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Aujourd’hui, lorsqu’on parle d’huile, on pense généralement à celle de l’olive et au sud. Pourtant le Nord-Pas de calais était, jadis, une terre de fabrication d’huile.
« Après la Révolution, le Nord-Pas de Calais était une région oléicole. L’apogée des tordoirs (ndlr : moulins qui fabriquaient les huiles) date de 1840. Nous étions une terre d’huile, assure Thomas Defive. Une bibliographie historique assez riche en atteste. Nous avons un vrai passé oléicole dans la région et je souhaite revaloriser ce patrimoine historique. »
Il y a un an, cet ingénieur agricole de formation a donc décidé de se lancer dans la fabrication d’huile. Il a ouvert l’huilerie d’Artois, dont l’atelier se situe à Berles-Monchel (62), entre Arras et Saint-Pol-sur-Ternoise.
Thomas Defive a débuté sa carrière en travaillant pour des entreprises de semences, « en tant que fournisseur. J’échangeais avec les agriculteurs, mais j’intervenais en amont. Depuis plusieurs années, je souhaitais passer de l’autre côté de la barrière. Je voulais valoriser leur production. »
C’est lorsqu’il est devenu papa que Thomas Defive a décidé se lancer dans la fabrication d’huile.
« Avec ma femme, qui est pédiatre, nous mettions de l’huile dans tous les plats de nos enfants, surtout de l’huile de lin qui est très riche en oméga 3, pour leur intérêt nutritionnel. »
À 36 ans, le jeune homme démissionne et va apprendre son futur métier pendant un mois à Bordeaux.
« Il n’y a pas de formation spécifique pour devenir huilier, mais l’Institut des corps gras et produits apparentés (ITERG) accompagne dans cette démarche. »
De retour dans le Nord-Pas de Calais, Thomas Defive s’entoure de sa famille pour se lancer dans l’aventure. Il s’associe avec son père, Jean-Pierre, et s’installe sur l’exploitation agricole de son beau-père et de son beau-frère, Jacques et Alexandre Brisset, basée à Berles-Monchel.
« J’avais à cœur de monter une entreprise familiale et de m’insérer sur mon territoire. »
En avril 2022, L’huilerie d’Artois est née. Jacques Defive s’occupe plus particulièrement de la partie production, pendant que son fils, lui, gère la partie commercialisation.
L’ambition de Thomas Defive est de fabriquer une huile locale.
« 100 % des matières premières qui servent à faire nos huiles sont issues de la région des Hauts-de-France, tout est cultivé à 100-150 km autour du siège de l’huilerie. »
On ne trouve donc pas d’huile d’olive chez Thomas Defive mais de l’huile de courge, de tournesol, de lin, de chanvre, de colza, ou encore de caméline.
Et pour fêter le premier anniversaire de L’huilerie d’Artois, Thomas Defive a souhaité marquer le coup en sortant une huile de noix 100 % artois.
« Nous voulions un projet qui puisse impliquer tous les acteurs de notre territoire. Beaucoup de personnes possèdent un noyer dans leur jardin, nous leur avons proposé de nous vendre leurs noix ou leurs cerneaux de noix. Près de deux tonnes ont ainsi été récoltées pour être transformées en huile », explique-t-il.
Une huile qui a été baptisée la « cuvée Colette », en hommage à la grand-mère de l’huilier. « Elle a toujours été d’un grand soutien pour moi. Et elle a donné beaucoup de son temps pour décortiquer les noix », sourit Thomas Defive.
Les huiles de L’huilerie d’Artois sont des huiles vierges pressées à froid.
« C’est-à-dire que l’extraction est mécanique, il s’agit d’une vis qui va compresser les graines afin d’obtenir le fameux liquide. Le rendement est moindre que pour les huiles raffinées, dont l’extraction se fait par solvant. Mais cela permet de préserver la qualité nutritionnelle ainsi que le goût. »
Thomas Defive travaille pour les agriculteurs en prestation à façon.
« Ils viennent me déposer leurs graines, je les transforme en huile et ils repartent avec pour la vendre eux-mêmes ».
Mais il a aussi développé ses propres marques : « Nous avons Oléo, pour les huiles de goûts, L’huile d’Artois, un mélange d’huiles de caméline, de lin et de tournesol, que l’on utilise davantage pour ses qualités nutritionnelles et enfin O’tordoir pour les huiles qui sortent davantage de l’ordinaire comme celles infusées à l’ail ou encore au houblon », détaille-t-il.
Des huiles que l’on peut retrouver dans les épiceries fines mais aussi dans les grandes et moyennes surfaces comme Intermarché ou Leclerc ainsi que sur les marchés d’artisans-producteurs.
Une autre des priorités de Thomas Defive est d’avoir une production écoresponsable. C’est pourquoi 100 % de ce qui entre dans son atelier est valorisé.
« Une tonne de graines permet de fabriquer environ 350 litres d’huile et 650 kilos de tourteau. Ses résidus solides issus de l’extraction de l’huile des graines ou des fruits oléagineux partent pour l’alimentation animale », souligne l’huilier.
Les Hauts-de-France ont été labellisés Région européenne de la gastronomie 2023, et l’huilerie d’Artois est l’une des ambassadrices de cet événement.
« Cela nous a ouvert les portes de certains restaurants, s’enthousiasme Thomas Defive qui ne manque pas d’idées pour développer son entreprise. Nous souhaitons également nous attaquer au marché de la restauration collective, dans les établissements scolaires notamment. C’est notre objectif pour 2023 ! »
Hélène Graffeuille
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