Votre météo par ville
Que se passe-t-il dans la région en novembre pour le mois de la bio ?
On a décidé de favoriser les échanges entre le sud et le nord de la région. L’idée est de faire connaître les territoires qui s’engagent vers des transitions. La transition ne pourra être que globale.
Le programme est à découvrir ici : Le mois de la bio
Les derniers chiffres en région sont parlants: le cap des 1 000 exploitations bio, soit 3,8 % des fermes régionales, a été franchi. Les Hauts-de-France sont-ils en train de rattraper leur retard ?
Toutes les régions continuent à évoluer. Il y a encore beaucoup de travail. On est content car cela bouge mais on est encore loin d’atteindre un chiffre d’équilibre. Il y a encore un vrai besoin de rénovation du modèle agricole, pour la santé des sols mais aussi pour la nôtre. Aujourd’hui, on nourrit nos animaux avec des aliments qui viennent de l’autre côté de l’Atlantique, est-ce raisonnable ? Doit-on continuer comme ça ou faut-il changer quelque chose ? Il n’y a d’ailleurs pas que l’agriculture qui est concernée, il faut aussi trouver de nouvelles façons de voir les choses dans le transport et dans l’industrie, par exemple. On est capable de le faire, il faut le vouloir.
Le bio connaît un véritable changement d’échelle et certains acteurs craignent une industrialisation de la filière…
L’industrie n’est pas un gros mot. L’agriculture biologique doit s’industrialiser d’une certaine manière. Il faut un gros sursaut car la terre est en danger mais ne tombons pas dans les erreurs du passé avec une hyper industrialisation. Par exemple, nous avons signé une pétition contre les serres chauffées car nous y sommes opposés. Même si les serres sont chauffées au biogaz. Ce qu’on préconise, c’est de coller au rythme des saisons. Il n’y a aucun intérêt à manger des fraises ou des tomates en hiver. Quand on perturbe les équilibres, les terres deviennent de moins en moins productives. Si on change, il faut qu’on change bien. Par ailleurs, nous avons perdu le pouvoir de décision sur nos fermes dans le conventionnel, et ce sera pareil dans le bio si on n’y fait pas attention.
Comment les agriculteurs peuvent-ils retrouver ce pouvoir de décision ?
Il faut qu’ils s’investissent. Je ne travaille pas pour un marché, je travaille pour un consommateur : il faut donc revenir à des produits simples. Il faut recréer le lien avec les filières de l’agroalimentaire. Il faut un lien de partenariat, pas de dépendance. Dans le bio, on travaille à cela. On n’a pas envie d’être dépendants des aides, on peut faire autrement.
Et la distribution dans tout ça ?
Il faut discuter avec tout le monde. Si la GMS (grande et moyenne surfaces) respecte mon produit et est dans une démarche de qualité comme la mienne, il n’y a pas de soucis. Je reste persuadée que dans ce milieu il y a des gens qui veulent faire changer les choses. Et tout cela se fera aussi avec les consommateurs.
Comment rendre le bio accessible à tous, tout en ayant un prix rémunérateur pour le producteur ?
Cela coute moins cher d’acheter des produits bruts que des produits transformés ; la problématique, c’est surtout la malbouffe. On mange trop et trop de viande. Il est donc important aujourd’hui de travailler avec la restauration collective, avec les jeunes enfants notamment, pour apporter aux gens la compréhension de ce qu’ils mangent. Ce n’est pas compliqué de cuisiner, c’est une question d’organisation et de savoir-faire. Mais aujourd’hui les enfants sont habitués à manger des pizzas et des plats tout faits. Il faut une rééducation.
Pour les familles en réelle difficulté, la filière a lancé le projet P.A.N.I.E.R.S. : l’idée est de les accompagner de cours de cuisine, et pas seulement avec les mamans comme c’est souvent le cas. C’est un travail en profondeur, bien sûr. Ce n’est pas juste en s’adaptant qu’on y arrivera, c’est en faisant une révolution.
Côté producteur, en général on vend ce qu’on veut bien nous acheter ! En bio, on a la chance de pouvoir choisir les prix car il n’y pas encore assez d’offre. À Bio en Hauts-de-France, on a à cœur de former les agriculteurs sur le prix de revient pour qu’ils prennent conscience qu’il y a un prix en dessous duquel il ne faut pas vendre. Je pense qu’on a pu prouver à nos collègues qu’on pouvait bien vivre sur une ferme bio, et vivre heureux.
Qu’en est-il de l’image du bio auprès des consommateurs ?
Je n’hésite jamais à dire que mes produits bio, je les traite aussi, avec des produits autorisés en bio, bien sûr.
Les produits bio sous plastique en magasin c’est pour la différenciation mais on va trouver des alternatives, comme le tatouage des légumes par exemple. Mais il faut faire attention : l’emballage ce n’est pas l’agriculteur, c’est la GMS.
Il faut aussi que le consommateur comprenne que tout est en mutation, il qu’il doit donner son avis. S’il veut que ça mute comme il veut, il doit participer. Dans notre conseil d’administration, on voudrait aussi une association de consommateurs, il y a une place pour ça !
Propos recueillis par Laura Béheulière