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Les Maisons familiales et rurales (MFR) sont des associations dotées de conseils d’administration où siègent, entre autres, des parents d’élèves (50 % des 18 administrateurs en ce qui concerne la MFR de Campagne-lès-Boulonnais). À leurs côtés : professionnels de l’agriculture, maîtres de stages… « L’idée est de constituer une équipe au service de la réussite des jeunes qui va des parents aux professionnels », décrypte Sébastien Hédoux qui précise : « C’est pourquoi nous impliquons beaucoup les parents. Le directeur est lui relativement proche de ses gamins, dans un esprit familial. »
Le directeur, c’est lui : un salarié de l’association qui ne dépend pas du ministère de l’Éducation mais de celui de l’Agriculture et qui rappelle avoir lui-même été formé à ces valeurs.
1958, un groupe d’agriculteurs de la région soucieux de l’avenir des jeunes met ses propres deniers dans leur formation. La plus ancienne Maison familiale et rurale (MFR) du Pas-de-Calais était née à Campagne-lès-Boulonnais, qui accueillait alors une vingtaine d’élèves. Dans les années 1990-2000, c’est le grand virage avec l’ouverture, en plus de l’enseignement agricole pur, de nouvelles formations dans trois domaines : cheval, agroéquipement et commerce.
Sébastien Hédoux, 46 ans, est devenu, en 2017, le sixième directeur après y avoir été élève en filière agricole dans les années 90 (le fils d’agriculteurs songeait alors à reprendre l’exploitation), puis moniteur pendant 10 ans avant de prendre la direction d’autres MFR en Normandie pendant une dizaine d’années. Quand le poste de sa maison familiale et rurale natale s’est libéré il y a six ans, il n’a pas hésité.
La MFR de Campagne-lès-Boulonnais se déploie sur plus d’un hectare composé de prairies mais aussi de bâtiments dédiés à l’accueil et à l’enseignement. Un internat de 140 places où les alternants logent… par alternance ; un atelier pédagogique destiné à la filière agroéquipement de 900 m2 avec diverses machines à réparer (tracteurs, combiné de semis), des outils de soudure ou encore une cabine de peinture ; des salles de cours toutes équipées de tableaux interactifs ; une station météorologique ; une salle de sport dédiée ; un foyer ou encore une salle à manger. D’importants travaux de rénovation ou de construction ont permis de moderniser les lieux, dont les bâtiments les plus anciens datent de 1787.
Les MFR misent avant tout sur l’alternance : les élèves sont plus souvent en entreprise que sur les bancs de l’école. « Les jeunes qui arrivent chez nous ont souvent déjà un projet professionnel et pour les rares qui n’en ont pas en entrant, ils en ont un en sortant. L’apprentissage a longtemps été considéré comme l’école des mauvais élèves, aujourd’hui c’est un vrai choix », plaide le directeur.
Le terme exact de ces établissements est d’ailleurs MFREO pour Maisons familiales et rurales d’éducation et d’orientation, et les niveaux de quatrième et troisième, généralistes, comportent plusieurs stages dans l’année afin de définir ou de conforter le projet professionnel de chaque élève. Tous les élèves en alternance sont internes, c’est une obligation qui vise à inculquer des valeurs citoyennes et de vivre ensemble. « Les jeunes participent notamment à la vie de la collectivité en aidant à la vaisselle ou au ménage, on appelle ça les services », détaille Sébastien Hédoux quelques minutes avant que ne sonnent les douze coups de midi et que les classes se vident et se dirigent vers le couscous au menu ce jour-là.
Des classes qui accueillent chacune la valse d’un élève, de service, qui range et balaie avant de reprendre le cours de sa journée.
Une forte dimension éducative qu’assume le directeur et que recherchent les parents. « Ici le jean troué est interdit, comme le portable qui n’est laissé aux jeunes qu’une heure trente le matin et une heure trente le soir. La cigarette est interdite pour les 4e et 3e aussi, sans oublier l’obligation de la politesse de base, bonjour, merci, au revoir. »
« Nos effectifs sont passés de 270 à 320 élèves, un seuil que nous pourrions difficilement dépasser », détaille Sébastien Hédoux.
« Cette année pour la première fois, nous avons inscrit des élèves sur liste d’attente », précise encore le directeur qui dit ne pas retenir 1 élève sur 15 en moyenne suite aux entretiens d’inscription, « parce que leur profil ou leur projet ne correspond pas ».
Pour accueillir ces élèves dans les meilleures conditions, 800 000 euros de travaux ont été menés ces dix dernières années.
Si l’établissement privé est sous la tutelle du ministère de l’Agriculture et non de celui de l’Éducation, les programmes sont scrupuleusement respectés, et leur nécessaire évolution avec. Ainsi, le BTS APV (agronomie production végétale) est-il devenu le BTS agronomie culture durable : pour que l’école évolue avec son temps.
« Nous visons d’abord à stabiliser les effectifs atteints ces dernières années, en continuant à bénéficier de la notoriété que nous avons à travers la région et jusqu’en bordure de région parisienne », prévient le directeur qui avait eu, à son époque déjà, la possibilité de rejoindre les rangs d’un lycée agricole situé à trois kilomètres de chez ses parents mais qui avait opté pour cette MFR. « Nous devrons aussi réussir à appliquer la réforme des Bacs pros tout en restant à l’affût du territoire et de ses demandes. »
Justine Demade Pellorce