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À 45 ans, Alexandre Rigal n’est pas un novice dans le monde des écoles d’ingénieurs. Cela dit, il n’avait pas le profil type pour devenir en juin directeur général de Junia. L’école d’ingénieurs lilloise qui rassemble trois parcours de formations, HEI, ISA et Isen, a en revanche, elle, le profil qui pouvait attirer une personne comme Alexandre Rigal.
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Alexandre Rigal est originaire de Périgueux et naît dans une famille « d’ingénieurs justement ». Mais lui n’est pas attiré par le secteur. « Je n’ai pas eu un parcours très original. J’ai eu mon bac puis j’ai intégré une classe préparatoire option sciences politiques, avec l’idée de passer les concours des Instituts d’études politiques (IEP). » Au moment de passer les concours justement, une chose le guide : « Surtout pas Paris ! J’ai donc passé les concours pour Bordeaux, Toulouse et Lille. Ma préférence allait vers Lille car je voulais devenir journaliste et j’avais en tête la passerelle entre Sciences Po Lille et l’ESJ Lille » (école supérieure de journalisme, ndlr).
Pari gagné, Alexandre Rigal obtient sa place à Lille. Mais, au bout de quelques mois, il se rend vite compte que « le journalisme n’est pas fait pour moi ! Je me prends de passion pour la chose publique… Mais par conséquent rien n’est plus clair ! C’est ça aussi être jeune : rien n’est définitif. »
Alexandre Rigal poursuit donc ses études en les orientant vers le service public. Après un DESS en études stratégiques européennes, il faut travailler. « Le hasard a mis sur ma route une annonce pour un poste d’adjoint à la CDEFI, la conférence des directeurs des écoles françaises d’ingénieurs. » La CDEFI est alors « toute petite. Ils m’ont donné ma chance alors même que je ne cochais aucune case sur le papier : jeune, pas ingénieur… Six mois après j’étais nommé directeur exécutif ».
Tombe alors ce qui deviendra une révolution dans le monde des études supérieures : le tout premier classement de Shanghai*. « C’est un traumatisme pour les écoles et universités françaises qui sont déçues par leur classement qui ne correspond pas à leurs attentes. On a donc à ce moment-là toute une série de réformes qui vont être mises en place et qui structurent encore aujourd’hui l’enseignement supérieur français. Or, en tant que directeur exécutif de la CDEFI, je suis mis à contribution. On est au cœur de la chose publique et mes études deviennent particulièrement utiles à ce moment-là. »
Son profil est remarqué, celui d’un « science-piste » qui peut bousculer un petit peu le monde relativement fermé des écoles d’ingénieurs. « Je suis contacté par Laurent Carraro, alors directeur général d’Arts et Métiers ParisTech. Il a pour projet de créer un bachelor de technologie avec l’idée qu’il existe de supers profils d’ingénieurs mais qui ne sont pas “câblés” pour l’enseignement supérieur. Je crois beaucoup à ce projet. Pour moi, il fallait décloisonner et reconsidérer les bacs technos qui sont de grande qualité en France. J’ai la conviction que c’est aux écoles de s’adapter aux profils. »
Et de rappeler que la France « est un des seuls pays au monde à ne pas parler des études technologiques de façon noble. Si on prend le modèle du MIT aux États-Unis, construite à l’époque sur le modèle de Centrale Paris, c’est devenu une véritable université avec de l’économie, de la techno, de la gestion… On a accepté dans le reste du monde de décloisonner et de croiser les formations. »
Après la création de ce bachelor, il devient directeur délégué aux Arts et Métiers avec pour mission de changer de stratégie marketing et de renforcer les liens avec les industries. « Mais le covid débarque. À sa sortie, je suis embauché par la BPI France comme directeur de développement. Mais rapidement, l’enseignement supérieur me manque. Junia vient alors me chercher et j’accepte le poste. »
Évidemment, au début de sa carrière, Alexandre Rigal souffre du « syndrome de l’imposteur. Théoriquement, je n’ai pas ma place dans ce monde mais j’aime à penser que j’apporte quelque chose à ce modèle. J’ai accepté ce poste car je pense que l’intuition de Junia de regrouper les parcours de formations est une très bonne intuition. On y revient mais ça s’inscrit dans cette idée de décloisonner. »
Cette fois la mission se découpe en trois mots : stabilité, lisibilité et efficacité. « Je souhaite accélérer ce décloisonnement, j’aimerais que lorsqu’on est enseignant ici on ne soit pas étiqueté ISA, Isen ou HEI mais Junia. Et puis, pour les étudiants, je veux que, comme moi, ils puissent se sentir libre de changer d’avis. Mon job, c’est qu’ils puissent construire leur parcours, leur donner un bagage. Mais ce qu’ils en font leur appartient. »
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© Eglantine Puel