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L’agneau pascal. Il y a encore quelques années, il était impensable de ne pas trouver d’agneau sur sa table le lundi de Pâques. Mais aujourd’hui, si l’agneau reste une viande de choix pour cette fête, elle n’est plus l’évidence même.
À Linselles, dans le Nord, Xavier Lefebvre produit de l’agneau depuis 10 ans sur son exploitation. Il est la septième génération installée sur la ferme Sainte-Barbe. « Au début, notre ferme était une ferme très traditionnelle et puis, depuis trois générations maintenant, elle s’est spécialisée dans l’élevage de porcs (70 truies), dans un premier temps. Quand je me suis installé il y a 10 ans, j’ai importé l’activité agneaux et brebis (300 brebis environ soit à peu près 700 agneaux par an) car ça m’a toujours intéressé. Depuis fin 2022, on a ajouté un peu de pisciculture. J’aime avoir une diversité d’activités et créer la différence », raconte le quarantenaire.
Au départ, « cette activité agneaux et brebis a été difficile car les cours ne suivaient pas. Aujourd’hui, ça va beaucoup mieux, le marché est porteur ».
Au-delà de cette diversité d’activité, la ferme Sainte-Barbe a également un atelier de transformation et une boutique de vente directe : « Ça va de la simple découpe au service traiteur. 15 salariés sont dédiés à cette activité commerciale et moi je suis seul sur l’exploitation. On travaille également avec la restauration et on fait quatre marchés par semaine. » Une diversité de débouchés qui permet à l’entreprise une certaine indépendance et sécurité car « si pendant le covid, les gens faisaient la queue devant la ferme pour venir acheter nos produits, aujourd’hui ce n’est plus du tout le cas. On a gagné quelques clients dans la bataille… C’est assez frustrant. Heureusement qu’on a le reste. »
La boutique revend également de la viande bovine issue du Gaec Frémaut Delannoy de La Chapelle-d’Armentières (59) et de la volaille de l’établissement Pollet, situé au cœur des Flandres.
Pour cette semaine de Pâques, Xavier Lefebvre a bien prévu un pic de commandes : « Généralement, elles doublent par rapport à une semaine standard. » Mais cela s’arrête là. Rien à voir avec la situation d’il y a dix ans où « Pâques était vraiment un moment important dans l’année ».
Aujourd’hui, l’agriculteur est formel « je vends autant d’agneaux à Noël qu’à Pâques ». En fait, « la consommation s’est lissée sur toute l’année. Il n’y a plus de moments clés pour manger de l’agneau. On en vend également beaucoup l’été pour les barbecues ».
Cela dit, « on arrive à tout vendre ici. Il n’y a pas de morceaux qu’on a du mal à vendre car les salariés accompagnent les clients. Souvent les gens arrivent avec une idée en tête mais on va les réorienter. Il n’y a pas de gâchis et c’est à ça aussi que sert le service traiteur car les gens ne savent pas toujours comment cuisiner certains morceaux. »
De fait, il faut donc une organisation permettant d’avoir des agneaux à l’année. « Il y a des trous c’est obligé, mais on essaye de pouvoir répondre à la demande le plus possible. Cette année, on aura un manque probablement un peu plus tôt que d’habitude car j’ai dû décaler la reproduction en raison de la sécheresse de l’été 2022 », explique Xavier Lefebvre. Classé HVE, l’éleveur est en autoconsommation totale (55 ha de polyculture) mais ça n’a pas suffi.
En effet, ayant dans son troupeau des races rustiques, l’éleveur utilise la technique du flushing : augmenter la ration alimentaire juste avant la saison des amours pour que les brebis ovulent plus. Cette période s’étend du 14 juillet au 31 décembre. « Généralement, j’essaie de faire ça au milieu de l’été. Mais avec la sécheresse, je n’avais pas assez de nourriture pour le faire. J’ai donc dû décaler de deux mois ». D’où le possible manque d’agneaux un plus tôt que prévu après Pâques.
Eglantine Puel
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