serait un particulier sur son terrain privé. Personne n’est protégé dans cette histoire. Nous sommes vraiment trop contraints par l’écologie, nous n’arrivons plus à travailler correctement.”
Pour le président régional du syndicat, “les agents de l’OFB arrivent et verbalisent sans se soucier de faire un peu de préventif“.
Gérard Maréchal révèle la tenue d’une réunion mardi 11 avril de la directrice de la Caisse des dépôts et consignations au ministère “où elle aurait été entendue“.
Pour l’entrepreneur, la difficulté à recruter de la main-d’œuvre est aussi une contrainte. “Les hommes sont remplacés par des machines, qui coûtent des centaines de milliers d’euros et qu’il s’agit de payer mais vous les payez comment si vous ne travaillez pas ? On emploie aussi des ouvriers à la tâche qui ont fait des milliers de kilomètres pour venir couper des arbres, ils coupent des arbres.“
Difficultés renforcées par une période d’intervention qui se réduit chaque année. “Les forestiers louent leurs bois aux chasseurs en hiver, période compliquée pour l’intervention des machines par ailleurs. Quand pouvons-nous travailler ?“, interroge le président des EDT Hauts-de-France.
Justine Demade Pellorce
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