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Avec un démarrage au 8 septembre 2023, la campagne de betteraves sucrières n’est ni en avance ni en retard, elle est « aussi précoce que l’an passé. Donc elle est relativement en avance mais on s’aligne sur l’ouverture des sucreries », explique Guillaume Wullens, président de la confédération générale des planteurs de betteraves (CGB) du Nord-Pas de Calais.
Autrement dit, c’est un peu tôt dans la saison mais pas le choix. Les arrachages ont donc débuté pour quelques agriculteurs, tout en sachant pertinemment que « les rendements seraient médiocres ». Cela dit, les prix du marché et les indemnités de début de campagne revues à la hausse devraient compenser ce manque à gagner.
Si l’on rembobine un peu la cassette, la campagne 2023 avait mal débuté avec des semis tardifs. « La fin des semis est arrivée mi-mai. C’est tard ! Et en enlevant en septembre, on sait qu’il y a peu de possibilités de rattrapages. Pour cela il faut du temps. » Résultat, des rendements à 70 tonnes par hectare. Mais c’est surtout la richesse en sucre qui est très moyenne : « On arrive péniblement à 16,5 % de richesse, ce qui est vraiment peu en début de campagne. Normalement on est plutôt autour de 17,5 % », explique Guillaume Wullens.
Cela dit, les conditions d’arrachages sont bonnes et, comme le dit Guillaume Wullens : « Même si on arrachait plus tard, ce serait un peu mieux mais pas beaucoup mieux. Le potentiel a été faussé de toute façon avec les semis tardifs. » Pour autant, à la même période l’an dernier, les rendements étaient de sept à huit tonnes supérieurs à l’hectare à ceux de cette année.
Autre constat cette année, la forte présence de cercosporiose, une maladie du feuillage qui semble s’installer. « Il faudra donc prévoir pour 2024 des passages de fongicides en amont. »
Côté jaunisse, le Nord-Pas de Calais n’a pas vraiment été touché. En revanche, « le sud-ouest de Paris a subi une attaque importante contre laquelle les agriculteurs n’ont pas pu faire grand-chose. Avec la fin des néonicotinoïdes, on est un peu coincé pour le moment. Mais un nouveau Plan national de recherche et d’innovation (PNRI) arrive pour succéder au premier et devrait durer trois ans. Il devrait permettre de mettre en application ce qui a été observé pendant le PNRI “1”. On espère donc que d’ici trois ans, on aura des solutions. »
Sur les 60 000 hectares de betteraves sucrières implantées dans le Nord-Pas de Calais, à date, environ 15 % ont été arrachés. « Notamment du côté de Lillers puisque c’est la première sucrerie qui a lancé la campagne. »
Si les débuts de campagne arrivent de plus en plus tôt, c’est parce que les sucriers souhaitent finir plus tôt. Objectif : 15 janvier. Soit une campagne de 125 jours. « Dans le Nord-Pas de Calais, on travaille principalement avec Tereos. Ils ont réévalué les indemnités de début de campagne ainsi que celle des retards d’enlèvements cette année, justement pour inciter à cet arrachage précoce dans la saison. Ils ne veulent pas finir tard car pour eux, comme pour nous, cela implique d’autres problèmes de logistique ou de stockage. »
Ce dispositif d’arrachage précoce avait été mis en place lors de la précédente campagne, face à une situation énergétique et géopolitique compliquée. Reconduit cette année, le dispositif s’est accompagné d’une revalorisation du prix d’achat pour la précédente campagne (2022-2023), à 43,10 € la tonne.
Des prix intéressants et qui devraient être du même ordre pour cette campagne 2023-2024. Mais attention, prévient Guillaume Wullens, « il ne faudrait pas inonder le marché de sucre. On sent que certains sont tentés d’augmenter leurs surfaces de betteraves sucrières pour profiter de ces prix. Mais il faut rester raisonnable ».
Ce que craint le président de la CGB Nord-Pas de Calais, c’est un scénario façon campagne 2017-2018 où le marché européen avait été submergé de sucre ce qui avait fait chuter les prix.
« Aujourd’hui, des contrats sont proposés. Il faut respecter ces contrats avec les surfaces suggérées pour continuer à avoir des bons prix. » D’autant que sur la scène internationale, l’Ukraine devrait pouvoir exporter près de 600 000 tonnes de sucres et que la campagne de l’hémisphère sud reste mystérieuse (lire aussi notre édition du 18 août). « Notamment en ce qui concerne le marché de l’éthanol, la grande inconnue c’est le Brésil. Il est donc important de rester prudent. »
Enfin, Guillaume Wullens le rappelle, « avec la fermeture d’Escaudœuvres, de toute façon pour le Nord-Pas de Calais, il y aura une limite industrielle ».
Parallèlement, la CGB est entrée en négociation avec Tereos et le SNFS (syndicat national des fabricants de sucre) sur les accords interprofessionnels. Pour le moment, « c’est statu quo ».
Eglantine Puel