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La sécheresse est-elle vraiment derrière nous ?

23-04-2020

Actualité

C’est tout frais

Le Nord vient officiellement de sortir d’une année de sécheresse. L’état des nappes phréatiques est redevenu normal quasi partout, comme celui des cours d’eau. Mais le manque d’eau pourrait nous guetter de nouveau et devenir de plus en plus récurrent. Explications.

sécheresse irrigation © DR
« De manière globale, la recharge des nappes phréatiques semble avoir opéré dans le Nord et le Pas-de-Calais », atteste Adrien Manlay, hydrogéologue pour le Bureau de recherches géologiques et minières. © DR

La pluie et le soleil se jouent des « habitudes » dans le Nord et le Pas-de-Calais et deviennent des trouble-fêtes pour les agriculteurs. Le Nord a ainsi levé, après un an d’alerte, sa vigilance sécheresse le 15 avril 2020. Le Pas-de-Calais l’avait précédé de trois mois.

« De manière globale, la recharge des nappes phréatiques semble avoir opéré dans le Nord et le Pas-de-Calais. Les piézomètres (ouvrages de mesure du niveau des eaux souterraines, NDLR) présentent, pour la plupart, des niveaux supérieurs ou autour de la moyenne de cette période de l’année », atteste Adrien Manlay, hydrogéologue pour le Bureau de recherches géologiques et minières. « À certains endroits, la situation est même meilleure que l’an dernier », ajoute Isabelle Doresse, responsable du service eau, nature et territoires à la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) du Nord.

Néanmoins, cette recharge des nappes a été « tardive et hétérogène, nuance Adrien Manlay. Dans les agglomérations de Lille et de Valenciennes, certains piézomètres sont encore en deçà de la moyenne ». À ces endroits, les nappes étaient tombées à des niveaux jusque-là jamais atteints. Dans le Pas-de-Calais, ils sont globalement supérieurs à ceux constatés avant ces trois dernières années de sécheresse. « Néanmoins, ce niveau de recharge est moindre à l’extrême est du département sur le bassin-versant de la Sensée », note la préfecture.

Des territoires inégaux

Trois facteurs expliquent ces écarts. D’abord, les différences de précipitations. L’ouest de la région a connu une pluviométrie plus importante à l’automne que le centre du bassin. En moyenne, les précipitations annuelles vont de plus de 1 000 mm de pluie sur les hauteurs de l’Artois, qui accrochent des masses d’air océaniques très humides, contre moins de 600 mm en Flandre intérieure et sur le Cambrésis, pour une moyenne régionale de 775 mm de pluie par an, dont 200 mm de pluie efficace (national : 889 mm / 320 mm).

Autre facteur : des précipitations parfois trop intenses. « Les fortes pluies vont avoir tendance à provoquer du ruissellement. L’infiltration et donc la recharge des nappes sont alors limitées », décrypte Adrien Manlay.

Enfin, certaines nappes récupèrent mieux que d’autres en raison de la géologie. « L’augmentation du niveau des aquifères suite à une pluie dépend de la nature et de l’épaisseur du sol, de la nature de la roche… », poursuit l’hydrogéologue. 

La sécheresse, dans le Nord et le Pas-de-Calais, est une situation nouvelle. Riche d’importantes nappes phréatiques, la région n’était jusqu’à présent pas concernée. Mais l’enchaînement de plusieurs années de déficits pluviométriques depuis 2016 a empêché le rechargement correct des nappes et entraîné la prise d’arrêtés de sécheresse et des restrictions ces deux dernières années.

Ces événements mettent en lumière l’interdépendance des territoires face à cette précieuse ressource. L’eau consommée dans le Dunkerquois vient ainsi de l’Audomarois. La métropole lilloise partage, elle, avec la Belgique, une très vieille nappe au nord, qui s’épuise. Face à une population et une consommation en augmentation, la métropole peut compter sur des champs captant plus au sud. « Mais ces forages sont rarement tous opérationnels en raison de pollutions », précise Isabelle Doresse. La métropole pompe ainsi une partie des ressources de la Lys. Autre point de tension : le Valenciennois, à cause de la nature des nappes et des zones humides.

Conséquences multiples

Les conséquences de la sécheresse sont multiples, au-delà du niveau des nappes phréatiques : érosion, salinisation des sols (si les nappes phréatiques d’eau salée remontent avec l’assèchement des nappes d’eau douce près des côtes), approvisionnement en eau potable… « Des communes ont dû distribuer de l’eau potable à leurs habitants l’an dernier », rappelle Isabelle Doresse. Pour sécuriser leur approvisionnement, les producteurs d’eau potable multiplient les demandes de forages. « Mais quels seront leurs impacts, notamment sur les zones humides ?, s’interroge-t-elle. En 2019, on a été très loin pour pomper, irriguer les étangs, sans doute trop pour que les cours d’eau puissent maintenir un niveau écologique et préserver la biodiversité, et de l’équilibre. »

La gestion des canaux s’imbrique dans cette problématique. « Dans le Nord, on a énormément artificialisé les cours d’eau ou des rivières », notamment pour lutter contre les intrusions salées, assainir les zones humides ou évacuer les eaux de ruissellement. « Le système repose sur l’évacuation des eaux vers la mer et le maintien à niveaux des canaux grâce aux nappes phréatiques », poursuit-elle.

Si le niveau des cours d’eau a fortement augmenté cet hiver, « avec le peu de pluie en mars, leurs débits ont déjà été divisés par quatre. Ils ne sont à nouveau pas loin des seuils d’alerte. On pense qu’on pourrait très vite repartir en sécheresse », conclut-elle. D’autant que les éventuelles précipitations à venir risquent d’être captées par la végétation et ne rechargeront plus les nappes. Le Nord et le Pas-de-Calais appellent ainsi déjà à limiter les consommations d’eau.

Claire Duhar

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