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Guillaume E. Lopez se définit comme un « passionné de nature ». « Le vivant » est ce qui l’anime depuis toujours.
À 5 ans, quand ses camarades de classe faisaient du foot, Guillaume E. Lopez apprenait à confectionner des compositions florales et s’occupait de son potager. À 9 ans, sa mère lui offre un aquarium d’eau de mer. « Le plus beau – et le pire ! – cadeau de ma vie, explique-t-il, cela m’a poursuivi jusqu’à mes 18 ans ». Car s’il s’émerveille devant cet écosystème marin, il se rend aussi compte de la difficulté de maintenir tout ce petit monde en vie à l’aide des principes comme la photosynthèse, la prédation, les équilibres chimiques, mais aussi la symbiose (ndlr : association biologique, durable et réciproquement profitable, entre deux organismes vivants). Au fil des années, avec cet aquarium, le jeune garçon découvre que « le vivant est sous-tendu par d’invisibles forces, par des petits organismes qui résistent à notre perception humaine ».
Une fois son bac sciences et technologies de l’agronomie et du… vivant (STAV) en poche, il entre en faculté de biologie. Mais c’est une autre passion qui l’amènera vers le monde des champignons : le Japon, pays dans lequel il se rendra et où il effectuera plusieurs woofings (immersion dans des fermes biologiques du monde, ndlr). Il s’intéresse alors à la permaculture, à la philosophie asiatique notamment au travers du livre La Révolution d’un seul brin de paille de Masanobu Fukuoka sur l’agriculture naturelle. « J’ai découvert la symbiose mycorhizienne (ndlr : association entre un champignon et une plante). Jusque-là je pensais que les champignons étaient une chasse gardée, qu’il fallait avoir des connaisseurs autour de soi. Il y avait cet a priori qu’avec les champignons, on n’a pas le droit à l’erreur ! »
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Guillaume E. Lopez découvre que les Asiatiques ont une tout autre approche du champignon que nous : « Sur les étals au Japon, il y en a des dizaines, beaucoup plus que chez nous. Les médecines chinoise et ayurvédique sont mycophiles. La Chine est le plus gros producteur de champignons au monde. Ces cultures sont plus enclines à aimer le champignon. » Et de prendre pour exemple Mario, célèbre personnage du jeu vidéo japonais : « Lorsqu’il prend un champignon, il grandit, gagne en force », sourit-il. « En Europe, nous nous sommes déconnectés de cela. En France, l’usage médicinal des champignons s’est perdu avec la chasse aux sorcières. Les formations de mycologie sont très rares… »
C’est donc de manière autodidacte que le jeune homme se forme. Et pour lui, aucun doute : les champignons jouent un rôle clé dans nos écosystèmes : « Ils peuvent en être le frein ou l’accélérateur, ils y créent du lien, c’est un peu le système nerveux de notre planète. Ils façonnent en permanence les sols, le climat et même les océans. En un mot : la vie sur Terre. »
Il est donc essentiel pour l’Homme, « sans champignon, la vie ne se manifesterait que sous forme de bactéries. Nous n’aurions pas de quoi manger, pas de quoi respirer ou alors difficilement… Notre planète n’aurait rien à voir avec ce qu’elle est aujourd’hui si les champignons n’étaient pas là. Sans eux, l’Homme ne serait pas là. »
Et il découvre que les champignons peuvent avoir des pouvoirs extraordinaires. « Certains sont capables de se développer dans le corps d’un insecte pour l’emmener là où il pourra fructifier, d’autres ont pris possession d’un robot et ont appris à se mouvoir… , énumère Guillaume E. Lopez. Cela donne des perspectives intéressantes d’autant qu’on estime la diversité fongique autour de 6 millions d’espèces et on n’en connaît que 200 000, c’est ridicule ! »
Un champ des possibles dans lequel Guillaume E. Lopez s’est donc plongé. En 2021, il ouvre sa société Provivant avec un leitmotiv : « Santé des consommateurs, santé des écosystèmes, santé des producteurs ». Il y commercialise des compléments alimentaires à base de… champignons.
En parallèle, il se lance sur les réseaux sociaux sous le pseudo zenno.nature. « J’ai une âme de pédagogue, c’était important pour moi de partager, de créer une communauté afin d’échanger sur notre vision du monde vivant… » Et la magie des réseaux sociaux fait que son compte va « décoller » à la suite d’une vidéo postée en novembre 2022. « Lors d’une balade, je suis tombé sur un Hericium Erinaceus, un champignon qui a le vent en poupe dans les industries de compléments alimentaires, les Japonais l’étudient pour ses propriétés neurostimulantes afin de contrer la maladie d’Alzheimer. Il est assez rare en Europe. J’ai donc décidé de montrer ma découverte sur Instagram. » La vidéo cartonne. « C’est finalement cela qui a lancé le compte et je me suis dit à partir de là qu’il fallait que je crée régulièrement du contenu. »
Aujourd’hui, zenno.nature comptabilise plus de 218 000 followers. Un succès qui l’a poussé à écrire son premier livre sur le monde fongique intitulé Le génie méconnu (et discret) des champignons qui vient de sortir en librairie (lire ci-dessous). Son objectif : faire découvrir les pouvoirs extraordinaires des champignons et l’intérêt de l’Homme à s’y pencher !
Les champignons sont partout autour de nous… Mais que savons-nous d’eux ? Chefs d’orchestre de notre écosystème (sans eux, pas de vie sur terre !), « êtres » de réseaux et de résilience, réservoirs de molécules médicinales, ils ne cessent de surprendre et de nous inspirer. Saviez-vous que : les champignons parlent un langage électrique, que grâce à eux le désert peut refleurir, que le mycélium s’apparente à un microprocesseur vivant, qu’ils façonnent en permanence les sols, le climat et même les océans. En un mot : la vie sur Terre. Les champignons nous inspirent dans des domaines aussi variés que l’ingénierie, la logistique, la chimie et la médecine. Entrez dans le monde mystérieux des champignons. avec Guillaume E. Lopez, mycologue et biologiste passionné.
Le génie méconnu (et discret) des champignons, de Guillaume E. Lopez, aux éditions Albin Michel, 240 pages, 17,90 €.
Hélène Graffeuille