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David Gozé est agriculteur depuis 2008. Il a repris l’exploitation familiale à Cappelle-Brouck (59), à quelques kilomètres de Dunkerque. En polyculture sur 95 hectares, il cultive, notamment, la pomme de terre.
Son épouse, Mathilde Gozé, a décroché un diplôme d’ingénieur en agroalimentaire à l’Institut supérieur d’agriculture (ISA) de Lille puis a travaillé dans les secteurs du commerce et du marketing. Elle a souhaité rejoindre son mari sur l’exploitation. Mais pour que ce projet soit viable, il fallait diversifier les activités.
Le couple avait déjà une idée en tête : créer sa propre gamme de chips. Et ce, pour de multiples raisons. « D’abord, c’est un produit qui valorise la pomme de terre », commence Mathilde Gozé, avant de poursuivre : « Nous sommes les premiers exportateurs mondiaux de pommes de terre et les premiers importateurs de chips. Il y a donc clairement quelque chose à faire. »
Et David Gozé, lui, avait un rêve : faire un produit de A à Z, du champ au paquet. Enfin, Mathilde Gozé avait travaillé dans les domaines de la bière et du saucisson, « les chips, ça se marie bien avec tous ça. On reste dans l’univers de l’apéro ! », sourit la jeune femme de 38 ans, lancée dans une aventure loin d’être un long fleuve tranquille.
En janvier 2021, elle profite de son congé maternité pour travailler sur le projet. La marque Chips en N’ord naît. Les deux agriculteurs s’entourent d’une équipe d’étudiants pour lancer une étude de marché et trouver la bonne recette. Une recette qui a évidemment été testée d’abord par leurs proches : « Nos enfants, mais aussi nos familles nous ont donné leur avis. Nos premières chips avaient un goût trop salé. L’objectif de notre chips est de manger de la pomme de terre, la fleur de sel ne doit être qu’un exhausteur de goût, le sel ne doit pas saturer le palais, insiste l’agricultrice. Nous avons donc ajusté afin d’obtenir une chips qui plaît à toutes les générations. »
Leur secret de fabrication ? La variété de pomme de terre choisie pour faire leur chips qui n’est pas une variété classique, mais nous n’en serons pas plus ! Pour le sel, ils se sont tournés vers un producteur indépendant, Le Marais Breteau, en Vendée.
Une fois la recette peaufinée, il a fallu trouver la machine pour fabriquer ces chips, dans « un monde très mystérieux, personne ne dévoile ses secrets… » Le couple fait donc ses recherches sur internet et finit par dégoter la machine idéale. Un investissement financier important pour lequel les Cappellebrouckois ont obtenu des subventions de la Région et de l’Europe. Mais aussi de temps puisqu’il a fallu se former à l’engin, « nous avons eu besoin d’un moment pour l’avoir bien en main, connaître les bons réglages… », indique l’agricultrice.
Cette ligne de fabrication commence par trier les féculents avant de les éplucher et de les laisser tremper dans un bain d’eau afin d’enlever l’amidon. Puis les pommes de terre passent dans une trancheuse qui leur donne leur forme (plus épaisse que des chips industrielles, ndlr) avant d’être cuites dans un chaudron rempli l’huile de tournesol française « à une température plus basse que les industriels, précise Mathilde Gozé, ce qui permet aux chips d’être plus croquantes. »
Elles sont ensuite égouttées longtemps afin d’enlever un maximum d’huile puis salées « juste ce qu’il faut ». Et enfin, un nouveau tri s’opère, à la main cette fois, pour enlever les éventuelles chips avec des défauts. Elles sont ensuite ensachées dans un packaging travaillé. « Il est recyclable, et dessus on y voit le village de Cappelle-Brouck qui a été dessiné par ma belle-mère », glisse Mathilde Gozé.
« L’objectif de notre chips est de manger de la pomme de terre, la fleur de sel ne doit être qu’un
MATHILDE GOZÉ
exhausteur de goût. »
Les chips du couple se trouvent depuis novembre dernier dans près de 150 points de vente de la région. « Nous avons décidé de nous concentrer sur les commerces de proximité, nous faisons les marchés de producteurs aussi, cela nous permet d’aller à la rencontre des clients et d’échanger avec eux sur notre produit. »
Une nouvelle vie dans laquelle la jeune agricultrice s’épanouit pleinement : « Être indépendante me permet de gérer mon planning comme je l’entends et d’avoir une certaine flexibilité pour m’occuper de mes trois enfants. Nous profitons de notre vie de famille. » Une diversification qui a également permis de créer de l’emploi. Avant la confection de chips, il n’y avait que David Gozé qui travaillait sur l’exploitation, depuis c’est entre cinq et six personnes qui lui prêtent main-forte au pic de l’activité.
Une réussite qui devrait en amener d’autres puisqu’il y a quelques semaines, Mathilde et David Gozé ont lancé une nouvelle gamme de chips aux épices de ribs. « Nos clients nous demandaient de nouvelles saveurs. Nous avons donc travaillé avec un expert d’épices, restaurateur sur Arras, pour concocter cette recette, afin de faire une chips au goût original, parfumé mais pas piquant, et qui n’enlève pas la saveur de la pomme de terre. » Et d’autres nouvelles recettes pourraient suivre…
Les chips de David et Mathilde Gozé sont des chips fermières. Un terme auquel le couple est très attaché. « Les chips artisanales sont fabriquées de manière traditionnelle comme son nom l’indique, mais on ne sait pas toujours d’où vient la pomme de terre. Alors que pour les chips fermières, les pommes de terre viennent forcément de l’exploitation. C’est une condition indiquée dans le cahier des charges », insiste l’agricultrice. Chez Chips en N’ord, les chips sont donc confectionnées uniquement avec les pommes de terre du couple Gozé, produites dans les Flandres.
Hélène Graffeuille