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Nous avons posé trois questions à Mathieu Hébert, apiculteur à Hoymille à la miellerie de Zyckelin et adhérent d’ADA France, au sujet des fraudes confirmées par une enquête sur les miels importés.
Quelle est votre réaction suite à la publication des résultats de l’enquête pour fraudes en tant qu’apiculteur ?
Ce ne sont pas des chiffres surprenants. Ce qui l’est, ce sont les proportions de miel frelaté qui sont beaucoup plus importantes que lors de l’enquête précédente.
L’avantage de cette nouvelle enquête est qu’elle a pu mettre en avant des fraudes grâce à des moyens techniques nouveaux, dont ils ne disposaient pas sur l’enquête précédente.
Cela confirme que le miel est l’un des produits les plus fraudés. C’est vrai pour l’huile d’olive, c’est vrai pour le kiwi… Et notamment quand on analyse les résultats des miels achetés et destinés au marché international, dont la France.
Alors, sur les chiffres, la moitié des échantillons sur à peu près 300 (320 ndlr), sont considérés comme soit altérés, soit faux, avec du colorant, du sirop de sucre. Ce sont des pratiques courantes dans la fraude.
Il y a une autre fraude dont on parle moins mais qui aurait été également intéressante : la fraude à l’étiquetage. En gros, je suis négociant ou apiculteur, j’achète du miel à quelqu’un d’autre ou à l”étranger et je le mets dans mon pot avec mon étiquette.
C’est du vrai miel, mais je laisse entendre au consommateur que c’est moi qui l’aie produit, alors que je n’ai fait que le mettre en pot… D’où l’importance pour le consommateur de bien se fier à l’étiquetage.
Si c’est marqué « récolté et mis en pot », en théorie, c’est récolté et mis en pot par le producteur.
Si c’est juste marqué mis en pot, le doute est permis…
Alors, ce sont des petites fraudes, les services des fraudes s’intéressent à ces sujets-là, mais ils manquent de moyens. C’est vrai pour la grande fraude ou la petite.
Comme InteRapi, on est plusieurs à trouver judicieux qu’on accorde un peu plus de moyens aux services de fraudes. Ils ont perdu pas mal d’agents et moyens d’enquête au niveau national…
Cette étude montre aussi la difficulté pour les services des fraudes à remonter la filière. Tu peux avoir un miel d’Amérique du Sud qui arrive en Espagne, il est mélangé à d’autres, hop, magiquement, il devient un miel européen. Puis il est transporté en Allemagne, gros pays importateur de miel… Malheureusement, Chine, Turquie… Ce sont des pays connus pour des gros volumes de miel et donc de miel frelaté aussi.
Le miel, c’est un produit qui voyage beaucoup, qui se conserve bien et qui est donc tout à fait propice aux échanges internationaux et à la fraude qui va avec.
Cette question, en tant que producteur de miel, y êtes-vous particulièrement sensible ?
Oui. C’est un drame et c’est un bon point. C’est un drame parce que l’essentiel du miel consommé en France est d’abord du miel importé. On consomme beaucoup plus de miel en France qu’on en produit, donc mathématiquement, on est obligés d’en importer.
Mais c’est aussi un bon point pour ceux qui se lancent dans la vente directe ou dans la vente en vrac ou auprès de négociants sérieux, c’est un gage de qualité.
Les consommateurs sont beaucoup plus sensibles à ces questions-là. Ici, on vend beaucoup en direct et en semi-direct, et on l’entend beaucoup dans la bouche du consommateur : « On vient chez vous parce qu’on sait comment c’est fait. »
En raison des conditions météorologiques, la récolte semble prendre du retard cette année. Est-ce inquiétant ?
On a un petit peu de retard par rapport à l’année dernière, mais chaque année est différente.
La végétation n’est pas tout à fait épanouie, les champs de colza fleurissent à peine. C’est un peu variable selon les territoires, tous les collègues ne voient pas la même chose selon les endroits.
Donc on n’est pas inquiets, mais vigilants. La situation n’est pas dramatique. Si on a du soleil dans les 10, 15 jours et de manière à peu près stable, on fera du miel.
Propos Recueillis Par Kévin Saroul
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