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Xavier Hollandts est le co-auteur de l’étude « Pour une gouvernance stratégique des coopératives agricoles », publiée en 2017. Pour lui, c’est aux coopératives d’animer le territoire et d’impliquer les agriculteurs dans la prise de décisions.
En 2017, vous écriviez « il fallait redonner le pouvoir aux agriculteurs coopérateurs ». Qu’en est-il deux ans plus tard ?
Ce constat est d’autant plus valable en 2019 puisque nous avons continué nos études auprès de différentes coopératives. On note toujours des dérives de la part de certaines coopératives : soit les dirigeants tentent de se passer des agriculteurs coopérateurs, soit on remarque une collusion entre certains administrateurs et les représentants de la direction.
Toutefois « l’affaire Tereos » a marqué de nombreux dirigeants de coopératives. Le fait que certains adhérents cherchent à renverser la gouvernance de leur coopérative questionne beaucoup. Cela a conduit à une remise en cause des pratiques et des acteurs pour une grande partie du monde coopératif.
Avant d’en arriver là, le véritable danger pour les coopératives qui se couperaient de leur base, c’est qu’elles ne répondent plus aux besoins de leurs adhérents. Par ailleurs, si les coopératives ne répondent plus aux mécanismes de base, elles risquent de se retrouver sous le feu des projecteurs. Les adversaires des coopératives n’hésitent pas à discuter de la remise en cause des avantages fiscaux qu’ils leur sont accordés.
La taille, la localisation, les productions des coopératives sont-elles responsables du manque de mobilisation des adhérents ?
Certaines coopératives possèdent jusqu’à 500 filiales, ce qui ne facilite pas la compréhension. Mais cela ne doit pas être une fatalité, ni une excuse pour se dérober ou ne plus faire confiance. La taille agit comme un épouvantail. Une coopérative plus importante va devoir effectuer plus d’efforts, investir davantage dans sa relation avec les adhérents et la gérer différemment. Certaines font l’effort de créer des dispositifs pour avoir une relation directe avec leurs adhérents.
Pas besoin d’être une grande coopérative pour se priver de ses adhérents. Il suffit de ne pas organiser de formation des administrateurs et de n’engager aucune compensation financière du temps que les administrateurs consacrent à leurs responsabilités.
La localisation va avec le type de production et lorsqu’une filière fonctionne correctement, forcément, la coopérative va bien. Cela dépend également du temps que peut consacrer l’adhérent à sa coopérative.
Il faut noter que la société dans laquelle nous vivons nous rend davantage individualiste. Toutefois, cet aspect n’est pas préjudiciable pour les coopératives, puisque les jeunes agriculteurs se sont posés la question de leur adhésion dès l’achat de parts sociales, souvent par refus des choses automatiques. Une démarche que leurs aînés n’ont pas forcément faite. Leur adhésion est davantage remise en cause mais lorsqu’un jeune va à la coopérative, il y adhère vraiment et devient beaucoup moins passif que ses prédécesseurs. La coopération est moins acquise qu’avant.
Quelles sont les pistes pour impliquer de nouveau les agriculteurs ?
Les coopératives se doivent de renforcer la vie mutualiste. Pour cela, elles doivent être représentées sur le terrain via leurs élus mais aussi leurs employés. Elles doivent davantage communiquer sur leurs activités par le biais de newsletter par exemple. Les coopératives doivent animer la vie territoriale en réunissant leurs adhérents pour des réunions, en organisant des points d’étude, des voyages d’études. Quand un agriculteur a l’impression que sa coopérative fait des choses pour lui, le lien est renforcé.
L’autre aspect est vis à vis des élus. Ces derniers doivent être formés dès leur arrivée afin de comprendre pleinement les enjeux financiers et économiques. La coopérative doit anticiper le recrutement de ses élus et posséder un vivier de futurs administrateurs. Dernier point qui facilite l’implication des agriculteurs dans leur coopérative, ce sont les indemnités. La coopérative doit se donner les moyens financiers pour indemniser le temps que les élus ne passent pas dans leur ferme.
Propos recueillis par Lucie Debuire