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Si l’eau est un enjeu pour tous, tous les secteurs ne sont pas à la même enseigne. Sur le littoral, globalement plus arrosé, certains territoires ne possèdent pas de réserves en eau souterraine.
C’est le cas du Dunkerquois qui n’a, tout bonnement, pas de nappe phréatique sur laquelle compter.
Une réalité qui rend l’eau de surface d’autant plus précieuse. Or, depuis des dizaines d’années, les précipitations ne sont pas toutes valorisées à leur juste valeur.
C’est dans ce contexte qu’a été décidée, en 2022, la réalimentation du canal des Moëres. Objectif visé : rediriger 300 000 m3 d’eau chaque année dans l’est du Dunkerquois.
Car si l’eau ne manque pas en hiver (on doit même se battre contre, via le réseau de wateringues), c’est une autre affaire en été.
Or ce canal n’était jusqu’ici alimenté que par les précipitations, et l’eau de surface du réseau de canaux territorial pas valorisée avec un surplus qui finissait parfois à la mer.
C’est l’histoire d’un nœud hydraulique appelé les quatre écluses qui n’en compte que trois. Jusqu’ici, car l’écluse du canal des Moëres, fermée il y a une trentaine d’années vraisemblablement en raison de l’abandon de la navigation sur ce secteur, sera restaurée et le cours d’eau raccordé au réseau des canaux de Dunkerque.
Un procédé technique plutôt rudimentaire que les études, puis la phase d’autorisations, mèneront toutefois à un début des travaux en 2025.
Derrière ce projet, une association de gestion créée en 2022 par 16 acteurs du territoire parmi lesquels la communauté urbaine de Dunkerque, la préfecture du Nord, l’agence de l’eau ou encore Coca-Cola europacific partners France, qui dispose d’une usine à Socx, près de Dunkerque, et dont la fondation fait un don de 500 000 euros pour financer, en partie, le projet visant à « protéger, préserver et resituer l’eau ».
Pour une fois que le Coca vient au service de l’eau, on prend.
L’association s’est choisi un petit nom évocateur : Acclimo pour Adaptation aux changements climatiques de l’Oostover (« la zone est » en flamand).
Bertrand Ringot, président de la nouvelle association mais aussi “monsieur eau” pour la communauté urbaine de Dunkerque (le maire de Gravelines est notamment vice-président à l’agglo pour les questions de l’eau et président de l’institution intercommunale des wateringues), rappelle « la nécessité des interconnexions » dans le contexte qui est le nôtre : projet Mageteaux avec les Belges (qui prévoit une maîtrise et gestion transfrontalières de l’écoulement des eaux) ou la projection d’interconnexion d’eau potable avec le Calaisis. L’eau n’a pas de frontière.
Outre le raccordement qui visera à alimenter le canal en eau, il faudra aussi imaginer ce dernier comme un moyen de retenue des eaux quand cela s’imposera.
Et envisager plus globalement l’ouvrage comme un outil de gestion.
« Y compris jusqu’à l’eau de baignade dont la qualité dépend aussi directement de ce qui est fait en amont », rappelle Philippe Parent.
Le directeur de l’institution des wateringues évoque encore la biodiversité, qu’il n’est pas question d’oublier dans la remise en place de la jonction hydraulique, ou, dans un autre registre qui participe à cet écosystème, de « la production future d’eau industrielle pour alléger la pression sur l’eau du milieu naturel ».
À qui va profiter cette eau ? À l’agriculture pour l’essentiel.
« De nombreuses usines, d’agroalimentaire notamment, parsèment le territoire. L’eau apparaît comme une priorité pour assurer un approvisionnement constant », estime Christian Dejonghe. L’ancien agriculteur d’Hoymille est aujourd’hui président de la quatrième section des wateringues du Nord. Il précise : « En maintenant le niveau d’eau, on rendra possible l’irrigation. 5 000 hectares de cultures sont concernés dans le secteur. »
François-Xavier Bieuville, sous-préfet de l’arrondissement de Dunkerque, rappelle « l’importance de l’eau pour le développement économique des territoires » et, dans ce cas concret, « l’importance de l’eau agricole pour des terres du Nord qui comptent parmi les meilleurs rendements nationaux, une terre d’une extrême richesse qu’il faut préserver, un atout stratégique qu’il faut défendre. »
Justine Demade Pellorce
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