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« La résilience, c’est se dire qu’aujourd’hui, on doit dépasser les logiques d’optimisation pour être plus ambitieux en allant vers la transformation des pratiques actuelles de l’agriculture », introduit Isabelle Matykowski, directrice adjointe de l’agence de l’eau Artois Picardie (AEAP), le 30 mai dernier, quelques instants avant l’ouverture d’un colloque autour de la question eau.
C’est donc « pour se préparer collectivement à une agriculture résiliente », poursuit-elle, que plusieurs institutions se sont unies en 2021.
Cette année-là, la chambre d’agriculture réunit les représentants des filières agricoles dans le cadre d’un projet qui prendra le nom de Clim’eau fil. L’objectif principal est d’accompagner le monde agricole du bassin Artois Picardie à l’élaboration de trajectoires d’adaptation au changement climatique, « pour le futur proche » (2030-2050), qui soient compatibles avec la quantité et la qualité de la ressource en eau, dans une démarche de co-construction avec les filières.
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Pour la première phase encore en cours, l’heure est à l’état des lieux, à dresser avant toute chose. Puis viendra la seconde phase, celle de la construction d’une vision pour le système agroalimentaire, où il faudra aller « au-delà de la zone de confort », nous dit-on. Enfin, viendra la troisième phase, le temps des plans d’actions et des feuilles de route.
Revenons à la première étape, qui devrait couler jusqu’en fin d’année. « Qualifier et quantifier les besoins en eaux et affiner les indicateurs à l’échelle locale », détaille Emmanuel Leveugle, qui porte le dossier côté chambre d’agriculture. Quinze filières ont été scrutées : ce qui est fait, ce qui reste à faire, ce qui est attendu. « On veut montrer que le rôle de l’agriculture est essentiel dans l’économie rurale et locale », appuie Emmanuel Leveugle. « Et l’eau, un bien précieux et commun », renchérit Laurent Degenne, à la tête de la chambre régionale. L’élu veut garder en tête le rôle économique des productions régionales, « leader en agro-industrie, ce qui oblige à réfléchir à la globalité de la ressource, dit-il. On développe au maximum les opérations en circuits courts mais notre cœur de réacteur alimente le tissu agro-industriel. »
L’enjeu de l’adaptation de l’agriculture au changement climatique est primordial, pour tous. Aux trois mots en A que récite Isabelle Matykowski – anticiper, agir, accompagner – Laurent Degenne choisit le R au quintuple pour réserve (utile du sol), résistance (des plantes à sélectionner), recharge (des nappes), ressource (à pluviométrie équivalente, les épisodes sont répartis différemment) et ruissellement (à éviter en couvrant les sols nus l’hiver). « Aujourd’hui, nous connaissons des périodes de tensions l’été. Il faut éviter les crises et on a les moyens de les prévenir », insiste de son côté l’agence de l’eau.
« Un agriculteur a 40 quarante cycles dans sa carrière, calcule Emmanuel Leveugle, ce n’est pas beaucoup de temps pour réagir. » D’où Clim’eau fil. « D’où l’agriculteur placé au centre des différentes filières pour voir quels sont les pans à repenser pour être efficients », traduit-il.
« Le réchauffement climatique se fait sentir, il n’y a plus de débat sur ce point, lâche Marie-Sophie Lesne. Tout s’accélère. Les ponctions dans les nappes phréatiques ont triplé en dix ans, on a une obligation de résultat. » Pour la vice-présidente régionale en charge de l’agriculture, les Hauts-de-France peuvent « être un acteur majeur du maintien de la souveraineté de la France ».
« On ne veut pas se tromper et que le marché parte sans nous », s’inquiète Laurent Degenne. L’agence de l’eau, quant à elle, replace la ressource au cœur du débat et la sobriété en maître mot. Avec un constat évident. « Les territoires ne sont pas égaux. » Le mot de la fin revient au président de la chambre régionale. « On doit se battre pour nos territoires et préserver les richesses. Le projet Clim’eau fil est multisectoriel, on a tous un rôle à jouer. »
Louise Tesse
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